De par la géométrie spécifique en U des drains, la technique de forage multidrains permet de multiplier les traversées dans le réservoir géothermique par rapport à un forage conventionnel. Implémentée cette année pour la première fois en France à Vélizy-Villacoublay, dans le bassin parisien, cette innovation que l’on doit à l’énergéticien français Engie, promet de « revigorer » le développement de la géothermie profonde. La technique permet en effet d’atteindre l’équilibre économique des projets dans des territoires historiquement peu prometteurs.

Les habitants du bassin parisien disposent sous leurs pieds de deux « aquifères » profonds qui valent de l’or : des nappes d’eau chaude souterraine. Depuis le premier forage réalisé à Melun en 1969, les projets géothermiques s’y sont succédés. Exploités aujourd’hui par une cinquantaine de réseaux de chaleur, ils alimentent l’équivalent de 250.000 logements.

Comme à Bobigny l’année dernière ou à Rueil-Malmaison cet été, les forages sont exécutés classiquement par la technique du « doublet » : un puits d’extraction permet de puiser les calories dans la nappe souterraine située à 1.500 m de profondeur et un puits de réinjection restitue l’intégralité des volumes d’eau extraits.

Une technologie innovante

Mais pour le réseau de chauffage urbain de Vélizy-Villacoublay, une commune du bassin parisien désireuse de couvrir plus de 60% de la demande de chaleur par la géothermie, l’entreprise Engie Solutions qui s’est vu confier la réalisation du projet, a mis au point une technologie innovante, le forage multidrains. De par la géométrie spécifique en U des drains utilisés, elle permet de multiplier par 3, voire 4 ou 5 les traversées dans le réservoir géothermique par rapport à un forage conventionnel.

Comme un dessin vaut mieux qu’un long discours, voici l’illustration de la différence entre le forage d’un doublet classique et celui d’un multidrains.

À lire aussi Chauffage de la gare de Saint-Omer : un exemple de géothermie sur sondes

Augmentation de la puissance calorifique

Cette configuration maximise la surface d’échange dans l’aquifère et augmente donc la puissance calorifique du forage. Cela permet à la centrale géothermique de fournir beaucoup plus d’énergie.

A Vélizy-Villacoublay, c’était la première fois que cette méthode, déjà utilisée dans le secteur du pétrole et du gaz, a été employée dans un projet de géothermie profonde. L’eau géothermale puisée à 64 °C et fournit au réseau de chaleur de la commune une puissance calorifique de plus de 16 MW.

Les résultats attendus ont été largement confirmés. En s ’appuyant sur l’expertise de leurs principaux partenaires sur ce projet – Schlumberger un spécialiste des forages pétroliers et la société française SMP – les équipes d’Engie Solutions ont réussi à doubler le débit de production des puits en le portant à 400 m3/heure.

À lire aussi En Europe la prochaine décennie sera-t-elle celle de la géothermie ?

Un potentiel « gigantesque »

La réussite du forage a été saluée par de nombreux acteurs œuvrant en faveur de la transition énergétique. La technique permet en effet d’atteindre l’équilibre économique des projets géothermiques dans des territoires historiquement peu prometteurs.

Engie avec sa technologie multidrains a notamment remporté le trophée européen de l’innovation géothermique 2021 décerné par le Conseil Européen de l’Energie Géothermique (EGEC). « Cette innovation ouvre d’innombrables opportunités de développement à la filière géothermique », a déclaré à cette occasion Miklos Antics, le président de l’EGEC et membre du jury. « Sa facilité de reproduction au sein des villes de toute l’Europe transforme de nombreuses zones présentant une capacité géothermique plus faible en de nouvelles cibles possibles. Le potentiel de cette technologie pour réduire les émissions dans les années à venir est gigantesque, d’autant plus si l’on se remémore à quel point l’énergie géothermique est encore peu exploitée à l’heure actuelle ».

La Fondation Solar Impulse a également référencé la technique dans son moteur de recherche qui présente plus de 1 000 solutions « propres » et rentables, reconnues par des experts indépendants pour leurs performances environnementales et économiques.

À lire aussi Annecy : le réseau de chauffage d’un nouveau quartier puisera son énergie dans le lac À lire aussi La France veut toujours extraire le lithium de ses eaux profondes