Depuis 2022, les tarifs de l’électricité explosent en France. Pour autant, l’hexagone est-il toujours l’un des pays d’Europe ou le kilowattheure est le plus économique ? Nous avons comparé les prix moyens de l’électricité chez nos voisins, même les plus lointains. Et le résultat n’est pas très glorieux pour la France.

La guerre en Ukraine et les déboires du parc nucléaire français a fait exploser le prix de l’électricité dans de nombreux pays d’Europe. Si le tarif du kilowattheure appliqué aux ménages s’est littéralement envolé chez certains de nos voisins immédiats comme l’Allemagne, l’Italie et la Belgique, ou il dépasse le seuil des 0,40 €, la France a pu contenir la hausse. Malgré les brutales augmentations du tarif réglementé que nous connaissons depuis 2022, la France conserve un prix du kWh deux fois inférieur, autour de 0,20 €/kWh.

La carte des prix de l’électricité en Europe

Cette carte est interactive, survolez pour consulter le tarif du kWh dans chaque pays.

S’ils peuvent paraître très élevés, les tarifs visibles sur la carte ci-dessus, qui correspondent à la moyenne observée au premier semestre 2023, n’atteignent pas des records. En effet, suite à la baisse générale de la consommation d’électricité en Europe sur 2023, liée notamment à une météo relativement douce, des prix plus élevés et de nombreux appels publics à la sobriété, la demande a été durablement réduite. Associée aux politiques d’aide, la casse de la demande a mécaniquement entraîné une baisse des prix sur le marché de gros.

Classement des pays d’Europe selon le prix moyen de l’électricité

Quelle politique pour réguler le prix de l’électricité chez nos voisins ?

Chaque pays a réglementé son marché, en prenant des mesures fiscales ou de protection, ce qui engendre un prix du kWh très variable d’un pays à l’autre.

➡️ L’Allemagne a adopté des mesures importantes pour limiter l’impact du prix du kWh, déjà très élevé avant la crise, sans empêcher l’explosion des tarifs en 2022. Le gouvernement a acté un nouveau plan d’action début 2023, comprenant bouclier tarifaire, une taxe sur les « superprofits », avec un plafonnement du prix à 0,40 €/kWh jusqu’en avril 2024. Début 2024, le prix est environ de 0,381 €/kWh, soit + 17 % par rapport à juin 2021.

➡️La Belgique a incité les particuliers et professionnels à réduire leur consommation sur la base du volontariat. Plusieurs aides ont été mises en place, avec une réduction d’impôt et une baisse de la TVA à 6 % pour l’électricité. Le prix est de 0,352 €/kWh au 1ᵉʳ janvier 2024, soit +21 % par rapport à juin 2021.

➡️En Italie, les pouvoirs publics ont programmé un plan général d’économie concernant l’électricité et opté également pour une taxe sur les « superprofits ». Ils ont accompagné les ménages et leur pouvoir d’achat, en limitant le prix sur les carburants et sur les produits alimentaires. Le prix actuel est de 0,3145 €/kWh au 1ᵉʳ janvier 2024, soit +28 % par rapport à juin 2021.

➡️En Espagne, face à une inflation de 10 %, le gouvernement a demandé une dérogation exceptionnelle à l’Europe afin de plafonner le prix du gaz servant à la production d’électricité. Cette mesure est spécifique à la péninsule ibérique et inclus donc le Portugal. Elle a permis une stabilité des prix dès 2022, et a pris fin en décembre 2023. Une hausse des taxes sera appliquée dès janvier 2024. La baisse de consommation en Espagne est moins importante que sur la zone Europe, notamment en raison de la surconsommation estivale liée à la climatisation. Malgré tout, l’Espagne a connu une baisse spectaculaire du prix de l’électricité. En janvier 2024, le tarif est de 0,1745 €/kWh, soit –30 % par rapport à juin 2021.

À lire aussi Explosion des prix de l’électricité : comment l’État sape la décarbonation de la France

Comment le prix de l’électricité est régulé en France ?

La France a opté, dès 2022, pour un bouclier tarifaire compensant la hausse des tarifs, en limitant celle-ci à 4 % sur l’année. Le gouvernement a pris en charge 37 % de la hausse qu’auraient subi les ménages, en abaissant principalement l’accise (une taxe, anciennement appelée CSPE puis TICFE) de 0,0324 €/kWh à 0,001 €/kWh.

Pour assurer la sortie progressive du bouclier tarifaire, qui court jusqu’en février 2025, les français ont enregistré deux hausses en 2023. Le gouvernement a confirmé au 1ᵉʳ février 2024 une hausse proche de 10 %, prévue dans le cadre de la loi des finances, en réintroduisant l’accise à un premier palier fixé à  0,02254 €/kWh, ce qui porte le prix du kWh à 0,253 €, soit une hausse d’environ 130 €/an, sur la facture des ménages, pour une consommation annuelle de 5 500 kWh (moyenne France).

Cette taxe est essentielle pour l’Etat, afin de financer le développement des énergies renouvelables et du nouveau programme nucléaire à venir. Il est fort probable que le gouvernement actionne une hausse supplémentaire au 1ᵉʳ janvier 2025, pour ramener l’accise à sa valeur de 2021, ce qui porterait le prix du kWh aux alentours de 0,29 €. Ainsi, la France risque de se rapprocher du top 10 des pays dont le prix de l’électricité est le plus élevé en Europe.