Octave Klaba, le patron du numéro 5 mondial de l’hébergement web OVH, a dévoilé les caractéristiques détaillées de l’éolienne Poweend dédiée aux zones commerciales, et qui sera presque entièrement construite dans une usine robotisée.

Le numérique n’est pas « dématérialisé » contrairement à ce que l’on pourrait croire. Pour qu’internet fonctionne, il faut non seulement du matériel, mais aussi de grandes quantités d’énergie. Ainsi, les centres de données (data centers) où transitent la majeure partie des communications sur le web consommeraient 4 % de toute l’électricité produite dans le monde. En France, les data centers ont englouti 4 TWh en 2015 selon RTE, soit 0,63 % de la production électrique nationale.

Pour optimiser leur dépense d’énergie et, dans une moindre mesure, réduire leur impact environnemental, les hébergeurs développent différentes stratégies. Certains construisent des data centers dans des pays froids, d’autres exploitent les curiosités très locales, s’installent près de méthaniseurs, valorisent les pertes de chaleurs ou deviennent tout simplement producteurs d’électricité renouvelable.

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Une éolienne conçue pour les zones industrielles

Probablement animé par cette problématique, Octava Klaba, le dirigeant du célèbre hébergeur web OVH, a créé la start-up Poweend afin de fabriquer ses propres éoliennes adaptées aux zones commerciales.

Dans ces « quartiers » industriels, il est rarement possible d’ériger des éoliennes standard de 80 à 150 m de haut. Poweend a donc développé une turbine de moins de 50 mètres, qui sera capable de fonctionner par vent faible et délivrera une puissance modeste de 1 MW.

Avec une puissance trois fois inférieure à la moyenne des éoliennes terrestres en France, il sera nécessaire d’installer plusieurs turbines pour alimenter, par exemple, un data center, qui peut absorber de plusieurs dizaines à quelques centaines de mégawatts (MW) pour les plus gros.

Documents publiés par Octava Klaba, sur son compte Twitter.

Un robot pour fabriquer des pales, première mondiale ?

Baptisée « Eole 5.0 », la machine à entrainement direct (sans boite de vitesse) sera équipée d’un rotor de 64 m de diamètre. Elle doit produire entre 2 et 2,5 GWh chaque année. Rien de bien original jusque-là : il existe déjà des turbines direct-drive d’une cinquantaine de mètres de haut pour environ 1 MW de puissance.

La principale originalité de l’éolienne Poweend réside dans son mode de fabrication. La société veut en effet l’assembler dans une usine presque entièrement robotisée située à Prouvy (Nord), afin de réduire son coût. « La robotisation va très loin : on veut construire les pales avec les robots. C’est un défi que peu de boites ont su relever (aucune ?) » explique Octava Klaba, sur Twitter.

Croquis à l’appui, le dirigeant dévoile le processus de fabrication des pales par une tête robotisée. Du cirage du moule à l’intégration des différents ingrédients (couches de textiles, injection de résine) à la cuisson jusqu’aux finitions, le bras serait capable d’exécuter la recette dans son intégralité.

Documents publiés par Octava Klaba, sur son compte Twitter.

D’autres composants de l’éolienne seront également fabriqués « en interne », comme le rotor du générateur, qui consiste en un assemblage d’aimants. Les interventions humaines se cantonneront au chargement des matériaux dans les lignes d’assemblage. L’usine sera dimensionnée pour fabriquer 30 éoliennes chaque année.

« On ne vend pas ces éoliennes. On les utilise pour déployer nos petits champs d’éoliennes dans les zones industrielles pour produire et vendre de l’électricité localement » explique Octave Klaba. Le patron autodidacte prévoit une durée de vie de 20 à 25 ans à ses turbines, mais ne promet pas qu’elles seront entièrement recyclables.

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Des turbines partiellement recyclables

« On n’est pas encore à 100 % [de recyclabilité, NDLR] mais comme on maitrise l’ensemble de la fabrication, on pense y arriver dans la 3ᵉ ou 4ᵉ génération, grâce aux matériaux qu’il faut encore inventer ». Les premières éoliennes totalement recyclables arrivent tout juste sur le marché, grâce à de nouvelles compositions de pales protégées par des brevets.

Lancé il y a 3 ans, le projet d’éolienne doit se concrétiser courant 2024 par l’installation des premières turbines dans les Hauts-de-France et en Seine-Maritime. Il devrait y avoir 110 éoliennes en France en 2028, avant un déploiement à l’étranger. Sur les 20 prochaines années, Octave Klaba ambitionne en effet de décupler le nombre d’usines en s’exportant « sur d’autres continents ».

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