Pour la première fois en France, l’ASN vient d’octroyer à EDF le droit de poursuivre l’exploitation du réacteur n° 1 de la centrale nucléaire du Tricastin (Drôme), au-delà de sa durée initiale de fonctionnement. Si cette nouvelle n’est pas tant une surprise, elle marque une étape importante dans l’histoire du parc nucléaire français.

Dans un communiqué paru le 10 août, l’ASN annonce valider la prolongation du réacteur n° 1 de la centrale nucléaire du Tricastin pour les dix prochaines années. En 2021 déjà, l’ASN avait déjà pris position sur la « phase générique » des réacteurs de 900 MWe, c’est-à-dire sur les éléments communs à ces réacteurs de même génération. Cette fois, l’ASN a rendu sa décision suite à l’étude spécifique du site ainsi qu’aux résultats des contrôles réalisés dans le cadre de la visite décennale de 2019. Le réacteur, âgé de 43 ans en 2023, pourra donc être exploité au moins jusqu’à ses 50 ans.

L’ASN a, par ailleurs, indiqué que les modifications d’ampleur prévues par EDF, et dont les travaux sont déjà en cours depuis 2019, devraient permettre d’améliorer grandement la sécurité du réacteur, atteignant un niveau proche de ceux de troisième génération. Pour rappel, le réacteur n°1 du Tricastin, d’une puissance de 900 MWe, a été mis en service en 1980. Ces dernières années, la centrale du Tricastin a régulièrement fait parler d’elle, notamment car sa puissance a dû plusieurs fois être réduite à cause de fortes chaleurs. À ce titre, l’ASN a apporté à EDF des prescriptions complémentaires considérant les situations de canicule ainsi que le niveau sismique de la zone.

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Le début d’une longue série ?

L’unité n°1 du Tricastin est le premier réacteur à être prolongé au-delà de sa durée maximale théorique de fonctionnement, et il devrait être suivi par une grande partie du parc nucléaire national. En effet, le gouvernement souhaite le prolongement à 60 ans de la durée de vie des 32 réacteurs de 900 MWe mis en service entre 1979 et 1987. Pour y parvenir, EDF a débuté en 2014 un vaste programme de travaux appelé « grand carénage » qui vise à mettre en conformité les réacteurs tout en augmentant leur niveau de sûreté. L’enveloppe associée à ce programme est estimée à 66 milliards d’euros.

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En service jusqu’à 50 ans… et plus si affinité ?

Grâce au verdict rendu par l’ASN, le réacteur n°1 du Tricastin peut d’ores et déjà continuer de fonctionner jusqu’à sa prochaine visite décennale prévue pour 2029. Néanmoins, compte tenu de l’objectif fixé par le gouvernement, EDF ne compte pas s’arrêter là et vise une prolongation du réacteur à 60 ans.

Il n’est pas impossible que l’électricien vise même plus loin. Outre-Atlantique, des études sont déjà menées pour envisager un prolongement des réacteurs de technologie similaire jusqu’à 80 ans. Rappelons tout de même que le fonctionnement des réacteurs français diffère des modèles américains. Du fait de la prédominance du nucléaire dans le mix électrique, le parc nucléaire français est soumis à un facteur de charge nettement inférieur engendré par les besoins de modulation, c’est-à-dire d’adaptation de la production d’électricité en fonction de la demande. Cette fluctuation de la production des réacteurs peut accentuer la fatigue des matériaux constitutifs des réacteurs.

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