Il a déclaré sa flamme pour la pompe à chaleur. Lors de son interview télévisée du 26 septembre 2023, le chef de l’État a annoncé vouloir fabriquer en France 1 million d’exemplaires de ce mode de chauffage bas-carbone d’ici 2027. Objectif :  réduire massivement nos émissions de CO2, en remplaçant les chaudières au fioul, gaz et convecteurs par des pompes à chaleur. Mais comment compte-t-il s’y prendre ?

1 – Tripler la production de pompes à chaleur en 3 ans semble irréaliste

« Nous avons décidé de développer une filière industrielle de pompes à chaleur ». Alors que la France fabrique annuellement entre 300 000 et 350 000 pompes à chaleur (PAC) actuellement, Emmanuel Macron souhaite inciter les industriels à tripler la production d’ici 2027 pour atteindre le seuil symbolique du million d’unités assemblées chaque année.

Les moyens de production actuels ne sont pas à la hauteur des ambitions du chef de l’État pour produire une telle quantité, c’est une filière industrielle entière qui est à adapter et à moderniser. La France dispose pourtant de nombreux fabricants sur son territoire et une capacité de réalisation reconnue en Europe.

Toutefois, ces fabricants sont souvent des assembleurs de produits venant de l’étranger, car ils n’arrivent pas à la moitié de la chaîne de valeur des pompes à chaleur. L’objectif paraît difficile à atteindre dans un délai si court, car il est nécessaire de former une grande quantité de personnes, et de lancer la fabrication de certains composants jusqu’ici exclusivement importés d’Asie, comme le bloc compresseur.

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2 – Toutes les pompes à chaleur ne seront pas installées en France

Le projet de loi « industrie verte » prévoit essentiellement des crédits d’impôt à hauteur de 3 à 400 millions d’euros, pour environ 2 milliards d’investissements, soit un soutien à hauteur de 20 à 25 %. Une autre enveloppe est prévue pour l’innovation en la matière, à hauteur de 30 millions d’euros. Il est également évoqué de réserver certaines subventions aux modèles « made in France » ayant un faible impact environnemental et en transport.

Le marché français représente actuellement 1 million d’unités, réparties entre 350 000 PAC air/eau et 650 000 PAC air/air. Il est très attrayant pour les constructeurs étrangers, au regard de la modeste production locale. En construisant 1 million de PAC chaque année, il faudra prévoir l’exportation de modèles à l’étranger, sur des marchés ou les pompes à chaleur sont peu déployés, comme en Angleterre et en Allemagne. Il semble illusoire de penser que la totalité de la production française sera écoulée sur le marché national.

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3 – Il faudra former 30 000 installateurs de pompes à chaleur

Emmanuel Macron a également annoncé la nécessiter de former 30 000 installateurs, pour répondre au déploiement massif de pompes à chaleur. Si la PAC représente un avantage indéniable pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre, son installation nécessite une profession efficace, qui souffre actuellement du manque de personnel. De plus, un marché aidé attire les arnaques, avec le risque de voir se développer des installations mal dimensionnées, surconsommatrices ou offrant peu de confort thermique.

Enfin, installer des pompes à chaleur sans isolation performante du bâti n’est pas idéal. Il est donc nécessaire d’être correctement accompagné pour déterminer le modèle qui correspond aux besoins de chaque logement. Ces remarques sont prises en compte par le projet d’Accompagnateur France Rénov’, obligatoire à compter de 1 septembre 2023 pour les projets d’isolation et d’installation de PAC. N’oubliez pas que la pompe à chaleur a 1 euro ou sans reste à charge n’existe pas et dénote d’une information malveillante.

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4 – Les aides à l’achat d’une pompe à chaleur seront revalorisées

Des aides existent pour accompagner les ménages dans l’installation d’une pompe à chaleur. La Prime Rénov’ dépend des revenus des ménages et des modèles de PAC installés. Elle s’élève de 2 000 à 4 000 € pour une PAC air/eau et de 4 000 à 10 000 € pour une PAC géothermique. La prime « coup de pouce » ou certificats d’économie d’énergie (CEE) est cumulable, et son montant, en fonction des revenus, varie de 2 500 à 4 000 €, soit un montant maximal cumulé de 8 000 € pour une PAC air/eau, et 14 000 € pour une PAC géothermique.

Le gouvernement a annoncé également 1,6 milliard d’euros supplémentaires aux aides à la rénovation énergétique portant sur l’isolation et le chauffage, avec pour objectif 200 000 rénovations d’ampleur. Il est aussi question de revaloriser les aides pour les revenus modestes et intermédiaires. Toutefois, Emmanuel Macron a renoncé à l’interdiction des chaudières à gaz. Sur ce secteur, il est dommage de ne pas avoir imposé l’alternative des PAC hybrides, associant chaudière gaz et pompes à chaleur, avec un rehaussement des aides.

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 5 – Le prix de l’électricité sera mieux contrôlé

Développer les pompes à chaleur est une forme d’électrification du chauffage. Si ces appareils puisent la majorité de leur énergie dans l’environnement (l’air ambiant, l’eau, le sol), ils consomment aussi de l’électricité. Il devient donc plus que jamais nécessaire de maîtriser les coûts de cette énergie, devenus très volatils depuis 2022.

Emmanuel Macron a confirmé vouloir reprendre le contrôle du prix de l’électricité, afin de garantir la visibilité des tarifs aux ménages et aux industriels. Modérer la hausse du prix du kilowattheure est crucial, car utiliser des pompes à chaleur utilisant une électricité trois fois plus chère que du fossile serait rapidement un échec. Réduire ses émissions de CO2 ne doit pas rimer avec facture salée. L’écologie « à la française » doit être accessible à tous.