Le marché européen des batteries devrait connaître une forte croissance dans les années à venir. Selon certaines analyses, sa valeur pourrait presque doubler d’ici 2029. Cette tendance est largement due, non seulement, à l’essor des énergies renouvelables, mais surtout aussi au boom des véhicules électriques. En effet, l’Europe mise énormément sur la mobilité électrique pour décarboner son système énergétique. Toutefois, pour atteindre cet objectif, encore faut-il des batteries plus respectueuses de l’environnement. Une récente étude de l’ONG Transport & Environment (T&E) suggère que relocaliser la chaîne de valeur des batteries en Europe pourrait réduire jusqu’à 37 % les émissions de carbone associées à leur production.

En matière de production de batteries, l’Europe occupe la deuxième place dans le rang mondial, mais elle se situe bien loin derrière la Chine qui domine largement le secteur. Le continent ne représente que 7 % de la production mondiale de ces dispositifs de stockage, tandis que le pays du Dragon en détient 76 % grâce à son énorme industrie. Toutefois, l’Europe parvient actuellement à satisfaire la moitié des demandes internes en batteries grâce à des usines européennes et chinoises implantées sur son territoire. Selon l’étude de l’ONG T&E, elle pourrait même couvrir la totalité de ses besoins d’ici 2026. Cela dit, cette autosuffisance concernerait uniquement la fabrication des cellules de batteries. La relocalisation de l’ensemble de la chaîne de valeur représente encore tout un défi. Les cathodes, composants essentiels des cellules, par exemple, sont fabriquées principalement en Chine.

Face à la loi américaine « Inflation reduct act » (IRA) qui incite les entreprises à s’implanter aux États-Unis — comme l’a fait l’usine Meyer Burger —, l’UE essaie de favoriser la relocalisation de cette chaîne sur son sol. Renforcer l’industrie européenne en rapatriant toute la chaîne de production pourrait, non seulement, favoriser sa souveraineté, mais aussi offrir des avantages climatiques directs.

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Une réduction de 37 % des émissions CO2

Selon l’analyse de T&E, à condition que l’Europe parvienne à satisfaire l’ensemble de sa demande interne en cathodes et en cellules de batteries, la relocalisation de la chaîne de production pourrait réduire les émissions de CO2 de 37 %. Cela représenterait une diminution de plus de 133 millions de tonnes de CO2 entre 2024 et 2030. Cette baisse serait notamment due à la diminution des émissions liées au transport international des marchandises et à la part élevée de l’électricité renouvelable dans le mix européen par rapport à la Chine. Par ailleurs, si le processus de production était alimenté uniquement par des énergies renouvelables, cette diminution pourrait atteindre 62 %.

En outre, relocaliser la production de batteries en Europe permettrait de mieux contrôler le processus de fabrication. Le développement des dispositifs serait alors soumis aux normes européennes strictes qui imposent des exigences sévères en matière d’émissions de CO2.

De nombreux défis à relever

Néanmoins, le chemin vers une autosuffisance européenne en matière de production de batteries est encore semé de défis. Selon l’étude, plus de 50 % des projets de fabrication de cellules pourraient être annulés ou retardés, même si le risque a diminué de 15 % par rapport à l’année précédente. La France, l’Allemagne et la Hongrie sont les principaux pays à avoir le mieux sécurisé la réalisation de leurs projets.

Concernant l’approvisionnement des différents composants de batteries, l’Europe est encore extrêmement dépendante d’autres pays. Bien que des projets de raffinage des métaux soient en cours, la plupart n’en sont qu’à leur phase de développement. De plus, malgré un potentiel significatif de fourniture de matières premières, les projets miniers européens rencontrent de fortes oppositions locales.

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La concurrence internationale, notamment avec la Chine, reste également féroce. L’ampleur de son industrie et les économies d’échelle qui en découlent lui permettent de proposer des prix très compétitifs. Dans ce contexte, attirer les investissements dans l’industrie des batteries en Europe nécessite des politiques gouvernementales claires et stables, permettant aux entreprises de planifier leurs investissements à long terme. Il est aussi crucial de maintenir des objectifs rigoureux de réduction des émissions de CO2 pour les véhicules, ce qui reflèterait un engagement ferme envers les technologies propres. Enfin, il pourrait s’avérer nécessaire d’accélérer la mise en œuvre des initiatives européennes (telles que le NZIA ou Net-Zero Industry Act) favorisant les technologies à faible empreinte carbone.