De plus en plus d’États africains envisagent le nucléaire pour répondre à leurs besoins énergétiques. Une technologie longtemps réservée aux pays industrialisés pourrait bien changer l’avenir du continent.
En Afrique, la pauvreté énergétique reste un frein majeur à la croissance économique. Près de 600 millions de personnes n’ont toujours pas accès à l’électricité et la consommation annuelle moyenne ne dépasse pas 500 kWh par habitant, contre 3 000 kWh dans les pays très industrialisés. Pour y remédier, le continent semble vouloir se tourner vers une source encore très peu exploitée : l’énergie nucléaire.
Le nucléaire apparaît comme une solution pour renforcer la sécurité énergétique tout en réduisant les émissions. À ce jour, l’Afrique du Sud est le seul pays du continent à disposer d’une centrale nucléaire opérationnelle. Mais selon l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), une vingtaine d’autres nations manifestent désormais leur intérêt. La moitié des nouveaux pays candidats au nucléaire seraient africains.
À lire aussiÉnergies renouvelables : pourquoi l’Afrique est à la traine ?Outre l’Afrique du Sud, l’AIEA recense précisément 23 pays africains désireux d’intégrer l’énergie nucléaire à leur mix énergétique. En tête, figure l’Égypte, le pays le plus avancé en la matière. Sa première centrale commerciale doit entrer en service en 2028, avec quatre réacteurs totalisant 4,8 GW de puissance. À ce jour, c’est la seule nation du continent à avoir lancé concrètement la construction d’une centrale.
Trois autres pays disposent déjà d’un programme nucléaire structuré : le Kenya, le Ghana et le Nigeria. Tous ont mis en place une autorité de régulation nucléaire ainsi que des organismes dédiés. Ils se trouvent actuellement dans la phase préparatoire avant le lancement de chantiers.
L’Algérie, l’Éthiopie, le Niger, le Sénégal, le Rwanda, le Soudan, la Tunisie, l’Ouganda et la Zambie sont en pleine réflexion avant de prendre une décision. Enfin, neuf autres pays ont également exprimé leur intérêt pour l’énergie nucléaire, mais ne sont pas encore entrés en phase de planification, selon l’AIEA.
Selon le rapport de l’AIEA, plusieurs pays africains s’intéressent particulièrement aux petits réacteurs modulaires (SMR). Cette technologie présente des atouts adaptés aux besoins du continent. Une étude estime que leurs coûts initiaux sont inférieurs de 40 % à 50 % à ceux des grandes centrales et que les délais de construction sont réduits de trois à cinq ans. Leur déploiement progressif permet une première production plus rapide. Leur puissance (de 50 à 300 MW) correspond mieux aux réseaux électriques africains, souvent de taille limitée, alors que les gros réacteurs d’un gigawatt peuvent fragiliser ces infrastructures.
Consciente de ces avantages, l’AIEA a lancé son programme « École sur les SMR ». Un premier atelier s’est tenu au Kenya en mai dernier, réunissant des responsables nucléaires et des organisations issues de six pays africains.
À lire aussiDes mini-centrales nucléaires pour sortir l’Afrique du Sud de l’impasse ?Sur la question du financement, l’AIEA recommande de constituer un pipeline de projets afin de stabiliser la filière et réduire les coûts unitaires. L’agence conseille aussi de sécuriser à l’avance des contrats d’achat d’électricité pour rassurer les investisseurs.
Les pays africains sont invités à solliciter les banques multilatérales. En juin 2025, la Banque mondiale a, pour la première fois depuis 1959, accepté de soutenir le nucléaire civil via un accord avec l’AIEA. Ce partenariat vise à prolonger la durée de vie des réacteurs existants, financer les réseaux électriques et accélérer le déploiement des SMR. Un signal fort pour encourager d’autres banques de développement à s’engager et à ouvrir de nouvelles sources de financement.
Enfin, le rapport met en avant la coopération régionale comme levier financier. Des pays voisins peuvent former un consortium pour commander ensemble plusieurs SMR. Cette mutualisation accroît le volume des commandes, réduit le coût unitaire et répartit les risques financiers entre plusieurs États. Une stratégie qui pourrait accélérer la concrétisation des projets nucléaires en Afrique.
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