Le prix des tarifs réglementés de vente (TRV) de l’électricité va encore augmenter le 1ᵉʳ février. Cette énième hausse, qui va peser sur le budget des ménages et des petites entreprises, vient à rebours du mouvement d’électrification indispensable à la décarbonation de nos usages.

Annoncée depuis plusieurs semaines, la hausse des prix de l’électricité vient d’être confirmée par le ministre de l’Économie. Les TRV de l’électricité vont bien augmenter au 1ᵉʳ février 2024, malgré une baisse des prix de gros sur les marchés. La rumeur évoquait une hausse de 10 %. C’est à peu près cela qui va peser sur la facture des consommateurs à partir du mois prochain. En effet, l’augmentation sera de +8,6 % pour les clients ayant souscrit une offre au tarif base. Pour ceux ayant choisi l’option heures pleines/heures creuses (HP/HC), ce sera +9,8 %.

Ce n’est pas la première fois que les consommateurs sont touchés par une telle augmentation des prix. En tout, entre février 2022 et février 2024, la facture d’électricité des ménages et des petits professionnels aura flambé de pratiquement 45 %. C’est énorme, surtout dans un contexte de crise qui ne touche pas seulement le domaine de l’énergie, mais également celui des produits alimentaires qui connait une inflation galopante depuis plusieurs mois.

L’augmentation des taxes va faire flamber la facture d’électricité

Pourquoi cette augmentation ? Pour rappel, les prix des TRV en électricité peuvent être modifiés deux fois par an, en février et août, après avis de la Commission de régulation de l’énergie (CRE). Cette année, dans sa délibération du 18 janvier 2024, la CRE a souligné que les prix des TRV en électricité étaient stables depuis août 2023. L’évolution est de +0,18 % HT soit 0,39 euro/MWh HT pour les consommateurs résidentiels et – 3,55 % HT soit -7,73 euros/MWh HT pour les professionnels soumis au tarif bleu.

Ce n’est donc pas l’évolution du prix de l’électricité proprement dite qui va provoquer la hausse attendue pour février. C’est le relèvement du tarif de l’accise (qui est une taxe appliquée à l’électricité), anciennement appelée Taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE). En effet, le montant de l’accise avait été ramené à 1 euro/MWh dans le cadre du bouclier tarifaire, afin de protéger les consommateurs de la hausse spectaculaire des prix sur le marché de gros. Avant cela, le montant de cette taxe était de 32,44 euros/MWh.

En février 2024, l’État souhaite donc retirer progressivement le bouclier tarifaire en augmentant de nouveau l’accise, à hauteur de 21 euros/MWh. Et ce n’est pas fini puisque Bruno Le Maire a prévenu qu’une nouvelle hausse interviendrait en février 2025, pour revenir à « la situation qui était celle d’avant le bouclier tarifaire ».

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Le gaz redevient moins taxé que l’électricité

Cette nouvelle hausse des prix de l’électricité tombe mal. D’abord parce qu’elle va peser lourdement sur le portefeuille des ménages et la trésorerie des petits professionnels. Mais aussi parce qu’elle ne va pas dans le sens de la transition énergétique. En effet, pour se défaire des énergies fossiles et permettre d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2050, il est nécessaire de se tourner vers l’électrification massive des usages. Pour cela, particuliers et professionnels sont incités, par exemple, à faire le choix des véhicules électriques, à remplacer leur mode de chauffage par des pompes à chaleur qui fonctionnent à l’électricité, à opter pour des plaques de cuisson vitrocéramiques ou à induction, entre autres.

Mais tout ceci va demander davantage de consommation électrique, à l’heure où le prix de cette énergie ne cesse d’augmenter depuis deux ans. Il sera donc difficile de convaincre les consommateurs d’investir dans des équipements électriques alors que le tarif de l’électricité a bondi depuis deux ans. D’autant que le gaz naturel, importé, d’origine fossile et donc fortement carboné, redevient moins taxé que l’électricité, qui est majoritairement produite en France à partir de ressources bas-carbone. L’accise sur le gaz naturel s’élève en effet à 16,37 euros par MWh, soit 4,63 euros par MWh de moins que l’électricité.

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Injustice envers les consommateurs qui contribuent à soulager le réseau électrique

Par ailleurs, l’augmentation des prix va impacter davantage les consommateurs qui s’investissent pour reporter leurs usages en dehors des périodes de tension sur le réseau. Il s’agit des clients ayant souscrit aux offres HP/HC, Tempo et EJP. Moyennant des tarifs plus avantageux lorsque la demande en électricité est moins forte (et plus élevés lors des pics de demande) ces consommateurs participent à l’équilibre du réseau. Pourtant, le tarif des heures creuses va bondir de 13,13 %, contre 9,76 % pour les heures pleines. C’est pire en option Tempo : le tarif d’heure creuse en jour bleu s’envole à +22,73 %.

L’augmentation des prix accrue les concernant s’explique par de simples raisons mathématiques, comme l’a indiqué la Présidente de la CRE, Emmanuelle Wargon. Ces contrats bénéficient de tarifs plus bas et « quand vous additionnez en valeur absolue quelque chose à partir d’un tarif qui est un peu plus bas, ça fait une progression un peu plus élevée ». Malgré tout, le signal adressé aux consommateurs n’est franchement pas bon.