Depuis l’installation d’une vaste centrale photovoltaïque sur son toit, le centre commercial des « Terrasses du Port » à Marseille réalise des économies conséquentes sur sa facture d’électricité. Déjà climatisé à moindres frais par l’eau de la Méditerranée, le site veut renforcer son indépendance énergétique en installant un micro-méthaniseur et des éoliennes urbaines.

Alors que certains centres commerciaux s’inquiètent d’être contraints à installer des panneaux photovoltaïques sur leurs parkings, d’autres n’ont pas attendu la loi pour s’équiper. C’est le cas des « Terrasses du Port », installé depuis près de dix ans dans le quartier de la Joliette à Marseille. Durant l’été 2020, ce vaste centre de 62 000 m² pour 190 boutiques a mis en service une centrale solaire d’une puissance de 965 kWc recouvrant 60 % de sa toiture.

Une installation en autoconsommation, sur le même modèle que les centrales solaires domestiques, qui permet de couvrir « 40 % des besoins électriques des parties communes, soit 1,4 GWh par an » nous explique Marie Canton, la directrice des Terrasses du Port. Le centre consomme un total de 3,4 GWh chaque année pour alimenter les éclairages, les « liaisons mécaniques » (ascenseurs, escalators), le système de chauffage et climatisation, les serveurs informatiques ainsi que les systèmes de ventilation et traitement de l’air (CVC/CTA). Les commerces disposent quant à eux de leur propre compteur électrique et sont donc libres de gérer l’énergie comme ils le souhaitent.

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De l’eau de mer pour se chauffer et climatiser

De tous les postes de consommation, le plus énergivore est étonnamment celui des liaisons mécaniques. En 2021, le centre commercial a troqué sa chaudière à gaz d’origine pour se raccorder à un réseau de chaleur et de climatisation thalassothermique, nous explique la directrice. Les Terrasses du Port sont en effet reliées au réseau Thassalia, qui produit du chaud et du froid à partir de l’eau de la Méditerranée. Le système fournit à de nombreux immeubles du quartier de quoi se chauffer et se refroidir pour un coût et un bilan carbone très faible.

Mais pourquoi le centre commercial, inauguré en 2014, ne s’y est pas raccordé immédiatement ? « Quand nous avons construit le centre, le réseau Thassalia n’était pas prêt à fournir la puissance de chaud et de froid nécessaire. Son dimensionnement ne suffisait pas. On a profité d’une procédure sur nos groupes froid pour les remplacer. Aujourd’hui, le réseau couvre 100 % des besoins en chauffage et climatisation » dévoile Marie Canton.

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390 000 € d’économies grâce aux panneaux photovoltaïques ?

Libéré du poids important qu’exercent climatisation et chauffage sur les besoins énergétiques, le centre commercial peut valoriser sa production solaire pour d’autres postes. Ainsi, en 2021, les Terrasses du Port auraient économisé 180 000 € d’électricité grâce à sa centrale photovoltaïque. La directrice prévoit même une économie de 390 000 € pour 2023, en considérant la hausse spectaculaire du prix du kilowattheure. Un équipement qui devrait être rapidement rentabilisé, l’investissement initial s’élevant à environ 2 millions d’euros.

« Nous sommes à 100 % autonomes entre 9 h et 17 h quand il fait beau » assure Marie Canton. Toutefois, le centre étant en autoconsommation classique sans revente du surplus et dépourvu de système de stockage, il s’assoit actuellement sur un potentiel de production supplémentaire de 20 %.

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Un potentiel qui pourra être exploité à l’avenir grâce à l’autoconsommation collective, via le spécialiste des communautés d’énergie SerenySun, chargé de l’étude. En clair, l’électricité excédentaire profitera à d’autres consommateurs privés ou publics « situés à 2 km autour ou à l’intérieur du centre ». En parallèle, les Terrasses du Port espèrent économiser 700 MWh de consommation annuelle en remplaçant le système d’éclairage par des LED de dernière génération.

En haut à gauche : une éolienne urbaine Unéole, en bas à gauche : le fonctionnement du méthaniseur Biobeebox, à droite : le centre commercial.

Un méthaniseur pour valoriser les ordures de 250 restaurants

Pour gagner davantage en autonomie énergétique, le centre commercial prévoit également de diversifier ses modes de production. Au photovoltaïque, s’ajoutera prochainement une centrale de micro-méthanisation Biobeebox. Le dispositif qui prendra place en toiture doit valoriser 500 tonnes de déchets organiques générés chaque année par 250 restaurateurs du centre de Marseille, en plus de ceux installés aux Terrasses du Port.

Les ordures seront transformées en biogaz, brûlé afin de produire annuellement 80 MWh d’électricité en cogénération. L’installation produira aussi 10 tonnes de compost et 200 m³ d’eau à traiter afin de la réutiliser dans les sanitaires si l’autorisation est obtenue. L’investissement, qui s’élève à 1,2 million d’euros, est soutenu par des subventions de l’ADEME et de la région Sud.

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Enfin, le centre commercial envisage de compléter le tableau par des éoliennes urbaines à axe vertical, pour « produire la nuit » explique Marie Canton. Quasiment les pieds dans l’eau, les Terrasses du Port bénéficient d’une brise marine soutenue et d’une exposition au mistral presque sans obstacles. Le gisement de vent doit toutefois être confirmé par une étude, que le centre vient de commander à Uneole, un fabricant français d’éoliennes urbaines.