Le rebond de l’activité économique post-COVID suivi des problèmes de livraison de gaz en Europe en raison de la guerre en Ukraine ont provoqué une flambée des prix de l’énergie. Cette crise a porté préjudice au budget des consommateurs, particuliers comme professionnels. Mais peut-on y voir également quelques conséquences positives ? La réponse est oui. Voici les 5 conséquences positives de la crise énergétique.

1 – L’indépendance énergétique est devenue une priorité

L’invasion de l’Ukraine par la Russie a tendu les relations diplomatiques et entrainé une série de sanctions à l’égard de la Russie. Cela a bouleversé l’approvisionnement des pays européens en gaz naturel, puisque la Russie était le premier exportateur de cette énergie dans le monde. Selon les chiffres du conseil européen, la Russie fournissait 53 % du gaz consommé en Europe en mars 2019. Il n’était plus que de 13 % en novembre 2022. Certains pays européens dépendaient même presque exclusivement des Russes pour importer du gaz. C’était le cas de l’Allemagne ou de la Lituanie par exemple. En France, la dépendance au gaz russe était moins forte que dans d’autres pays puisque la Norvège est le principal fournisseur de gaz (36 %) devant la Russie (17 %) en 2020.

Le conflit ukrainien a donc entraîné une crise de l’énergie en Europe qui a conduit les dirigeants à s’interroger sur leur dépendance à la Russie pour son approvisionnement en gaz. En réalité, la question n’était pas nouvelle, mais la guerre a permis d’accélérer la réflexion sur le sujet. Il est apparu indispensable de mettre un terme à la dépendance européenne aux énergies fossiles russes. Diversifier les sources d’approvisionnement est devenu indispensable pour être sans cesse en mesure de répondre à la demande énergétique des consommateurs.

L’Union européenne s’est notamment tournée vers les importations de GNL (gaz naturel liquéfié) américain pour combler ses besoins. L’Algérie et la Norvège ont également été mises à contribution pour augmenter leur fourniture de gaz naturel. L’indépendance énergétique est donc devenue une question cruciale pour les pouvoirs publics, ce que l’on peut voir comme une conséquence positive de la crise.

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2 – La solidarité énergétique européenne s’est renforcée

Pour autant, la priorité accordée à l’indépendance énergétique des États n’a pas été de pair avec un repli individuel. La solidarité européenne qui existait déjà avant la crise est devenue encore plus importante, notamment pour passer l’hiver 2022/2023. Cette solidarité utilise les interconnexions qui permettent de faire circuler de l’électricité ou du gaz d’un pays à un autre.

Dans son rapport d’activité 2022, la présidente de la Commission de régulation de l’énergie (CRE) a d’ailleurs relevé sur ce point que « il a été établi que, sans les interconnexions (qui ont été renforcées pendant la crise) avec l’Espagne, la Belgique, l’Allemagne, le Royaume-Uni et l’Italie et qui continueront de se développer entre la France et ses voisins, la France aurait eu recours du signal éco-watt rouge, voire aux délestages l’hiver dernier ».

Il est vrai qu’en France, la crise de l’énergie a été renforcée par le phénomène de corrosion sous contrainte qui a fortement affecté le parc nucléaire et réduit la production d’électricité. D’ailleurs, selon RTE, en 2022, la France a été importatrice nette d’électricité, pour la première fois depuis 1980 (bilan net de 16,5 TWh en import). La crise a donc montré l’importance de la coopération européenne en matière d’énergie.

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3 – Un mouvement favorable à la sobriété énergétique est apparue

On l’a vu dès l’été 2022 en France, une véritable campagne de communication a été déployée en faveur de la sobriété énergétique. Dans la perspective d’un hiver 2022/2023 tendu sur le plan de l’approvisionnement énergétique, les messages ont été multipliés pour inciter les consommateurs résidentiels et professionnels à réduire leurs consommations.

La hausse du prix de l’énergie, bien que ralenti par le bouclier tarifaire, a forcément joué sur le comportement des Français dans leur utilisation du gaz et de l’électricité. Mais pas seulement. La sobriété énergétique était évoquée partout avant et pendant l’hiver. Le signal Eco-watt, mis en place pour informer de l’état du réseau électrique, a été largement diffusé. Et les consommateurs ont été sensibilisés à la possibilité de devoir réduire ponctuellement leur usage en cas de tension sur le réseau.

Les écogestes ont également été largement diffusés pour permettre la réduction des besoins en énergie : limitation de la température à 19 °C pendant la période de chauffe, aération des logements au moins une fois par jour pour limiter l’humidité, pose de rideaux thermiques, etc. Et l’on peut dire que c’était une nouveauté dans notre pays, peu enclin à la sobriété, puisqu’habitué jusque-là à consommer une énergie bon marché.

La forte hausse des prix de l’électricité, d’abord pour les professionnels et collectivités, puis pour les particuliers, a mécaniquement poussé à réaliser des économies. Audits énergétiques, remplacement des équipements énergivores, utilisation plus raisonnée des appareils gourmands : tout le monde a cherché à moins consommer. Ce mouvement en faveur de la sobriété est naturellement une bonne nouvelle pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

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4 – Les énergies renouvelables et bas-carbone ont gagné en crédibilité

L’émergence des énergies renouvelables préexistait à la crise énergétique. Mais on peut dire que les incertitudes liées à l’approvisionnement en gaz naturel et les difficultés rencontrées par le parc nucléaire français ont dynamisé le secteur des énergies « vertes ». En mars 2023, le comité économique et social européen (CESE) a même publié un communiqué de presse avec un titre évocateur « les énergies renouvelables sont la solution à la crise énergétique ». Dans cette publication, l’organisme appelle au développement des énergies vertes et salue le fait que l’Union européenne a produit davantage d’électricité d’origine éolienne et solaire qu’à partir du gaz, durant l’année 2022.

Et la croissance des énergies renouvelables permet de créer de nombreux emplois dans le secteur. Ça aussi, c’est une bonne nouvelle ! Selon le syndicat des énergies renouvelables (SER), le secteur représentera 264 000 emplois directs et indirects en 2028. En France, les difficultés du parc nucléaire vieillissant et la dépendance aux importations d’électricité depuis nos voisins ont également provoqué un vif regain d’intérêt pour l’énergie atomique. Selon un sondage d’opinion réalisé début janvier 2023 par Odoxa-Blackbone pour Le Figaro, 63 % des Français ont désormais une image positive du nucléaire, contre seulement 34 % en 2019.

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5 – L’avenir énergétique de la France est devenu l’affaire de tous

Enfin, la crise énergétique a permis de placer la question de notre avenir énergétique au cœur du débat démocratique. Le sujet n’est plus réservé à une minorité de passionnés par le secteur. Les reportages sur le mix énergétique, la sobriété et l’approvisionnement en gaz, entre autres, se sont multipliés sur les chaînes de télévision depuis le début de la crise. Des médias grand public se sont penchés sur la question du mécanisme de fixation des prix de l’énergie dans l’UE et du fonctionnement des marchés de l’électricité en général.

Ces questions intéressent davantage les consommateurs. Ainsi, la concertation nationale sur le mix énergétique qui s’est déroulée en ligne du 20 octobre 2022 au 18 janvier 2023 a reçu 31 355 contributions. Ce n’est pas négligeable et cela montre l’intérêt que les Français témoignent à cette question.

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