AccueilNucléaireLes réacteurs à fusion feront-ils plus d'argent en produisant de l’or que de l’électricité ?

Les réacteurs à fusion feront-ils plus d'argent en produisant de l’or que de l’électricité ?

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Par Laurent GAUTHIERPublié le 3 août 2025
Illustration générée par IA

Depuis bien longtemps, l’« or noir », c’est le pétrole. Une métaphore, bien sûr, pour mettre en exergue son importance extrême pour l’économie mondiale. Mais si produire de l’énergie permettait aussi de faire de l’or ? Et cela réellement, c’est-à-dire sans métaphore ? C’est bien ce qu’ont déterminé trois chercheurs américains dans un article qui vient tout juste d’être publié.

Connaissez-vous la chrysopée ? Ce n’est pas le nom d’une jolie plante d’appartement, mais cela reste un joli mot de la langue française. En latin chrysopoeia, le mot provient lui-même des termes grecs « khrysos », pour or, et « poiein », pour faire. Oui, vous avez bien lu : il s’agit bien de l’art de faire de l’or, et ce à partir de métaux moins précieux.

Dans cet article, cependant, nous n’aborderons par les mystères de l’antique alchimie. Nous nous contenterons d’évoquer les travaux d’Adam Ruthkowski, Jake Harter et Jason Parisi, de la société Marathon Fusion, dont les résultats ont été publiés sur Arxiv, le célèbre site de publication scientifique en source ouverte. Les trois chercheurs nous proposent une approche plutôt high-tech de la transmutation des métaux en or.

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La recette moderne de la transmutation

Comment procéder ? Prenez un réacteur à fusion utilisant comme combustible le deutérium et le tritium. Les neutrons émis par la réaction de fusion thermonucléaire sont très énergétiques, à hauteur de 14 millions d’électrons-volt (14 MeV). Placez ensuite à proximité, sur la paroi de la chambre de réaction, du mercure (et notamment son isotope Hg-198). Les noyaux de mercure bombardés par l’intense flux de neutrons vont réagir avec ces derniers, et former un isotope stable de l’or (Au-197).

Les chercheurs sont allés plus loin dans leur évaluation. Ils ont déterminé que de telles cibles au mercure n’empêcheraient pas pour autant de surgénérer le tritium. C’est un aspect indispensable en effet d’un tel réacteur à fusion, car le tritium a une période radioactive relativement courte, et ne peut pas être trouvé naturellement sur notre planète ; il doit donc être fabriqué, et ce, au cœur même du réacteur.

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Une valeur économique tout à fait significative

Outre cette étude de faisabilité, l’étude de Ruthkowski et ses collègues a permis d’évaluer la productivité d’un tel réacteur : environ deux tonnes d’or par an par milliard de watt-heures thermiques produits (GWhth). De quoi doubler, selon les auteurs, les revenus générés par le réacteur.

Pour terminer, on peut se demander si cet or serait radioactif. Les chercheurs y ont pensé. Leurs calculs montrent que le temps de décroissance radioactive nécessaire serait de l’ordre de 14 ans pour que l’or ne soit plus considéré comme un déchet nucléaire. Et de 18 ans pour qu’il ne soit pas plus radioactif qu’une banane – une unité bien souvent utilisée dans le secteur du nucléaire, du fait de son fort contenu en potassium-40 radioactif. Pour en rester aux comparaisons culinaires, relevons que certains vinaigres balsamiques sont affinés pendant bien plus longtemps.

Offrir un anneau d’or issu de la fusion des atomes sera-t-il bientôt du dernier cri ?

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