L’hydrogène naturel est issu de processus géochimiques qui se produisent dans les entrailles de la Terre, et l’étendue réelle de la ressource suscite bon nombre de spéculations aujourd’hui. Mais qui le premier, a trouvé et utilisé cet hydrogène naturel ? Tout commence en Afrique.

Nous nous trouvons en 1987 au Mali, à proximité du village de Bourakébougou, situé à 60 km environ de Bamako. Au cours d’une campagne de forages destinés à alimenter les habitants en eau, l’un des puits s’avère sec. Il ne produit qu’un émanation décrite comme un « étrange courant d’air ». Une cigarette l’enflamme par inadvertance. L’incident n’eut heureusement aucune conséquence regrettable, mais il fallut près d’un mois pour maîtriser le feu. Le puits est ensuite rebouché, avant d’être oublié.

À partir de 2008, la société Petroma, détentrice d’une licence d’exploration dans la région, mène des travaux de recherche et d’exploration. L’incident du puits de Bourakébougou sort alors de l’oubli. Des analyses chimiques sont menées, amenant à une découverte exceptionnelle : il s’agit d’hydrogène naturel, pur à 98%. Aliou Diallo, homme d’affaire et homme politique malien est propriétaire de Petroma. Il fait le pari de croire que cette ressource est exploitable. En 2011, une campagne de forage est réalisée jusqu’à 2400 m de profondeur et confirme la présence du gaz, en grandes quantités.

À lire aussi L’un des plus grands gisements d’hydrogène naturel du monde se trouverait en France

Le puits d’hydrogène est utilisé pour produire de l’électricité

Petroma investit en 2012 dans une petite centrale pilote, non commerciale, destinée à utiliser cette source d’hydrogène pour alimenter en électricité le village de Bourakébougou. L’hydrogène est d’une grande pureté, il ne contient en effet que quelques traces de méthane, d’azote et d’hélium. Il peut être utilisé directement, sans traitement préalable, et donc à moindre coûts.

L’hydrogène est brûlé dans un moteur Ford de 30 kW. Il a permis d’assurer l’éclairage de plusieurs maisons et places publiques, ainsi que la mosquée du village. Une production sans émission de CO2. L’installation produira de l’électricité pendant 7 ans, sans que le flux d’hydrogène ne faiblisse, et sans que sa pression ne diminue. Ce constat est un indice amenant à penser que l’hydrogène naturel est rapidement renouvelable dans son gisement, du fait des processus géochimiques ayant lieu en sous-sol.

installation pilote de Bourakébougou / Image : Hydroma

À lire aussi Tout savoir sur les couleurs de l’hydrogène : vert, bleu, gris, jaune, blanc, brun, rose, noir, turquoise

Développement à l’international

Une collaboration internationale se forme ensuite, et regroupe des experts, dont Alain Prinzhofer, professeur à l’université de Paris VII et de l’institut de physique du Globe à Paris, chercheur et spécialiste de la recherche de l’hydrogène naturel. Plus de 20 puits d’exploration forés entre 2017 et 2018 confirmeront l’importance du gisement d’hydrogène.

Depuis, la société Petroma est renomée Hydroma et ambitionne de développer « des projets de production, de stockage, de transport et de distribution d’hydrogène vert et d’ammoniac en Afrique de l’Ouest et au Canada pour une utilisation locale et un export massif vers l’Europe et les marchés internationaux ». L’hydrogène naturel est bien sûr un concept encore trop neuf pour établir des certitudes, mais impossible de nier qu’il ait aujourd’hui le vent en poupe.