Depuis quelques mois, le prix de l’uranium n’en finit plus de grimper, la faute à un regain d’intérêt mondial pour la filière et à des difficultés de production. Serait-ce le signe avant-coureur d’une nouvelle explosion des tarifs d’électricité ? Rien n’est moins sûr, on vous explique. 

En ce début d’année 2024, le cours de l’uranium a atteint son plus haut niveau depuis 17 ans avec 106 dollars par livre (453 g), alors qu’il était descendu jusque sous la barre des 20 dollars en 2016. Si on est encore loin des niveaux historiques de 1970 (173 dollars) et 2007 (160 dollars), cette hausse de prix traduirait un nouvel engouement autour du nucléaire. Les projets de construction de centrales nucléaires repartent à la hausse, toujours emmené par la Chine, ainsi qu’un nombre croissant d’autres pays, dont la France, le Royaume-Uni, l’Égypte ou l’Inde.

Mais ce n’est pas tout. Cette hausse s’explique également par des tensions au niveau de quelques pays producteurs. Alors que la Russie subit des sanctions internationales, le Niger a, lui, été touché par un coup d’État militaire. D’autres pays font face à des difficultés de production, comme le Kazakhstan qui va devoir baisser ses prévisions de production en 2024 du fait d’un manque de matières premières.

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Un impact infime sur le prix du MWh

Malgré cette hausse historique, le coût de production de l’électricité par nos centrales nucléaires ne devrait, lui, pas changer. D’abord, là où le coût du combustible représente les trois quarts du prix de l’électricité pour les centrales à charbon ou à gaz, le combustible nucléaire ne représente que 5 à 10 % du coût final de l’électricité produite par une centrale nucléaire.

D’autre part, la France, comme la plupart des autres pays utilisant l’énergie nucléaire, a conclu des contrats d’approvisionnement sur le long terme. Or, le marché de l’uranium se divise en deux catégories : la première partie, appelée marché « au comptant » ou Spot, est fluctuante, comme le montre les variations du cours de l’uranium sur les derniers mois. Ce marché est sensible à la spéculation et aux événements géopolitiques, mais ne concentre que 10 à 20 % des échanges. Les 80 à 90 % restants sont le fruit d’un long marché avec des contrats sur plusieurs années. Celui-ci s’avère beaucoup plus stable, car il est le reflet de l’équilibre entre l’offre et la demande, malgré une indexation sur le marché Spot dans certains cas.

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De plus, comme le rappelle Teva Meyer, maître de conférence en géopolitique et en géographie, la production d’uranium bénéficie globalement de conditions géopolitiques plus stables que l’énergie fossile, avec des gisements plus répartis, l’uranium étant présent dans 53 pays. Enfin, l’uranium est un minerai facilement stockable, ce qui permet aux pays qui l’utilisent de pouvoir anticiper d’éventuelles variations de production. À titre d’exemple, la France possède environ deux ans de stocks d’uranium, contre 60 jours seulement de pétrole.