AccueilProduire de l'énergie bas-carboneExaspérés par les coupures incessantes d'électricité, les malgaches renversent leur gouvernement

Exaspérés par les coupures incessantes d'électricité, les malgaches renversent leur gouvernement

Photo de l'auteur
Par Miotisoa RANDRIANARISOAPublié le 30 septembre 2025
L'entrée de la centrale hydroélectrique d'Andekaleka, dont les dysfonctionnements provoquent des coupures répétées / Image : Présidence de la république de Madagascar.

À Madagascar, une inédite rébellion nationale se lève. Dans les rues, la population dénonce les incessantes coupures d’eau et d’électricité qui paralysent le pays. Les événements ont déjà fait des victimes et entraîné la dissolution du gouvernement. Que se passe-t-il réellement ?

Depuis plusieurs années, le quotidien des Malgaches est rythmé par les coupures d’eau et d’électricité. Ces derniers mois cependant, les délestages se sont intensifiés. Si l’eau n’est parfois disponible qu’à la tombée de la nuit, les interruptions électriques durent plusieurs heures par jour, parfois jusqu’à douze heures. De jour en jour, les conditions de vie des habitants se dégradent.

Exaspérée par la situation, la population malgache se soulève. Répondant à l’appel du collectif « Gen Z Madagascar » sur les réseaux sociaux, des milliers de personnes, majoritairement jeunes, se sont donné rendez-vous dans la capitale le jeudi 25 septembre dernier pour manifester pacifiquement. En réponse, les gendarmes ont tenté de disperser les manifestants à coups de grenades lacrymogènes. L’affrontement a alors débuté entre, d’un côté, les forces de l’ordre et, de l’autre, les Malgaches revendiquant ce qu’ils considèrent comme leurs droits les plus fondamentaux.

Dans la soirée, alors que la foule s’était finalement dispersée, des scènes incontrôlables de pillages et de vandalisme ont éclaté, sans que les autorités soient intervenues. Commerces de détail, grandes surfaces, entreprises de services, et même banques ont été pris pour cibles et déplorent actuellement d’immenses pertes.

Un gouvernement dissout, une vingtaine de morts et une centaine de blessés

Dans une tentative d’apaiser la contestation, le président de la République Andry Rajoelina a, dans un premier temps, annoncé le limogeage du ministre de l’Énergie. Mais les manifestations se sont poursuivies et se sont même étendues à l’ensemble de l’île et au-delà du territoire. Ce lundi, le chef de l’État a repris la parole et a finalement annoncé la dissolution du gouvernement malgache dirigé par le Premier ministre Christian Ntsay. Une mesure qui, pour l’instant, ne semble pas avoir dissuadé le mouvement.

Jusqu’à présent, alors que les autorités n’ont publié aucun rapport officiel sur le nombre de morts et de blessés, les Nations Unies font état d’un lourd bilan : au moins 22 morts et plus d’une centaine de blessés depuis le début des manifestations. « Parmi les victimes figurent des manifestants et des passants tués par des membres des forces de sécurité, mais aussi d’autres tués lors des violences et des pillages généralisés qui ont suivi, perpétrés par des individus et des gangs sans lien avec les manifestants », déplore le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Volker Türk.

À lire aussiBientôt un réseau électrique géant à travers l’Afrique subsaharienne ?

Un dénouement encore lointain ?

En matière d’énergie, le diagnostic pour Madagascar est sévère. L’une des principales causes reste les arriérés colossaux de la JIRAMA, la compagnie nationale d’eau et d’électricité. Celle-ci accumule effectivement plus de 400 millions de dollars de dettes envers ses fournisseurs. Selon certains experts, il sera très difficile pour l’entreprise de se redresser dans un avenir proche. La lumière au bout du tunnel paraît d’autant plus lointaine que, malgré les projets électriques en cours, les perspectives restent incertaines.

De grands projets solaires ont bien été lancés, mais des doutes plantent quant à la capacité de la JIRAMA à s’engager dans des contrats d’achat d’électricité à long terme au vu de ses difficultés financières. Plusieurs barrages hydroélectriques, dont celui de Volobe, sont également prévus, mais leur mise en service n’interviendra pas avant deux ans dans le meilleur des délais.

À lire aussiIl y a moins de panneaux solaires dans toute l’Afrique qu’en France

L’intérêt limité des mini-réseaux électriques solaires

Quant aux mini-réseaux, comme ceux déployés par WeLight, ils peuvent certes augmenter le taux d’électrification dans le pays. Cependant, comme ces projets sont lancés par des entreprises privées sans appel d’offres, ils créent une dépendance au privé et un manque de contrôle sur les prix et la couverture territoriale.

Avant même les manifestations, la JIRAMA entendait apaiser la situation en annonçant des mesures temporaires telles que la réparation des machines en panne et le recours à la pluie artificielle dès que les conditions météorologiques le permettraient. Des annonces qui, manifestement, n’ont pas convaincu les Malgaches.

La suite de votre contenu après cette annonce

La suite de votre contenu après cette annonce


Voir plus d'articles