Alors qu’en France, le broyage et la délamination sont les seules méthodes renommées de recyclage de panneaux photovoltaïques, en Chine, des scientifiques travaillent sur une nouvelle approche chimique. Leur technique implique l’utilisation d’un solvant promis comme écologique appelé DBE.

Le DBE ou ester dibasique est un composé chimique couramment utilisé dans la formulation de peintures et de certains types de revêtements. Pourtant, des chercheurs de l’Académie chinoise des sciences associés au fabricant JinkoSolar sont parvenus à s’en servir dans le recyclage de panneaux solaires. Dans ce cadre, le produit vise à favoriser la séparation du verre et de l’EVA, des composants élémentaires d’un module solaire. Le procédé dit « par gonflement chimique » limiterait la fissuration des cellules solaires récupérées afin de faciliter leur recyclage.

De quoi est composé un panneau photovoltaïque ?

Afin de mieux comprendre la chaîne d’un recyclage par gonflement chimique, il importe de connaître les principaux composants d’un module solaire. En effet, le matériel est constitué de plusieurs couches de matériaux que l’on doit récupérer séparément. L’extérieur de la plaque est conçu en verre trempé, dont la masse représente environ 75 % de celle du panneau. Ce composant favorise la résistance aux chocs, aux UV et à l’humidité. En dessous est disposée une première couche d’EVA (éthylène-acétate de vinyle). Il s’agit d’une sorte de résine qui encapsule les cellules photovoltaïques afin d’optimiser et de stabiliser leur rendement énergétique.

À lire aussi Dans les coulisses d’une usine de recyclage de panneaux solaires

Après l’EVA, on peut découvrir les cellules solaires en silicium, le cœur d’un panneau photovoltaïque. Formant un système de production électrique, elles sont branchées en parallèle ou en série. On retrouve ensuite une seconde couche d’EVA avant d’arriver à la feuille de fond appelée backsheet. C’est le plastique que l’on peut percevoir au dos d’un module.

Cette superposition de matériaux est scellée par un cadre en aluminium. Son rôle est de faciliter la manipulation et la pose de l’appareil, et de contribuer à sa résistance. Le dernier composant principal d’un panneau est la boîte de jonction prévue pour conduire l’électricité vers les lignes externes.

Les étapes d’un recyclage par gonflement chimique

Le processus est constitué de plusieurs étapes. Dans un premier temps, le panneau solaire subit un traitement mécanique consistant à retirer certains de ses composants. Ensuite vient le traitement chimique avec le DBE, dont le but est de séparer le verre trempé et l’EVA. Enfin, quelques méthodes sont appliquées pour récupérer les cellules solaires et le verre.

À lire aussi Voici une nouvelle méthode pour recycler les panneaux solaires

Tout d’abord, la boîte de jonction, le cadre en aluminium et le backsheet sont retirés du module. Si le métal récupéré se recycle à l’infini, les plastiques (le boîtier et le backsheet) peuvent être transformés en combustibles solides de récupération (CSR) utilisés dans certaines usines. À l’issue de cette première étape, il ne restera donc plus qu’un laminé composé de verre et de cellules solaires encapsulées dans de l’EVA. Cet élément passe ensuite par une phase de découpage. Il s’agit d’une opération de fragmentation du laminé afin de le préparer au traitement chimique.

Le traitement par le DBE

Durant cette étape, le DBE ou ester dibasique pénètre entre le verre et l’EVA. Sous l’action de la chaleur, il trouve son chemin en traversant les fissures présentes sur le verre. Le DBE fait ensuite gonfler l’EVA, d’où le nom de la technique (par gonflement). Cela aura pour effet de rompre les liens avec le verre. Un champ ultrasonique créé via générateur d’ultrasons favorisera davantage la séparation des deux éléments.

Après le traitement chimique, les laminés traversent trois étapes pour récupérer le verre et les cellules solaires :

• La filtration : les laminés sont filtrés afin d’obtenir un mélange de verre et d’EVA encore accroché aux cellules. Les deux composants sont désormais indépendants suite à leur traitement chimique.

• Le tamisage : le mélange est ensuite tamisé afin de récupérer le verre. Pour information, ce matériau est recyclable à l’infini et peut servir dans diverses utilisations, comme dans la production d’isolant.

• La pyrolyse : l’EVA encapsulant les cellules solaires est enfin éliminé. Cette dernière opération est une technique de décomposition à très haute température (autour de 500 °C).

On obtient finalement des cellules solaires, soit du silicium réutilisable dans la fabrication de panneaux photovoltaïques. Le matériau se recyclerait jusqu’à quatre fois.

À lire aussi Pourquoi les panneaux solaires recyclés coûtent si peu cher ?

Les avantages du recyclage par gonflement chimique

Selon les auteurs du projet, l’utilisation du DBE permettrait une meilleure séparation des différentes couches par rapport aux autres méthodes de recyclage. Ils prônent également l’aspect écologique de ce solvant du fait qu’il soit biodégradable et qu’il ait un très faible impact environnemental. De plus, cet actif serait plus contrôlable, permettant de limiter la fissuration des cellules, et ainsi d’optimiser le taux de recyclage du panneau solaire. Un autre intérêt mis en avant par les chercheurs est le fait que leur technique soit moins énergivore comparée aux autres modes de recyclage.