Cet été 2022 aura été marqué par une sécheresse importante dans nos pays européens. Mais en Afrique ou en Asie, où les barrages hydrauliques représentent une part importante de la production d’électricité, les conséquences de la sécheresse sont aussi énergétiques.

En 2015 déjà, la capitale économique de la Guinée équatoriale avait connu une panne de courant de près de six mois. L’année suivante seulement, Bata a encore été plongée dans le noir durant trois mois. La raison : l’unique centrale hydroélectrique du pays ne pouvait plus fonctionner par manque d’eau.

Beaucoup de pays africains ont investi massivement dans la construction de barrages depuis les années 70 avec un regain de ces projets au milieu des années 2000. Ceux-ci ont en effet l’avantage de permettre à la fois l’irrigation des cultures, l’approvisionnement en eau potable et la production électrique. Mais ces pannes massives montrent bien que l’énergie hydroélectrique ne peut pas à elle seule alimenter en électricité des pays où l’eau se fait parfois si rare.

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Le phénomène n’épargne pas la Chine

Mais cet été, c’est dans le sud-ouest de la Chine que les températures records ont perturbé la production électrique. Dans la province de Sichuan, les autorités ont dû procéder à des coupures intermittentes de plusieurs heures, forçant 19 villes à interrompre leur production industrielle pendant plusieurs jours

En même temps qu’elle diminue l’offre d’électricité, la chaleur en augmente la demande. En effet, les températures dépassant les 40°, les systèmes de climatisation ont réclamé encore plus d’énergie, accélérant la pénurie.

En réaction, la Chine a déclenché une alerte nationale à la sécheresse, la production électrique de la région du Sichuan dépendant à 80% des barrages. Résultat, l’éclairage dans le métro a été réduit et les panneaux publicitaires ont été éteints. Malheureusement, les habitants aussi ont connu des coupures intermittentes de leur électricité.

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Près de la moitié des Africains manque d’électricité

Alors que le continent est déjà le moins électrifié du monde, que la crise du Covid et la guerre en Ukraine ont affaibli les approvisionnements en énergie, les sécheresses récurrentes aggravent encore les choses en Afrique.

En effet, selon le dernier rapport du Giec, le dérèglement climatique provoque une baisse inquiétante des ressources en eau. D’après l’Agence internationale de l’énergie (IEA), environ 600 millions de personnes, soit plus de 40% de la population, manquent d’électricité en Afrique.

Avec la pénurie et l’augmentation de la demande, émergent nécessairement de nouvelles filières illégales. Du fait des sécheresses et de la vétusté des infrastructures d’eau, le trafic illégal d’eau potable augmente et devient plus rentable que l’agriculture pour certains.

Au Zimbabwe par exemple, alors qu’une loi de 2013 interdit la vente d’eaux souterraines ou de surface en vrac à moins d’être enregistré auprès de l’Autorité nationale de l’eau, certains agriculteurs ont compris qu’il était plus rentable pour eux de vendre l’eau de leur puits plutôt que de l’utiliser pour leur culture.

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Un trafic d’électricité volée

La difficulté à s’approvisionner en électricité ainsi que l’augmentation de son prix ont aussi fait émerger un trafic illégal de celle-ci. Outre les câbles électriques volés et revendus sur des chantiers, et qui mettent encore plus à mal le réseau électrique, de nombreux branchements sauvages sont opérés par des trafiquants sans scrupules qui vendent leurs services à des foyers déjà très pauvres.

Des câbles sont tirés et raccordés aux poteaux électriques pour alimenter des quartiers entiers. En Côte d’Ivoire, il est estimé que de 10% à 30% de l’électricité est ainsi reçue illégalement. Malheureusement, les populations sont les premières victimes de ces branchements illégaux puisque de nombreux cas de courts-circuits et d’incendies mortels sont à déplorer.

On ne finit plus de découvrir la multitude des conséquences du dérèglement climatique. Si l’Europe a un mix énergétique plus équilibré, il apparaît que l’Afrique et l’Asie ont décidé de dépendre massivement de l’hydroélectricité pour leur approvisionnement en énergie. Les sécheresses récurrentes mettent malheureusement en péril ce modèle.

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