Afin de faciliter la production de biométhane, l’Etat français relève de 40 % à 60 % le niveau de prise en charge des coûts de raccordement aux réseaux de gaz. D’ici 2030, les gaz renouvelables pourraient représenter 20% de la consommation de gaz de l’Hexagone, ce qui correspond à la quantité actuellement importée de Russie. L’Europe revoit également à la hausse ses objectifs de production de gaz vert.

La guerre en Ukraine et la crise de l’énergie qu’elle a engendrée en Europe révèle l’urgence pour la France, comme pour tous les pays européens, de maîtriser sa dépendance aux énergies fossiles. D’abord pour réduire les émissions de gaz à effet de serre mais aussi pour garantir les approvisionnements énergétiques.
« Filière d’énergie française, les gaz renouvelables constituent une solution évidente pour réduire notre dépendance énergétique », soulignent dans un communiqué commun le Syndicat des énergies renouvelables (SER), les gestionnaires de réseau (GDRF, GRTgaz et Teréga) ainsi que le SPEGNN (le syndicat professionnel du secteur).

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Substituer le biométhane au gaz fossile

« Le biométhane, gaz renouvelable, est une des substitutions au gaz naturel que nous devons encourager » estime pour sa part Barbara Pompili, ministre de la Transition écologique. C’est la raison pour laquelle elle a signé récemment un arrêté qui instaure un allègement des frais de raccordement des installations de biométhanisation aux réseaux de gaz. Concrètement, l’Etat prendra en charge 60% de ces coûts au lieu de 40% précédemment.
« En prenant cette mesure, nous facilitons le développement des projets dans un contexte où leur localisation doit parfois répondre à des règles environnementales et induire des coûts de raccordements plus élevés. C’est un signal fort que nous envoyons à la filière. Les acteurs doivent désormais se saisir de cette opportunité » ajoute la ministre.

L’année passée, 150 installations de biométhanisation ont été mises en service en France. Un record pour une technologie véritablement lancée en 2011 dans le pays. Au 31 décembre 2021, 365 sites injectaient du biogaz dans les réseaux. Souvent portés par des agriculteurs, leurs productions annuelles cumulées s’élèvent à 6,4 térawattheures (TWh) par an, soit une progression de 56% par rapport à l’année précédente. Toutefois cette capacité ne couvre encore que 1% du gaz consommé dans l’Hexagone.

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Accélérer le développement des projets

Dans le même temps, les professionnels du secteur se désolent du rythme de développement ralenti, depuis que la feuille de route énergétique de la France a réduit les objectifs pour 2023. En 2021, 70 projets ont fait l’objet d’une étude détaillée de raccordement ; c’est loin des 350 réalisées en 2019. Plus de 1000 projets en cours de développement pourraient rapidement se concrétiser, précise la filière, mais « le cadre économique et réglementaire freine la dynamique indispensable à l’indépendance énergétique et à l’atteinte des objectifs de neutralité carbone ».
Aujourd’hui, la feuille de route française prévoit 10% de gaz vert en 2030 (soit 39 à 42 TWh). « Mais si le gouvernement pouvait accélérer l’instruction des dossiers en file d’attente et garantir un dispositif de soutien stable, les gaz renouvelables pourraient représenter 20% de notre consommation en 2030 », explique Jean-Louis Bal, le président du SER. Or cette production correspond exactement à ce que l’Etat importe aujourd’hui de Russie, soit environ 70 TWh.

Les professionnels espèrent maintenant la signature rapide d’un décret d’application de la loi climat de 2021, lequel devrait imposer l’incorporation d’un pourcentage minimum de gaz renouvelable dans les fournitures. La fixation, dès cette année d’un premier niveau d’obligation permettrait d’accroître nettement la production dès 2025, estime le secteur.

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L’Europe aussi pousse sur l’accélérateur

Du côté de l’Union européenne, la guerre en Ukraine et son impact sur les approvisionnements en énergie ont également incité les décideurs à revoir à la hausse les objectifs de production de gaz renouvelable. D’ici 2030, l’Europe souhaite maintenant porter à 35 milliards de m3, la production annuelle de biogaz à partir de déchets de l’industrie agroalimentaire. C’est un doublement de l’objectif antérieur, mais cela revient surtout à multiplier par dix les volumes actuels. Pour y parvenir, la Commission déploie un train de mesures, parmi lesquelles l’assouplissement des règles de subvention des agricultures nationales par les États.

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