Dans l’imaginaire collectif, le nucléaire continue de faire peur. Pourtant, quelques pays d’Europe décident à nouveau de miser sur l’énergie atomique pour l’avenir. Un choix qui, dans le cadre très strict de la crise climatique, semble tout à fait éclairé.

Les énergies renouvelables sont variables : lorsqu’elles ne produisent pas assez d’électricité, il faut des solutions de remplacement, aussi appelées « backup ». Des solutions qui permettent de continuer à répondre à la demande. Des solutions de stockage, comme les STEP et mégabatteries. Mais surtout, pour l’heure, des solutions de production d’électricité pilotables. Le gaz en fait partie. Et dans un monde qui ne veut plus du charbon — ou au moins, qui ne devrait plus en vouloir —, le gaz représente la solution idéale pour certains.

Pourtant, les études scientifiques qui se succèdent ces derniers mois mettent à mal cette position. Des chercheurs montrent ainsi que pour tenir nos objectifs de réduction d’émissions de gaz à effet de serre, nous allons non seulement devoir, d’ici 2050, diminuer notre consommation de charbon et de pétrole — respectivement de 99 % et de 70 % —, mais aussi notre consommation de gaz fossile de pas moins de 84 % ! D’autres suggèrent que le recours au GNL — ce gaz liquéfié dit naturel qui n’en demeure pas moins fossile — serait, dans le meilleur des cas 24 % plus nocif pour le climat que le charbon. Et dans le pire, même deux fois plus.

La France renoue avec le nucléaire

Ce sont ces raisons scientifiques — et sans doute pas mal de raisons plus politiques, peut-être économiques aussi, ne soyons pas naïfs —, qui poussent certains pays à songer de nouveau à développer leur parc nucléaire. C’est le cas de la France qui avait mis son programme au ralenti. Jusqu’à ce qu’arrive le Plan France 2030 et son soutien aux EPR et aux petits réacteurs modulaires, les désormais fameux SMR. Ces derniers étant tout particulièrement destinés à remplacer les centrales à charbon et au gaz fossile.

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La Bulgarie veut une seconde centrale nucléaire

La Bulgarie, quant à elle, cherche toujours quoi faire des deux réacteurs nucléaires qu’elle s’est fait livrer par la Russie en 2017. L’objectif était d’ouvrir une seconde centrale — après celle de Kozlodouy —, toujours sur les rives du Danube. Mais la volonté de rompre la dépendance énergétique à la Russie est devenue plus forte. Ainsi des discussions seraient en cours avec EDF pour évaluer le coût d’une mise en œuvre. Mais aussi avec l’Ukraine qui pourrait envisager de récupérer ces réacteurs pour les utiliser dans ses propres centrales. L’Ukraine qui a aussi manifesté par ailleurs son intérêt pour la technologie de réacteur nucléaire à eau pressurisée de troisième génération développée par Westinghouse.

Cette technologie de réacteur AP1000 n’est pour l’heure exploitée qu’en Chine et aux États-Unis. Mais la Bulgarie vient également de se mettre sur les rangs. Elle vient même d’affirmer sa volonté de construire de nouveaux réacteurs sur le site de son unique centrale nucléaire existante. À ce jour, deux réacteurs de construction russe de 1 000 MW chacun y sont déjà en fonctionnement. Ils fournissent tout de même plus d’un tiers de l’électricité du pays. Avec une autorisation de produire jusqu’en 2027 et 2029. Une autorisation qui pourrait être reconduite.

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Mais le gouvernement bulgare n’a pas attendu d’en avoir la confirmation pour confier au groupe américain Westinghouse le soin d’y ajouter une puissance totale de 2 300 MW répartie sur deux réacteurs de type AP1000 : le premier doit entrer en fonctionnement en 2033 — c’est probablement un peu optimiste — et le second, en 2036. Objectif affiché : remplacer les centrales à charbon du pays qui doivent fermer d’ici 2038 et diminuer encore la dépendance énergétique de la Bulgarie à la Russie.

La Pologne va faire ses premiers pas dans le nucléaire

Il y a quelques mois, la Pologne — dont le mix électrique est écrasé par les sources fossiles en général et le charbon en particulier — avait fait le même choix que la Bulgarie. Alors même que le pays ne possède aucune filière nucléaire, il annonçait en novembre 2022, le choix de la technologie Westinghouse pour la construction d’une première centrale de 3,3 GW. La première centrale nucléaire de Pologne devrait sortir de terre du côté de Lubiatowo-Kopalino, sur la mer Baltique. Mise en service prévue en 2033. Le gouvernement polonais table au total sur la construction de 6 à 9 GW nucléaires d’ici 2043.