AccueilSolairePourquoi l'électricité n'est pas gratuite pour les consommateurs alors que les prix sont parfois négatifs ?

Pourquoi l'électricité n'est pas gratuite pour les consommateurs alors que les prix sont parfois négatifs ?

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Par Hector PIETRANIPublié le 20 décembre 2025
Illustration : RE.

Les prix négatifs font fantasmer autant qu’ils sont impossibles à répercuter sur les consommateurs. En dessous de zéro lorsqu’il y a beaucoup de production – solaire ou éolienne – et une demande faible, ces prix alimentent l’idée que l’électricité pourrait devenir « gratuite ». Pourtant, pour les consommateurs, cela ne change quasiment rien à leur facture.

Pourrons-nous, un jour, être payés à consommer de l’électricité ? Non, enfin, pas tout de suite. La raison tient au fonctionnement même de la décomposition de notre facture, très différente de la formation du prix de gros, qui, lui, peut être inférieur à zéro euro.

La facture d’un ménage se décompose en trois tiers : la part liée à l’électron lui-même (ce que le fournisseur achète), les coûts d’acheminement (le TURPE, qui rémunère Enedis et RTE et les entreprises locales de distribution) et les taxes et contributions (accise, certificats d’économie d’énergie, mécanismes de capacité, TVA). Ces taxes et coûts fixes représentent une part majoritaire de la facture, autour de 60 %, et s’appliquent quelle que soit l’évolution des prix de gros.

Même si les taxes sont parfois proportionnelles à l’énergie consommée ou au prix payé, ces 60 % rémunèrent les investissements dans les réseaux électriques. Ces derniers sont de plus en plus élevés pour être rénovés et adaptés au changement climatique.

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De rares offres répercutent les prix négatifs, mais ne sont pas toujours avantageuses

Ensuite, le consommateur n’achète pas directement sur le marché de gros. Les fournisseurs se couvrent sur les marchés à terme : c’est une obligation pour prouver qu’ils ont, en miroir, la capacité à « servir » leurs clients pour se rémunérer et lisser leurs coûts dans le temps. Ils facturent ensuite leurs clients sur un marché de détail avec des contrats à prix fixe ou dynamiques régulés. Cela donne de la stabilité à la facture mais empêche qu’une heure à prix négatif sur les marchés spot se traduise immédiatement en un prix de zéro euro pour le consommateur.

Pourtant, des offres plus dynamiques commencent à émerger et rapprochent davantage le prix payé par les ménages du signal-prix du marché. Certaines proposent une tarification très flexible en fonction des prix horaires (Sobry par exemple). Dans ce registre, Engie a récemment lancé une offre dite Happy Heures Vertes qui promet deux heures d’électricité « gratuite » chaque jour sur un créneau choisi entre 13 h et 17 h, périodes de forte production solaire.

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Les taxes restent et dépasseront toujours le prix négatif du marché de gros

La subtilité, c’est que sur le papier, le prix du kilowattheure pendant ces deux heures est à 0 € hors taxes, mais les taxes s’appliquent, ce qui ramène le coût réel du kWh à environ 0,036 € toutes taxes comprises. En contrepartie, les autres heures de la journée sont facturées à un tarif plus élevé que les tarifs réglementés classiques, ce qui rend l’offre d’Engie peu avantageuse en moyenne annuelle.

Finalement, les prix négatifs observés sur les marchés de gros n’entraînent pas de factures négatives ni de gratuité généralisée pour les ménages. Il faudrait des heures sacrément négatives pour compenser les taxes. Ce qui ne risque pas d’arriver car des dispositifs de flexibilité (équilibrage, écrêtement…) sont renforcés à mesure que les renouvelables pénètrent le mix français.

En témoignent la refonte actuelle du mécanisme de capacité, la participation prochaine des ENR au mécanisme d’ajustement, ou encore le volume de batteries ayant demandé un raccordement…

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