Annoncé récemment, le lauréat du futur parc éolien offshore flottant de Bretagne sud n’était en réalité que le second choix de la CRE. Si le nom du véritable gagnant de l’appel d’offre n’a pas été dévoilé officiellement, des rumeurs circulent sur son identité et sur les raisons de son désistement. 

Après des mois d’attente, la Commission de Régulation de l’Énergie (CRE) dévoilait, le 15 mai dernier, le lauréat de l’appel d’offre Bretagne sud, pour la réalisation d’un parc éolien offshore flottant de 250 MW. On apprenait alors que le projet, situé à 19 km au large de Belle-Île et 30 km de Quiberon, serait porté par Pennavel, un consortium composé de BayWa. r.e. et Elicio. Ce dernier exploite déjà des parcs éoliens en Europe, comme celui de Norther, au large de la Belgique.

Dans son rapport de synthèse publié quelques jours plus tard, la CRE dévoile quelques détails concernant l’offre ayant remporté le marché. Le consortium compte installer une douzaine d’éoliennes d’une puissance supérieure à 20 MW, pour un tarif très agressif de 86,45 €/MWh. Ce tarif considéré comme sous-évalué par la CRE, est 15 % inférieur à la moyenne des autres offres. Outre ces détails techniques, les observateurs auront remarqué un détail d’une grande importance : Pennavel n’est, en réalité, que le second choix de la CRE, le premier choix s’étant désisté au dernier moment.

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Les géants de l’éolien offshore se désistent les uns après les autres

C’est ce désistement de dernière minute qui explique les mois de retard de l’annonce au public du lauréat du marché. La CRE avait, en effet, annoncé avoir transmis son rapport au gouvernement dès la fin février. Depuis, le lauréat aurait hésité à accepter le marché avant de se rétracter. Si aucun nom n’a été officiellement annoncé, les rumeurs convergent toutes vers le nom d’Equinor, le géant norvégien de l’éolien offshore, également en charge du projet de stockage du carbone « Northern Lights ».

Le lauréat du marché n’est pas le seul dans cette situation. Sur les 10 candidats présélectionnés en 2021, 4 grands noms de l’éolien offshore n’ont même pas fait d’offres. On peut citer Total Énergies, pourtant partie prenant du plus grand parc éolien offshore d’Écosse, ou encore ENI qui, avec Equinor, a joué un rôle clé dans la construction du plus grand parc éolien flottant offshore du monde : le parc norvégien Hywind Tampon. Enfin, Vattenfal (12 parcs offshore en exploitation) et Iberdrola (parc offshore de Saint-Brieuc) n’ont pas fait d’offre non plus.

Un problème de taille

Derrière ces désistements, tout du moins celui d’Equinor, se cacherait un problème de taille de turbine. Au moment de la création de l’appel d’offre, la France souhaitait pouvoir octroyer une aide de l’ordre de 2 milliards d’euros au lauréat pour permettre le développement du projet. Pour que cette aide soit acceptée au niveau européen, l’appel d’offre devait comporter quelques impératifs techniques, notamment sur la puissance minimale des turbines choisies. Le scénario alors retenu évoquait une quinzaine de turbines de 16,67 MW. À l’époque, le scénario paraissait tout à fait réaliste compte tenu de l’évolution du marché éolien qui tendait vers des turbines de plus en plus puissantes.

Seulement, entre-temps, les constructeurs éoliens ont été confrontés à d’importantes difficultés. En conséquence, les principaux fabricants occidentaux ont décidé d’arrêter la course à la puissance. General Electric a choisi de baisser la puissance de ses turbines de 18 MW à 15,5 MW. De leur côté, Vestas et Siemens Gamesa ne comptent plus dépasser les 15 MW.

La France n’est pas la seule concernée par les problèmes de puissance de turbines

En modifiant la taille de ses turbines, General Electric a entraîné le blocage de 3 parcs éoliens offshore au large de New York, à savoir Attentive Energy One (1 404 MW), Community Offshore Wind (1 314 MW) et Excelsior Wind (1 314 MW). Ces trois parcs devaient initialement être équipés de turbines Haliade-X 18 MW. Mais, selon l’État de New York, l’abaissement de puissance des turbines modifie sensiblement les plans.

De ce fait, le choix des turbines compatibles avec le projet Bretagne sud se limiterait aux fabricants chinois qui, eux, continuent de développer et produire des turbines de plus en plus puissantes. D’ailleurs, si le consortium Pennavel n’a dévoilé aucune précision sur ses potentiels fournisseurs, les futures turbines situées au large de Belle-Île pourraient bien être Made in China.