Une rare éclipse totale est survenue aux États-Unis, ce lundi 8 avril. Son déplacement a fortement perturbé la production photovoltaïque américaine, avec jusqu’à 84,8 GW de parcs solaires qui se sont retrouvés dans l’ombrage. Les conséquences sur l’activation des mécanismes de réserve, l’évolution des prix de marché et la demande sont intéressantes à analyser.

Plus de 30 millions d’Américains ont pu admirer l’éclipse solaire totale qui a traversé une partie du pays, lundi 8 avril 2024. Armés ou pas de leurs lunettes, ils ont pu observer la Lune s’intercaler entre la Terre et le soleil. La nuit s’est propagée sur une diagonale qui a balayé le Mexique, le sud et l’est des États-Unis (EU), et ce, durant deux heures.

Le spectacle était au rendez-vous comme en témoignent les images des chutes du Niagara et de la statue de la Liberté plongées dans le noir quelques minutes durant. Un autre phénomène, passé un peu plus inaperçu, est la chute vertigineuse de la production solaire le temps de ce phénomène naturel. Près de 80 GW de panneaux américains ont presque cessé de produire de l’électricité, perturbant à la fois les marchés et entraînant différentes réactions suivant deux États passés à la loupe : la Californie, premier producteur des EU avec 47 GW de parcs solaires et le Texas, second producteur avec 23 GW.

Intensité carbone et prix élevés au Texas

Au Texas, le mix énergétique est diversifié. L’État dépend, solaire exclu et par ordre croissant de contribution au mix électrique, du nucléaire, du charbon, de l’éolien et du gaz. Lorsque la Lune a décidé de masquer notre étoile, la production solaire s’est effondrée de 72 %. Pour la remplacer, il a fallu que les centrales à gaz et au charbon fournissent pas moins de 6 GW durant trois heures. Ces moyens carbonés ont fait exploser l’intensité carbone du mix électrique texan, avec un maximum observé de 462 g de CO2 par kWh (gCO2/kWh). Ce jour-là, elle n’est pas descendue sous la barre des 300 gCO2/kWh. À titre de comparaison, la France était ce lundi 8 avril à 14 gCO2/kWh.

Du même ordre de grandeur, les prix sur le marché texan ont culminé à 470 $ le MWh ($/MWh). À l’inverse, au nord-est des EU, l’opérateur ISO New England a vu l’opposé se produire sur les prix : comme si les opérateurs de marché avaient trop anticipé la baisse de production solaire, les prix sont même devenus négatifs.

En Californie, des batteries au secours et une demande gonflée

Au sud-ouest des EU se trouve la Californie. Les efforts du gouverneur en faveur des renouvelables portent leurs fruits, avec des journées où le solaire contribue régulièrement à 90 % du mix électrique. Lors de l’éclipse, partielle à cet endroit, les batteries ont couvert l’absence de soleil en passant de -2,5 GW à +2,5 GW. Fait notable, mais purement statistique, la demande a gagné 2 GW durant cet évènement rare. Et pour cause, la production solaire domestique est située en aval du compteur et a donc, en son absence, augmenté la puissance soutirée sur le réseau par les habitants de Californie. Cette éclipse est intéressante pour analyser une perturbation rare du marché et son adaptation, différente suivant les États. De notre côté, pas de quoi paniquer en France, la prochaine éclipse totale du soleil n’arrivera pas avant… 2200.