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Moteurs : tous les rendements !

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Par Laurent GAUTHIERPublié le 27 décembre 2025
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Le rendement énergétique est une notion bien souvent utilisée pour comparer les moteurs entre eux. Cette notion est importante dans le débat public parce qu’elle évalue, dans une certaine mesure, le gaspillage d’énergie. Comment les moteurs se classent-ils donc entre eux, par rapport à ce critère du rendement ? Et les comparaisons sont-elles aussi simples ? C’est bien ce que nous allons détailler dans cet article.

Un moteur utilise une source d’énergie, par exemple un carburant, pour le transformer en mouvement, c’est-à-dire en énergie cinétique. Comme toute transformation dans la nature, elle ne peut pas se faire sans pertes, et ces pertes sont le plus souvent sous forme de chaleur, laquelle est inutile au mouvement. Ainsi, si l’on consomme par exemple 1 kWh d’énergie chimique potentielle contenue dans un carburant, et que l’on ne récupère que 0,3 kWh sous forme de mouvement, on dira que le rendement est 30 %.

Les moteurs ayant le plus mauvais rendement sont les moteurs à vapeur. C’était le type de moteurs le plus courant au XIXème siècle et au début du XXème, et il a été immortalisé par les locomotives à vapeur, ces monstres d’acier et de fumées qui arpentaient en grondant les rails des chemins de fer. Ces machines avaient des rendements très faibles, de l’ordre de 5 à 15%. Ce rendement a par la suite été amélioré par l’introduction de la technologie des turbines à vapeur, qui équipait en particulier des navires, et permettaient d’atteindre des rendements de l’ordre de 20 ou 30%. C’est aujourd’hui cette dernière technologie, en un peu plus efficace (jusqu’à environ 35 %), qui équipe une grande part des centrales thermiques modernes, dont les centrales nucléaires comme les réacteurs à eau pressurisée (REP).

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Les moteurs à combustion modernes ont un bien meilleur rendement

Les moteurs à essence viennent ensuite. Basés généralement sur le principe de la combustion interne, leur rendement est de l’ordre de 20 à 35%, et peut être amélioré pour dépasser les 45% pour les moteurs optimisés. Les moteurs à essence hybrides (thermique-électrique) permettent encore de gagner du rendement, et de dépasser 50%. Il faut noter au passage que le rendement des moteurs thermique dépend grandement de la variation rapide des régimes moteurs ; un moteur fonctionnant de manière constante aura globalement un meilleur rendement. Un véhicule circulant en ville, avec de nombreuses accélérations et freinage, aura donc un rendement plutôt dans la borne basse des valeurs usuellement considérées.

L’utilisation de gaz naturel pour véhicule (GNV), sous la forme comprimée (GNC) ou liquéfiée (GNL), conduit à un rendement proche de celui des moteurs à essence, voire légèrement supérieur, que l’on pourrait placer dans la gamme 25 à 40% – les véhicules dits « dual fuel », qui utilisent deux carburants (gaz naturel et diesel ou essence), peuvent porter ce rendement à 50%. Viennent ensuite les moteurs Diesel, dont le rendement est un peu meilleur, de l’ordre de 30 à 45%. Le rendement peut même atteindre 55% pour les applications employant les plus puissants diesels du marché, comme les moteurs marins, qui propulsent les gros navires.

Les turbines à combustion (TAC) simples, quant à elle, ont un rendement de l’ordre de celui des moteurs diesel, ou légèrement inférieur. Elles équipent les avions dits « jet » mais aussi d’autres types de véhicules militaires (chars d’assaut, navires, …). Les TAC peuvent cependant se distinguer par la technologie dite « à cycles combinés », dont le rendement est alors très augmenté, de l’ordre de 50% à 60%, voire 65% pour les systèmes les plus modernes. Du fait de leur complexité, leur usage est toutefois réservé aux centrales électrique stationnaires, même s’il existe des recherches, voire des prototypes, destinés au secteur du transport, en particulier pour les très grands navires.

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Les moteurs électriques sur le podium du rendement

Les piles à combustible utilisent une réaction électrochimique pour convertir le combustible en mouvement, plutôt que thermochimique comme pour les moteurs à combustion. Pour être plus précis, la pile consomme le combustible et produit de l’électricité, laquelle est utilisée par un moteur électrique pour produire le mouvement. Ce principe offre de bien meilleurs rendements que la combustion. Les piles à combustible ont ainsi un rendement compris entre 40 à 60%. Elles peuvent utiliser comme combustible l’hydrogène, le méthanol (CH3OH), le gaz naturel ou encore l’ammoniac. Ces rendements peuvent être grandement améliorés par la cogénération d’électricité et de chaleur, jusqu’à dépasser 85%, voire 95% ; mais la cogénération reste toutefois difficile à adapter en pratique à un véhicule, au-delà de l’usage de la chaleur pour chauffer l’habitacle.

La marche la plus haute du podium des moteurs est occupée par les moteurs électriques. Ces derniers ont un rendement de l’ordre de 75 à 95%. Cette valeur très élevée peut s’expliquer par des considérations thermodynamiques relatives à l’entropie. L’entropie est liée à une forme de quantification de l’ordre d’un système physique. Pour donner une image, les rendements représentent les pertes d’énergie qu’il faut consentir pour organiser l’énergie. L’énergie thermique est très désorganisée, tandis que le mouvement est très organisé : il faut donc accepter de perdre beaucoup d’énergie pour l’organiser, d’où un rendement faible pour les systèmes thermiques. En revanche, l’électricité est une forme d’énergie déjà très organisée, et il est donc peu coûteux de la transformer en une forme d’énergie tout autant organisée, comme le mouvement.

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La notion de rendement est délicate à manipuler

À ce stade, il faut toutefois relever que si le rendement intrinsèque (« tank-to-wheel ») des moteurs électriques est élevé, il faut intégrer dans le rendement global le rendement de la production de l’électricité qui sera utilisée – et cette dernière peut être de l’ordre de 35 % -, ceci afin d’obtenir un rendement dit « du puits à la roue » (« well-to-wheel »). Le rendement des moteurs électriques peut alors devenir comparable, voire, selon les situations, inférieure, à celui des moteurs thermiques. Le résultat est différent si l’on considère une source d’électricité renouvelable (éolienne, photovoltaïque), qui produit directement de l’électricité, ramenant le rendement à un niveau plus élevé. Mais pour que l’image soit complète, il conviendrait alors d’inclure l’énergie grise, c’est-à-dire la part d’énergie qu’il a été nécessaire de dépenser pour fabriquer le matériel de production. Comme nous le voyons, la notion de rendement est en définitive assez difficile à manipuler en pratique, en termes de calcul, et de définition rigoureuse de son périmètre.

Ce constat nous amène ainsi à relativiser l’importance opérationnelle de la notion de rendement. Il permet de comparer des solutions technologiquement cohérentes, mais devient plus contestable dès lors que l’on souhaite comparer des filières très différentes : hydrocarbures fossiles, électrique, combustibles de synthèse, agrocarburants. Cela exige alors des méthodes rigoureuses et cohérentes – qui occasionneront toujours d’importants débats. Et dans cet exercice, vient fortement peser dans la comparaison les notions liées à l’accès à la ressource (hydrocarbures fossiles, uranium, vent, soleil, …), les réserves connues pour ces dernières, et les impacts sociaux, économiques et environnementaux de leur usage.

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