La riothermie consiste à utiliser la chaleur ou la fraîcheur des eaux d’égouttage pour climatiser des bâtiments. Uccle, une commune de la banlieue bruxelloise, a misé sur cette technologie pour chauffer et refroidir son nouveau centre administratif.

Chaque année, 20 à 25 kilomètres du réseau d’égouttage bruxellois – qui en compte 1.900 – sont rénovés. Vivaqua, l’entreprise publique qui gère la distribution d’eau potable mais aussi le réseau d’égouttage de la capitale, entend profiter des travaux de rénovation pour mettre en place des installations de riothermie. La technologie consiste à climatiser un immeuble en mettant à profit la chaleur résiduelle ou la fraîcheur des eaux usées. La température de celles-ci est en effet plus ou moins constante tout au long de l’année. « C’est une chaleur perdue », nous confie Olivier Broers, directeur Etudes et Investissements chez Vivaqua. « Elle provient d’une série d’utilisations de l’eau chaude qui se font chez monsieur Tout-le-monde, comme le lave-vaisselle, la lessiveuse ou l’eau de la douche ». Un échangeur et une pompe à chaleur réversible permettent donc en hiver d’extraire des calories du réseau d’égouts, et en été, des frigories.

Un échangeur bon marché

Les eaux usées étant corrosives, les échangeurs de chaleur utilisés pour cette application sont classiquement fabriqués avec des tuyaux en inox ou en aluminium et sont donc relativement coûteux. C’est pourquoi les ingénieurs de Vivaqua cherchent, depuis plus de 10 ans, à mettre au point une technique innovante. « Nous utilisons maintenant des tubes en polyéthylène haute densité » explique Olivier Broers. Un matériau bon marché qui résiste bien à l’agressivité des eaux d’égouttage.

En 2013, une première application à petite échelle du procédé est étudiée à Molenbeek. « Nous avions choisi de chauffer un petit local technique » explique Olivier Broers. « La faculté polytechnique de l’Université de Bruxelles a mesuré chaque jour, pendant un an, les évolutions de température pour connaître la quantité d’énergie qu’on pouvait dégager de l’égout ». Fort de cette expérience, Vivaqua a déposé un brevet européen pour protéger son procédé et lancé un projet plus ambitieux. L’aménagement, à Uccle, d’un centre administratif de 15.000 m2 dans une artère où l’égout devait également être rénové a été l’occasion d’appliquer la technologie à plus grande échelle. « Nous allons pouvoir couvrir les besoins en chauffage et en refroidissement des immeubles à raison de 25% » précise Olivier Broers. A la clé, des économies sur la facture d’énergie de la municipalité évaluées à 30.000 € et une réduction des émissions annuelles de CO2 de 40 à 60 tonnes. « Nous estimons le retour sur investissement à 20 ans ; c’est tout à fait acceptable ».

Le centre administratif de la commune d’Uccle est partiellement climatisé par la riothermie

Ambitions

Vivaqua est déjà en discussion avec d’autres partenaires potentiels, comme l’explique Laurence Bovy, directrice générale : « la Ville de Bruxelles ainsi que la municipalité de Valence en Espagne ont montré de l’intérêt pour notre procédé. Celui-ci ne peut d’ailleurs pas être reproduit sans notre consentement puisqu’il est protégé par un brevet ». A Valence, il s’agirait notamment de climatiser la piscine communale.

 A plus longue échéance, Vivaqua ambitionne d’installer d’ici 2029 des échangeurs de chaleur sur une portion de 50 km de son réseau d’égouttage. Leur activation devrait permettre d’éviter l’émission de 65.000 tonnes de CO2 par an pour le chauffage ou la climatisation des immeubles.