Après les exploits de Bertrand Picard et du Solar Impulse, un autre Suisse, Raphaël Domjan entend réussir une autre performance : voler dans la stratosphère avec un avion solaire, à 25.000 mètres du sol, une altitude jamais atteinte par un avion à propulsion classique. Ce jeudi 2 septembre, le pilote a effectué son premier vol solo aux commandes du SolarStratos.

On se souvient de Bertrand Picard et du Solar Impulse, le premier avion à avoir effectué un tour du monde sans carburant ni émission polluante pendant le vol. Lancé officiellement en 2014, le projet SolarStratos caresse une autre ambition : celle d’atteindre la stratosphère à 25.000 mètres d’altitude avec un avion propulsé uniquement par l’énergie solaire. Plus qu’un exploit technologique, il s’agit aussi de battre un nouveau record puisqu’aucun avion à moteur classique n’a jamais volé aussi haut.

Cette aventure a pour but de démontrer que les énergies renouvelables permettent d’aller au-delà de ce qui est possible avec les modes de propulsion utilisant les énergies fossiles. Raphaël Domjan croit fermement à l’énergie solaire. « C’est la plus abondante sur terre et la moins chère de l’histoire de l’humanité », explique-t-il. C’est pourquoi l’aviateur souhaite donner espoir aux jeunes : « je veux leur dire que grâce au Soleil, ils pourront continuer de prendre l’avion, mais sans polluer ». Les véhicules électriques et solaires comptent parmi les grands défis du 21ème siècle. « Notre avion électrique, qui pourra voler dans la stratosphère, ouvre une porte sur cette aviation et sur la mobilité de demain », précise-t-il sur le site consacré au projet SolarStratos. « Dans le futur, l’exploration de la stratosphère nous permettra peut-être de prolonger et d’étendre l’humanité… qui sait… », rêve-t-il tout haut.

Vol stratosphérique avec 100% d’énergie solaire

Le SolarStratos est un avion solaire biplace conçu par Calin Gologan de l’entreprise PC-Aero GmbH.  Il est propulsé par deux moteurs électriques de 19 kW qui entrainent une hélice à 3 pales d’un diamètre de 1.75 m. Pour le vol record, une nouvelle hélice sera installée, optimisée pour la montée dans la stratosphère.

Les ailes sont couvertes de 22 m2 de cellules solaires de dernière génération, dont le rendement de conversion est situé entre 22 et 24%. Elles alimentent des batteries lithium-ion d’une capacité totale de 14 kWh, extensible à 21 kWh. Mais pour le vol record, l’avion sortira du hangar avec les batteries déchargées. Le Soleil devra les charger avant le départ, puis, à l’atterrissage, elles devront avoir stocké au moins autant d’énergie qu’au décollage. Cette exigence permettra de dire que tout le vol a été effectué à 100% à l’énergie solaire.

Afin de limiter le poids de l’appareil ne sera pas pressurisé, ce qui obligera son pilote à porter pour le vol stratosphérique une combinaison similaire à celle des astronautes. Elle fonctionnera uniquement à l’énergie solaire, et ce sera une première mondiale également.

Malgré la météo capricieuse de cet été au-dessus du petit aérodrome de Payerne (Suisse) où le SolarStratos est basé, Raphaël Domjan a effectué, depuis le 29 juillet, 37 vols d’entraînement en compagnie, chaque fois, du pilote d’essai Miguel A. Iturmendi. Certains ont duré plus de 2 heures, et l’avion solaire est monté jusqu’à 10.000 pieds.
Ce jeudi 2 septembre au matin, les conditions étaient réunies pour franchir une nouvelle étape symbolique du projet. Raphaël Domjan s’est envolé en solo dans les airs à 07h15 et a effectué un vol d’une durée de 36 minutes, atteignant l’altitude de 4 000 pieds (1 220 m). De nouveaux vols en solo sont prévus dans les prochains jours.

À lire aussi Des carburants pour voler « vert »

Pour quand le record ?

Et le vol record, c’est pour quand ? Il va falloir encore être patient : « Le vol stratosphérique sera pour 2023. Mais avant ça, il y a un record intermédiaire à battre, celui du vol entièrement électrique et solaire détenu par SolarImpusle avec 9400 m », explique Raphaël Domjan. « Nous visons donc les 10.000 m dans un premier temps ».

La mission dans la stratosphère durera environ six heures (3 heures de montée pour s’approcher de l’espace, 15 minutes la tête dans les étoiles, puis 3 heures pour redescendre sur terre). L’avion et son pilote seront soumis a des températures extrêmes, de l’ordre de -70°C.

À lire aussi L’avion à hydrogène est une chimère ! À lire aussi Airbus, premier constructeur à dévoiler l’impact carbone de ses avions