Tout le monde, ou à peu près, sait quels comportements adopter pour réduire ses émissions de CO2. Mais savez-vous, parmi toutes ces mesures, lesquelles sont les plus efficaces ? Ce dossier tente de quantifier l’impact des 5 actions qu’il convient d’adopter prioritairement pour diminuer notre bilan carbone individuel.

Pour commencer, quelques ordres de grandeur.
Le Français moyen émet 7,2 tonnes[1] de CO2 par an. Selon climatmundi.fr, il est admis que le niveau d’émissions soutenable à long terme pour éviter des dérèglements climatiques majeurs sur la planète est de 2 tonnes par personne et par an[2], soit 4 fois moins que nos émissions actuelles. C’est l’objectif que s’est fixée la France d’ici à 2050.
A titre de comparaison, en 2017, l’Européen moyen émettait 8,8 tonnes ; un Belge, 10,5 tonnes et un Allemand, 11,3 tonnes.
Au niveau mondial, un Qatari émettait 49,2 tonnes en 2017, un Koweïtien, 25,2 tonnes, alors qu’un Américain n’émettait « que » 16,2 tonnes.

Le top 5 des mesures les plus efficaces

Hypothèse de départ :  7,9 tonnes CO2/hab/an

1. Remplacer la voiture thermique par une électrique 

C’est de toute évidence la mesure qui a le plus gros impact sur notre bilan carbone. Rouler en voiture électrique permet d’économiser 75% des émissions de CO2 d’une voiture thermique. Les émissions annuelles d’une voiture thermique étant en moyenne de 2,2 t/an, l’économie s’élève en moyenne à 1,65 tonne/an[3].

Il s’agit bien sûr de moyennes : environ 30% des Français prennent l’avion une fois par an, alors que plus de 95% des foyers possèdent une voiture (32 millions de voitures individuelles pour 28,5 millions de foyers en France en 2017[4]), avec laquelle ils parcourent en moyenne 15.000 km/an.

Résultat en appliquant la mesure 1 :     6,250 tonnes/hab/an

(Note : rouler 5.000 km de moins par an avec une voiture thermique permet de réduire ses émissions de 750 kg de CO2/an).

2. Eviter un trajet en avion 

En évitant un voyage par an en avion, d’une durée de 2 heures (voyage intra-européen), on réduit ses émissions d’environ 900 kg[5] de CO2. Mais si vous renoncez à un voyage en Thaïlande, vous économiserez 4 tonnes de CO2, ou jusqu’à 7 tonnes si vous vous abstenez de visiter l’Australie.

Ici également, les chiffres varient très fort selon les sources. Ces différences s’expliquent par le fait qu’il y a 2 méthodes de calcul des émissions de CO2 liées aux voyages en avion : la première établit la quantité de CO2 en fonction de la consommation moyenne de l’avion, de la distance parcourue, du taux de remplissage moyen et de l’énergie grise liée à la fabrication de l’avion ainsi qu’à son entretien. La deuxième prend en compte le taux de forçage radiatif[6] lié aux nuages générés par les avions. En mai 2018, la revue Nature Communication déclarait que les nuages causés par les avions avaient sans doute un impact plus important que le carburant brûlé par les appareils.

A titre d’information, les rapports de l’Agence Européenne de l’Environnement évaluent les émissions individuelles liées à un voyage en avion à 285 g de CO2 par passager et par km.

Résultat en appliquant les mesures 1 & 2 :        5,450 tonnes/an

3. Réduire sa consommation de viande de 50% 

Selon le Rapport de la FAO (Organisation pour l’Alimentation et l’Agriculture des Nations Unies ), la production de viande nécessite 10 fois plus d’énergie que celle des produits végétaux (légumes, soja, …). En outre, le bétail a besoin d’une grande superficie de terre agricole, ce qui accélère la déforestation. Enfin, la production de viande a un impact non négligeable sur les changements climatiques en raison de l’émission importante de gaz à effets de serre durant tout le processus de production. Ces gaz proviennent des engrais (chimiques), de la digestion du bétail, de l’utilisation inefficace des terres agricoles et d’autres sources secondaires, sans parler du transport.

Il est estimé que ne pas manger de viande 2 jours par semaine équivaut à une économie de 340 kg de CO2 par personne et par an.
Ne pas manger de viande 3 jours par semaine permet une économie de 510 kg[7] de CO2 par personne et par an.
En remplaçant la moitié des repas contenant de la viande par des repas végétariens, on peut réduire son impact carbone d’environ 600 kg CO2/an. On estime en effet que l’impact annuel d’une consommation de viande moyenne (> 100 g/jour) s’élève à 1,2 tonne CO2/an.

Résultat en appliquant les mesures 1 à 3 :         4,850 tonnes/an

4. Isoler votre logement et diminuer la température de votre chauffage de 1°C

Si nous partons de l’hypothèse d’une maison émettant 4 tonnes de CO2 par an (70% chauffage au gaz et 30% électricité), l’isolation de la toiture permettrait d’économiser 840 kg de CO2/an.
L’isolation des murs engendre une économie de 700 kg de CO2/an, et l’isolation du sol, jusqu’à 280 kg de CO2/an.

Toutefois, en France, de nombreux ménages se chauffent à l’électricité. Le mix électrique français étant principalement composé d’énergie nucléaire, une isolation de la toiture et des murs aura dès lors moins d’impact en termes d’émissions de CO2 que dans le cas d’une maison chauffée au gaz.
On considère que l’isolation de la toiture permet une économie de 30% de l’énergie (en moyenne 20.000 kWh/an pour le chauffage). Avec un mix énergétique émettant environ 50 kg CO2 /MWh[8] produit, l’économie réalisée s’élèverait à 6.000 x 0,05 = 300 kg de CO2/an.

Couplée à une isolation des murs, on arrive à une économie globale de 475 kg de CO2/an.

Ces mesures, quoique stimulées de manière variable par le gouvernement, sont souvent plus difficiles à mettre en œuvre vu le coût d’investissement qu’elles impliquent.
Par contre, réduire sa température ambiante ne demande aucun investissement.
Sachez que diminuer la température ambiante permet de réduire ses émissions de 75 kg à 300 kg de CO2 par an selon la source d’énergie utilisée. Etant donné que 47% des Français se chauffent à l’électricité, 23% au gaz, et les 30% restants au fioul ou au bois, nous retiendrons comme hypothèse une économie de 250 kg de CO2 par an.

Résultat en appliquant les mesures 1 à 4 :         4,125 tonnes/an

5. Acheter des vêtements en coton bio et local

Les études estiment que l’industrie textile est responsable de 3% à 10% des émissions de CO2 mondiales.
Le meilleur tee-shirt est bien sûr celui qu’on n’achète pas. Car la fabrication de vêtements en coton nécessite un processus très énergivore : un tee-shirt blanc homme coton de 155 g a émis 6,5 kg de CO2.
Et on ne vous parle pas des 2.500 litres d’eau, ainsi que des pesticides, insecticides et colorants chargés en métaux lourds que sa fabrication a nécessités …
Un tee-shirt équivalent fabriqué avec de l’énergie renouvelable et du coton bio n’émet que 0,67 kg de CO2. Dix fois moins.
Et chaque Français achète en moyenne 9,2 kg de vêtements par an.

En n’achetant que des vêtements en coton bio, il pourrait ainsi réaliser une économie de 340 kg de CO2 par an.

Résultat en appliquant mesures 1 à 5 :               3,785 tonnes/an

La mise en œuvre de ces 5 mesures est évidemment difficile à réaliser en un court laps de temps. On prévoit que pour leur application, un délai de 10 ans est nécessaire.
De plus, ces 5 mesures ne permettent pas d’atteindre le seuil recommandé des 2 tonnes/hab/an, mais elles contribuent néanmoins à réduire son empreinte CO2 de près de la moitié.

Nous n’avons sélectionné ici que 5 mesures parmi celles qui nous semblent avoir le plus grand impact sur nos émissions de dioxyde de carbone.
Les chiffres cités n’enlèvent rien à l’intérêt de manger bio et local, de viser le zéro déchet, de conserver son gsm un an de plus, de rouler en vélo électrique ou d’installer une citerne à eau, mais ils donnent des ordres de grandeurs, qui permettront sans doute à certains d’entre vous de mieux prioriser ces différentes mesures.


[1] Source : https://ec.europa.eu/eurostat. Les chiffres sont exprimés en unités équivalent CO2, et regroupent l’ensemble des émissions de gaz à effet de serre contenus dans le « panier de Kyoto » (CO2, CH4, N2O, gaz fluorés et SF6). L’émission d’un français moyen varie selon les sources : le chiffre diffère selon que l’on parle des émissions individuelles de CO2 (CO2 émis dans le pays) ou de l’impact carbone qui englobe les émissions indirectes (produits importés). Le site Planetoscope.fr parle de 11,9 tonnes CO2/hab/an.
[2] Les chiffres varient aussi selon la méthodologie appliquée : selon que l’on calcule la totalité des émissions de CO2 admissible, rapportée au nombre d’habitants de la planète, ou si l’on tient compte du fait que plusieurs pays émettent déjà sensiblement moins que le seuil de 2 t/hab/an, ce qui permettrait aux pays industrialisés d’émettre jusqu’à 4,5 t/hab/an.
[3] Les émissions d’un véhicule électrique sont estimées à 40 g CO2/km, contre une moyenne de 160 g pour un véhicule thermique (compte-tenu des sous-évaluations des chiffres réels). Le changement de mode de propulsion permet donc d’économiser 75% des émission d’un moteur à combustion interne.
[4] http://www.economiematin.fr/news-demographie-la-taille-moyenne-d-un-foyer-francais-est-de-2-2-personnes-seulement
[5] http://calculateurco2.org/avion/?lang=fr.
[6] Le forçage radiatif exprime le déséquilibre d’origine humaine entre l’énergie entrante (rayonnement solaire) et l’énergie sortante de l’atmosphère. On estime à 4% le pourcentage de forçage radiatif anthropogénique lié au secteur de l’aviation.
[7] EVA, www.vegetarisme.be
[8] http://electricitymap.tmrow.co