Il ne s’agissait que d’une transaction mineure sur la bourse de l’électricité. Mais une erreur s’est glissée, et le cours s’est effondré. Une « petite » erreur qui a coûté 40 millions d’euros à l’entreprise concernée et fait le bonheur de quelques consommateurs, rémunérés pour consommer de l’énergie pendant quelques heures. Comment cela s’est-il produit ?

De nos jours, l’électricité s’échange sur des places de marchés, tout comme de nombreuses autres denrées, entre différents acteurs qui l’achètent et la vendent, et des capacités d’interconnexion entre les pays. L’électricité étant peu stockable, les transactions concernent non seulement des volumes d’électricité, mais également les créneaux horaires précis où ces quantités seront produites et consommées. Et la loi de l’offre et de la demande, en principe, équilibre le prix de l’électricité.

Ce jeudi 23 novembre, la société norvégienne Kinect Energy a procédé à une opération sur le marché finlandais. Il s’agissait d’une offre de vente d’électricité. Cette offre était toutefois erronée : la société vendait en moyenne 5 787 MW pour toutes les heures de vendredi, soit près de 6 GW. Or, cela représente environ la moitié de la totalité de l’électricité consommée par la Finlande sur cette période.

L’offre s’est ainsi virtuellement trouvée considérablement supérieure à la demande. En conséquence, le prix de l’électricité s’est effondré, en ce qui concerne la Finlande et ce vendredi. Le prix a tellement baissé qu’il est entré en territoire négatif, c’est-à-dire que l’acheteur de l’électricité était payé pour consommer l’électricité lors des créneaux horaires. Et les montants n’étaient pas des moindres, les prix horaires ont atteint des records à – 500 €/MWh. Transposé à l’échelle d’un particulier, c’est comme si un fournisseur d’électricité offrait 0,50 € pour chaque kilowattheure consommé par ses clients !

À lire aussi Pourquoi certaines éoliennes ralentissent par grand vent ?

Des conséquences maîtrisées

Les conséquences ne sont pas insignifiantes. On peut comptabiliser tout d’abord les pertes pour Kinect Energy, qui pourraient totaliser 40 millions d’euros. Mais ce ne sont pas les seules. Fingrid, le gestionnaire du réseau finlandais, s’est inquiété de l’équilibre du réseau : en effet, cet appel à consommer de l’électricité le vendredi ne correspondait pas à une électricité qui existait. L’appel d’électricité aurait donc pu largement excéder la capacité de production, conduisant à une instabilité physique des réseaux électrique.

Entre autres mesures, Fingrid a suspendu les échanges intrajournaliers avec des pays frontaliers (Suède, Estonie). Peu à peu, la situation s’est améliorée et le marché intrajournalier a permis de retrouver un équilibre, toujours d’après le gestionnaire du réseau. Par ailleurs, certains en tireront profit. En effet, environ 14 % des consommateurs finlandais ont un contrat basé sur le prix du marché : ils seront donc rémunérés pour avoir consommé de l’électricité pendant ces horaires particuliers.

L’Agence Finlandaise de l’Énergie a lancé une enquête sur l’origine de cet incident. Cela semble nécessaire, en effet. Nous héritons toutefois d’une époque où l’électricité était produite par des acteurs publics et où ce genre d’opérations financières de haut équilibre n’existaient pas. On pourra se demander si ce système d’échange de l’électricité plus moderne ne serait pas plus fragile.