Dans une interview accordée à une télévision allemande, l’activiste climatique Greta Thunberg affirme que remplacer des centrales nucléaires par des centrales au charbon est « une erreur ». Un avis qui ne passe pas inaperçu outre-Rhin, où le mouvement antinucléaire fait de moins en moins l’unanimité.

L’urgence climatique et le risque de pénurie énergétique génèrent un surprenant regain d’affection pour l’atome. Jadis tendance, le mouvement antinucléaire s’est nettement ringardisé, à tel point qu’une des plus célèbres militantes écologistes se montre désormais critique envers la stratégie de sortie du nucléaire outre-Rhin.

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Substituer du nucléaire par du charbon, « une erreur »

« Si on en a déjà en fonctionnement [des centrales nucléaires, NDLR], je pense que c’est une erreur de les fermer pour tout miser sur le charbon » a expliqué Greta Thunberg, à l’occasion d’une interview accordée à la chaîne de télévision allemande ARD. La militante suédoise reconnaît un sujet « très houleux » et semble vouloir conserver une position tempérée.

Alors que la journaliste réitère sa question sur l’arrêt du nucléaire, la jeune activiste préfère ne pas s’étendre davantage et balaye d’un nébuleux « ça dépend, on ne sait pas ce qu’il adviendra de tout cela ».

Un avis partagé par le ministre allemand de l’Économie

Si Greta Thunberg reste prudente dans ses propos sur le nucléaire, elle paraît avoir tranché son propre avis. L’atome permettant de produire une électricité très peu carbonée, la militante contre le changement climatique en a sans doute une opinion favorable. Pour rappel, produire de l’électricité à partir de charbon rejette entre 820 et 1 000 g d’eq.CO2/kWh, alors que le nucléaire émet 4 à 12 g d’eq.CO2/kWh.

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Bien que mesurée, sa prise de position pourrait soutenir le changement de vent sur le nucléaire allemand. Le ministre de l’Économie Christian Lindner a d’ailleurs salué « les encouragements de Greta Thunberg à la position du FDP [le parti des libéraux-démocrates, NDLR] de maintenir en service nos centrales nucléaires ». « Les raisons parlent d’elles-mêmes, économiquement et physiquement » a-t-il déclaré sur Twitter.

De moins en moins d’allemands opposés au nucléaire

Alors qu’en 2011, 63 % de la population outre-Rhin souhaitait arrêter rapidement les centrales nucléaires, un récent sondage montre un essoufflement progressif de l’opposition. La dépendance extrême de l’Allemagne au gaz russe, l’envolée de prix de l’électricité, la difficile sortie du charbon et un probable regain de confiance dans la sécurité nucléaire contribuent certainement à affaiblir le mouvement.

D’après ARD-DeutschlandTrend, 67 % des allemands seraient désormais favorables à une extension de 5 ans des réacteurs. Ils seraient même 41 % à ne pas être opposés à la construction de nouvelles centrales. Le contexte actuel a déjà permis de repousser l’arrêt définitif des 3 dernières centrales nucléaires du pays. Initialement prévue au 31 décembre 2022, l’extinction des réacteurs est finalement repoussée au printemps 2023.

Lancée par une coalition de professeurs d’université, une pétition réclamant le maintien du nucléaire en Allemagne vient par ailleurs de récolter plus de 57 000 signatures. Elle dépasse le seuil des 50 000 signataires, qui lui permet d’être examinée par la commission des pétitions du Bundestag.

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