Face aux canicules et vagues de chaleur, la tentation de s’équiper rapidement d’un climatiseur est grande. Les climatiseurs mobiles constituent une solution nettement moins chère et bien plus facile à installer qu’un climatiseur fixe. Mais sont-ils si gourmands en électricité ? Nous avons acheté un des climatiseurs mobiles les moins chers du marché pour mesurer sa consommation réelle un jour de forte chaleur.

Certaines journées d’été, l’air est si brûlant que les ventilateurs les plus puissants ne suffisent plus. Nous suffoquons. Particulièrement en ville, avec le phénomène d’îlot de chaleur, dans les appartements peu ou pas isolés. Ainsi, dans l’urgence, de nombreuses personnes s’équipent d’un climatiseur mobile. C’est un moyen de se rafraîchir rapidement, peu coûteux à l’achat et qui ne nécessite aucuns travaux.

Nous en avons acheté un exemplaire adapté au refroidissement de notre bureau de 13 m² (31 m³), situé à Marseille, dans une copropriété non isolée construite en 1960. Il s’agit d’un climatiseur mobile réversible d’une puissance de 2 000 watts thermiques (Wth) en froid et 1 700 Wth en chaud (7 000 Btu) présenté comme efficace sur des surfaces jusqu’à 21 m². Son débit est de 380 m³/h, pour une puissance électrique de 780 W en froid et 720 W en chaud.

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Quand fermer les volets et aérer ne suffit plus

L’appareil de 20 kg, monté sur des roulettes, est plutôt compact : 73 cm de haut pour 37 cm de profondeur et 32 cm de large. Nous l’avons choisi en raison de son tarif particulièrement bas : 170 € avec livraison gratuite, mais surtout parce qu’il est impossible d’installer un climatiseur fixe dans la copropriété : aucun endroit ne permet la pose du compresseur à l’extérieur.

Dommage, car nous aurions souhaité en profiter pour troquer nos radiateurs « grille-pains » par une pompe à chaleur air/air fixe, capable de produire du froid lors des fortes chaleurs et du chaud en hiver dans tout l’appartement. Pour survivre aux étés de plus en plus chauds, qui portent la température de certaines pièces jusqu’à 35 °C le jour et 30 °C en pleine nuit malgré les conseils habituels (volets abaissés, aération traversante, humidification…), nous nous sommes donc rabattus sur un climatiseur mobile monobloc.

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Refroidir une pièce avec la fenêtre ouverte ?

Il faut le reconnaître, ce genre d’appareil n’est pas idéal sur le plan énergétique. Car il est majoritairement utilisé dans des locaux mal isolés et impose, sauf travaux, de laisser une fenêtre ouverte afin d’y placer le conduit d’évacuation de chaleur. Pour limiter un minimum la perte de froid, il existe des « joints de fenêtres », une sorte de tissu amovible à fermeture éclair reliant l’ouvrant au dormant via une bande velcro.

Acheté une dizaine d’euros, le nôtre affiche une épaisseur de seulement 0,06 mm. Nous avons donc un certain doute sur l’efficacité de cette isolation thermique de fortune. Ce « joint » empêche tout juste les bourrasques de sirocco, ce vent brûlant venu du Sahara à l’effet « sèche-cheveux », de pénétrer dans le bureau.

Le jour de notre test, il soufflait sur la ville. La température extérieure a atteint un record de 37 °C. À l’intérieur, la sensation de forte chaleur a réellement débuté à 13h40, lorsque le mercure est parvenu à 29,9 °C. Le puissant ventilateur (85 W) que nous utilisons habituellement ne permettait plus d’assurer un confort satisfaisant. Nous démarrons alors le climatiseur mobile, que nous réglons à une température de consigne de 25 °C.

Le « joint de fenêtre » bon marché que nous avons utilisé est trop fin pour assurer une réelle étanchéité thermique / Images : Révolution Énergétique.

Un thermomètre placé au centre de la pièce nous permet d’observer la lente baisse de la température. Malgré un flux d’air froid immédiat et abondant, l’ambiance reste chaude. Si bien qu’après 2 heures de fonctionnement à plein régime, l’air est toujours à 27,8 °C. Il faudra 8 heures de fonctionnement pour atteindre 25,9 °C en ce jour particulièrement suffocant. Par curiosité, nous avons également placé la sonde d’un thermomètre dans le tube d’évacuation de l’air chaud à l’extérieur. Et l’on a rapidement compris pourquoi les climatiseurs, qu’ils soient fixes ou mobiles, contribuent tant au phénomène d’îlot de chaleur urbain. Nous avons relevé une température moyenne de 41,9 °C pour une maximale de 45,6 °C dans cette conduite. Une fournaise rejetée dans une ambiance déjà irrespirable.

Consommation d’un climatiseur mobile : notre mesure

Sur la courbe de puissance du climatiseur, nous observons un pic à 789 W une dizaine de minutes après le démarrage. La puissance diminue très discrètement tout au long de l’après-midi et de la soirée, pour terminer à 724 W. En moyenne, elle s’établit à 744 W sur les 8 heures d’utilisation. La consommation totale d’électricité s’élève donc à 5,93 kWh.

Ce chiffre est à comparer avec les 0,68 kWh que notre ventilateur à pleine puissance (85 W) aurait consommé sur la même période, hélas sans grand effet sur notre confort. L’utilisation du climatiseur mobile a fait bondir de 50 % notre consommation habituelle d’électricité un jour d’été (environ 10 kWh), pour refroidir seulement une des 3 pièces de notre appartement. Au tarif réglementé de l’électricité, cela représente une dépense de 1,24 €.

 

Obliger les propriétaires à installer des climatiseurs fixes ?

Pour estimer la consommation annuelle d’un tel climatiseur mobile (adapté au refroidissement d’une seule pièce de moins de 20 m² pour rappel), il suffit de multiplier notre résultat par le nombre de jours de canicule en France (33 jours en 2022), soit 177,9 kWh pour 40,92 €. Si cela reste nettement moins cher qu’une facture de chauffage pour l’hiver, il est très probable qu’une meilleure isolation de notre appartement aurait pu éviter l’utilisation du climatiseur. Du moins, réduire sa durée d’utilisation. Une plus grande souplesse de la copropriété sur les règles esthétiques permettrait également d’installer une pompe à chaleur air/air fixe, dont l’efficacité est nettement meilleure qu’un appareil mobile.

Enfin, les locataires devraient pouvoir légalement exiger des propriétaires l’installation d’une pompe à chaleur réversible fixe, qui devient indispensable face aux étés de plus en chauds. Bien meilleur, mais plus coûteux, les bâtiments devraient être raccordés à des réseaux de chaleur et de froid basés sur la géothermie de surface ou la thalassothermie. Cela éviterait le déploiement massif de climatiseurs mobiles souvent utilisés avec les fenêtres ouvertes ou des « joints de fenêtre » bon marché mais peu efficaces.

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