Les startups françaises du nucléaire misent beaucoup sur les petits réacteurs modulaires (SMR). Mais derrière l’enthousiasme, plusieurs projets s’enlisent dans des difficultés techniques et financières, mettant en péril leur avenir.
Tout n’est pas rose pour les startups qui portent des projets de construction de SMR, ces petits réacteurs nucléaires miniaturisés. Malgré l’espoir qu’ils suscitent, nombre d’entre elles sont rattrapées par des obstacles techniques qui fragilisent leurs finances, en particulier en France.
Si les SMR apparaissent comme une solution prometteuse pour décarboner efficacement et à moindre coût par rapport aux réacteurs traditionnels, leur développement reste semé d’embûches. Les jeunes pousses françaises Naarea et Newcleo en font actuellement les frais, au point que leur survie est menacée.
À lire aussiLa course aux mini-réacteurs nucléaires SMR prend une folle ampleurLa situation de Naarea est critique. L’entreprise fait face à une dette de 15 millions d’euros. Elle développe un réacteur nucléaire à neutrons rapides d’une puissance de 80 MWth (40 MWe), et emploie 200 personnes. Placée en redressement judiciaire, elle dispose de six mois — renouvelables deux fois — pour trouver de nouveaux financements, faute de quoi elle sera liquidée. Ses dirigeants misent encore sur de potentiels investisseurs européens, pour un montant espéré de plusieurs centaines de millions d’euros.
La startup italienne Newcleo connaît également de fortes tensions financières. Selon La Tribune, elle dépenserait 13 millions d’euros par mois pour rémunérer ses 1 000 employés, mais ne disposerait que de 160 millions d’euros en trésorerie. Sans nouveaux apports, ses fonds seraient épuisés d’ici un an. En attendant, l’entreprise, qui ambitionne d’ouvrir une usine de Mox en 2030 dans l’Ain, réduit ses contrats d’ingénierie et a déjà supprimé 150 postes au Royaume-Uni.
À lire aussiMéga subvention pour le mini réacteur nucléaire SMR français Nuward d’EDFSi Naarea et Newcleo bénéficient du soutien de l’État, notamment via le programme France 2030, leurs besoins en capitaux restent colossaux, alors que la commercialisation des réacteurs demeure lointaine.
Pourtant, les SMR continuent d’attirer des investisseurs privés. L’Agence de l’énergie nucléaire estime à 5,4 milliards de dollars les investissements récents dans ce secteur. Mais même si ces réacteurs sont censés être plus simples à industrialiser et moins coûteux à construire, ils affrontent les mêmes obstacles que le reste de la filière : budgets qui explosent et délais qui s’allongent.
À lire aussiMini réacteurs nucléaires : Google, Amazon et Microsoft s’enflammeraient un peu trop viteL’exemple de NuScale illustre ces écueils. La startup américaine, désormais fermée, a vu ses coûts bondir de 9 964 $/kW en 2015 à 21 561 $/kW en 2023. En France, l’ASNR a récemment jugé que le calendrier de plusieurs projets SMR était irréaliste face aux contraintes techniques et réglementaires. Même le projet Jimmy, pourtant l’un des plus avancés, visait une mise en service en 2026 ou 2027, un objectif difficilement tenable. De fait, le renouveau du nucléaire passera nécessairement par un soutien massif des États.
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