L’Allemagne a fait le choix de supprimer le nucléaire de son mix énergétique, malgré ses objectifs climatiques qui l’obligent à décarboner sa production électrique. Mais est-ce le bon choix ? Notre voisin d’outre-Rhin ne devrait-il pas revenir en arrière pour miser à nouveau sur l’atome ? La sortie du nucléaire n’est-elle pas un frein à la réussite de sa transition énergétique ?

Selon les données de l’agence internationale de l’énergie (AIE), le mix électrique allemand était dominé par le charbon et le nucléaire au début des années 2000. Mais pour son avenir, l’Allemagne a fait le choix de sortir du nucléaire, dans le cadre de son plan de transition énergétique appelé « Energiewende ». Pourquoi une telle décision ? D’abord et surtout parce que les Allemands sont pour la plupart farouchement anti-nucléaires. Après la catastrophe de Tchernobyl, celle de Fukushima en 2011 au Japon a été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase, poussant la chancelière de l’époque, Angela Merkel a prendre une décision stricte.

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L’Allemagne a fait le choix de la sortie du nucléaire

En effet, nos voisins ont alors fait le choix de sortir du nucléaire pour des raisons de sécurité. En avril 2023, c’était chose faite avec l’arrêt des trois dernières centrales nucléaires qui fonctionnaient encore jusque-là. Pour le futur de son mix électrique, le pays mise sur le développement massif des énergies renouvelables et sur le gaz naturel. D’ailleurs, pour l’année 2023, les énergies renouvelables ont représenté plus de 50 % de la consommation électrique allemande. L’objectif est de porter ce niveau à 80 % d’ici 2030.

Néanmoins, les émissions de CO2 sont toujours très élevées dans le pays, notamment du fait de la part importante du charbon dans le bouquet énergétique allemand. Même si en 2023, les émissions allemandes de gaz à effet de serre (GES) ont atteint un niveau historiquement bas avec 673 millions de tonnes, le pays reste le plus gros émetteur de l’Union européenne (UE).

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Énergies renouvelables et gaz naturel en hausse dans un contexte géopolitique tendu

En effet, rappelons que les énergies renouvelables n’étant pas une source de production pilotable, elles doivent être accompagnées de moyens de flexibilité qui permettent d’ajuster en temps réel l’offre à la demande en électricité. Ces moyens de production pilotables sont le charbon, le gaz ou encore le nucléaire. Les Allemands ayant fait le choix de se passer de nucléaire, la part du charbon et du gaz naturel reste donc nécessairement importante dans leur mix électrique.

Or, avec la crise en Ukraine, les approvisionnements en gaz naturel en provenance de Russie se sont arrêtés. Et le gazoduc Nord Stream 2 qui devait alimenter l’Allemagne via la mer Baltique n’a pas été mis en service du fait des sanctions par l’Union européenne à l’encontre de la Russie, et de son sabotage le 26 septembre 2022.

Le pays possède toutefois sur son territoire encore du charbon, mais surtout une abondante réserve de lignite qui est un charbon à faible pouvoir calorifique. Sources d’indépendance énergétique pour le pays, charbon et lignite sont toutefois particulièrement néfastes pour l’environnement.

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Le retour vers l’atome est-il envisageable en Allemagne ?

Le charbon et le gaz naturel étant des énergies fossiles, on peut se demander si nos voisins d’outre-Rhin ont bien fait de se passer du nucléaire, source de production pilotable décarbonée. Et ne serait-il pas judicieux de revenir sur la décision de sortie de l’atome et de relancer les centrales pour atteindre les objectifs climatiques du pays ?

Sur le plan environnemental, il est clair que privilégier l’atome permettrait de se désengager du charbon et du gaz naturel, ce qui serait bénéfique pour les émissions du pays. Cela permettrait également au pays de réussir plus facilement sa transition énergétique.

Mais pour cela, il faudrait que ce revirement dans la politique énergétique allemande soit accepté par la population. Or, ce n’est pas le cas pour l’instant. Et l’Allemagne s’oppose d’ailleurs régulièrement à la France sur la scène européenne, pour critiquer notre choix de laisser au nucléaire une place prépondérante dans notre mix électrique. Il semble donc que le retour de l’atome dans le mix électrique allemand relève d’un choix politique qui n’est pas à l’ordre du jour.