L’entreprise Northvolt prévoyait de construire une gigafactory en Allemagne pour fabriquer des batteries lithium-ion destinées aux véhicules électriques. Mais la flambée des prix de l’énergie en Europe pourrait inciter le géant suédois à s’installer plutôt aux États-Unis, qui ont récemment pris des mesures pour inciter le développement du secteur sur son sol.

En mars 2022, Northvolt avait annoncé que sa troisième usine géante de batteries serait implantée en Allemagne, après ses deux sites de Suède et Pologne. L’usine devait être construite dans la région de Heide (nord de l’Allemagne) et permettre une production annuelle de 60 GWh de batteries lithium-ion pouvant équiper un million de véhicules électriques. Une aubaine pour l’Allemagne puisqu’à la clef, ce sont 3 000 emplois et la perspective de produire des batteries les plus « propres » d’Europe occidentale dès 2025.

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Crise de l’énergie en Europe et subventions américaines

Depuis cette annonce, la situation a changé en Europe. Les prix de l’énergie se sont envolés, ce qui a un impact majeur sur les coûts de la future usine et menace sa rentabilité. En effet, le site devait consommer à lui seul jusqu’à 2 TWh d’électricité chaque année, soit environ 17 % de la production annuelle d’un réacteur nucléaire de type EPR.

Par ailleurs, les États-Unis entendent attirer sur son sol les investisseurs du secteur de l’énergie verte, avec l’adoption pendant l’été de l’Inflation Reduction Act. Ce texte inédit prévoit des investissements colossaux pour lutter contre la crise climatique et soutenir le secteur des énergies vertes. Par exemple, des crédits d’impôt sont prévus pour les Américains qui s’équipent d’un véhicule électrique fabriqué dans une usine américaine. De quoi motiver les investisseurs étrangers à installer des usines aux États-Unis.

Dans ce contexte, les grands groupes européens pourraient revoir leurs ambitions sur le sol européen pour privilégier un investissement aux États-Unis. D’ailleurs, le PDG de Northvolt, Peter Carlsson a indiqué à un média allemand que le projet de gigafactory en Allemagne pourrait être repoussé, en raison de la crise énergétique, mais aussi du fait des subventions plus favorables aux États-Unis.

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Le continent européen pénalisé par sa dépendance au gaz

Fragilisé par sa dépendance au gaz fossile, à l’origine de la flambée des prix de l’énergie, le continent européen pourrait perdre plus ou moins temporairement ses grandes industries. Le numéro un mondial de l’acier ArcelorMittal vient par exemple de suspendre l’activité d’un de ses deux hauts-fourneaux de Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône). D’autres industriels ont également interrompu ou fortement ralenti leur activité, comme les verriers Arc France et Duralex.

Les investisseurs devraient donc privilégier le territoire américain, plus rassurant et rentable. Pourtant, l’Europe a besoin de développer la filière de fabrication des batteries pour équiper ses véhicules électriques, afin de garantir son indépendance dans ce domaine, accélérer la croissance du secteur et réduire le bilan carbone de cette production. Les pouvoirs publics devraient se concerter au niveau européen pour prendre des décisions permettant d’éviter la fuite des investisseurs en dehors des frontières de l’Union européenne.

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