La conversion des centrales au charbon françaises relève parfois du chemin de croix. Au nord de Marseille, l’une d’elle semble avoir enfin trouvé sa voie après des décennies d’errance. La centrale de Provence accueillera un vaste site de production d’hydrogène et de carburants synthétiques d’origine renouvelable.

C’est un monument du charbon qui vagabondait depuis des décennies dans l’attente de sa conversion. À Meyreuil (Bouches-du-Rhône), la centrale de Provence sera finalement démantelée afin de produire de l’hydrogène et des carburants « verts ». Le projet, baptisé « Hynovera », est porté par le propriétaire tchèque du site, Gazel Energy, et le producteur allemand d’hydrogène Hy2gen.

Des carburants pour les avions et les ferrys

Seule la tranche n°4 récemment convertie à la biomasse (plaquettes et déchets de bois) sera conservée. Les autres installations réparties sur quelque 80 hectares, dont l’impressionnante cheminée haute de 297 m, seront détruites au profit d’un complexe industriel tourné vers les énergies du futur. Ce dernier accueillera un ou plusieurs électrolyseurs d’une puissance totale de 100 MW ainsi qu’une unité de pyrogazéification. L’objectif est de produire de l’hydrogène et des carburants de synthèse à partir d’électricité d’origine renouvelable et de biomasse.

55 tonnes d’hydrogène, 50 000 litres d’e-kérosène (SAF), 60 000 litres d’e-diesel et 100 000 litres d’e-méthanol sortiront chaque jour de l’usine. Des énergies majoritairement destinées aux transports lourds. La production d’e-kérosène pourrait ainsi satisfaire 10 % de la consommation de l’aéroport Marseille-Provence, situé à proximité. Réservé au secteur maritime, l’e-méthanol sera notamment exploité par Corsica Ferry pour ses rotations entre la Corse et le continent.

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Un projet à 460 millions d’euros

Le complexe prévoit d’engloutir annuellement 835 GWh d’électricité et plus de 182 000 tonnes de biomasse. Si la matière organique sera issue de forêts locales selon les auteurs du projet, l’électricité renouvelable proviendra du réseau via un contrat d’achat à long terme. Car, malgré la grande superficie du site, Gazel Energy n’a pas souhaité installer de centrale solaire. L’exploitant justifie son choix par l’existence d’une « très grosse pression foncière ». « Nous préférons implanter […] les productions les plus intenses en emploi » explique-t-il à l’Usine Nouvelle.

Le projet doit justement en créer 50, mais ne permettra pas de maintenir l’intégralité des 160 salariés actuellement en poste dans la centrale. Sa réalisation nécessite un investissement de 460 millions d’euros, financé par des fonds privés, de la dette bancaire mais aussi des subventions et prêts institutionnels. Hynovera est déjà soutenu par le gouvernement, qui finance une partie des études techniques et l’a retenu pour le futur IPCEI de l’hydrogène. En cours d’élaboration, ce programme européen attribuera des généreuses dotations à une sélection de projets d’envergure. La centrale de Provence version hydrogène et e-carburants pourrait ainsi entrer en service en 2026 selon Hy2gen.

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