Le rendement est une donnée emblématique de la performance d’une cellule photovoltaïque. Il est donc attendu que les instituts de recherche rivalisent d’ingéniosité pour battre chaque année les records précédents. Et le dernier record vient d’être battu. Comme les chercheurs s’y sont-ils pris, et dans quel objectif ?

C’est un nouveau record de rendement qui a été annoncé à l’occasion d’une conférence annuelle spécialisée, l’European Photovoltaic Solar Energy Conference (EU PVSEC 2023), qui s’est tenue le 21 septembre 2023 à Lisbonne. Le communiqué de l’Institut Fraunhofer indique la valeur record : 36,1 %, valeur qui n’avait encore jamais été atteinte pour une cellule photovoltaïque multi-jonction à base de silicium.

Cette innovation est le résultat de la collaboration de deux organismes reconnus mondialement dans la technologie photovoltaïque : l’Institut Fraunhofer, un centre de recherche allemand, et l’AMOLF, un institut spécialisé dans l’étude de la matière basé à Amsterdam. Ces deux spécialistes ont combiné les meilleures de leurs techniques pour fabriquer une cellule très perfectionnée. Quelles sont ces techniques ?

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Un cocktail de technologies

Premièrement, il s’agit d’une cellule photovoltaïque multi-jonction. Cette technologie consiste à empiler sur une même surface des couches constituées de matériaux différents, chaque matériau étant choisi de façon à absorber avec la meilleure efficacité une partie spécifique du spectre solaire. Ainsi, la cellule ayant permis de produire le record est constitué de trois couches principales, de l’arrière vers l’avant : une couche de silicium, une couche de phosphure d’arsénium de gallium-indium (GaInAsP) puis enfin une couche de phosphure de gallium-indium (GaInP).

Structure de la cellule photovoltaïque triple-jonction qui a obtenu le record / Image : Schygulla et al. 2023 [1]

Par ailleurs, les équipes ont combiné les procédés les plus efficaces connus pour fabriquer une cellule de grande qualité. En particulier, le réflecteur arrière, qui optimise le piégeage de la lumière, la qualité de la couche intermédiaire GaInAsP, ainsi que le revêtement avant en métal/polymère ont été améliorés.

La face arrière du panneau est en outre dotée de la technologie TOPCON (pour Tunnel Oxide Passivated Contact), une technique destinée à amélioration le contact électrique à l’arrière du panneau, de plus en plus répandue industriellement, et développée, elle aussi, par l’Institut Fraunhofer. Tout a donc été mis en œuvre pour maximiser le rendement de la cellule photovoltaïque.

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Pour quelles applications ?

La fabrication de cellules photovoltaïques aussi perfectionnées est évidemment très coûteuse et il n’est donc pas envisageable de les utiliser pour une production de masse. Toutefois, elles présentent un avantage important lorsque l’espace disponible est limité, et lorsque les enjeux liés aux coûts de l’électricité sont moins importants.

C’est le cas, par exemple, pour les concepts de voiture solaire, pour certains produits de grande consommation alimentés par énergie solaire ou encore pour l’alimentation de drones. On peut songer également au solaire à concentration, dans lequel la lumière est concentrée plusieurs fois par des jeux de miroirs, concept au sein duquel le coût de la cellule elle-même est moins important ; toutefois l’Institut Fraunhofer n’évoque pas cette application, peut-être pour des raisons de tenue du matériau dans ces conditions.

[1] Schygulla et al. 2023, Wafer-Bonded two Terminal III-V–Si Triple-Junction Solar Cell with Power Conversion Efficiency of 36.1 % at AM1.5 G, présenté lors du 40th European Photovoltaic Solar Energy Conference and Exhibition (Lisbonne, Portugal, 18-22 septembre 2023) [lien]