La « petite Belgique » ne dispose que de 65 km de côtes. Et pourtant avec 2,2 GW produits par ses éoliennes en mer du Nord, le pays est actuellement le cinquième producteur mondial d’énergie éolienne offshore. Il y a quelques jours, le gouvernement fédéral s’est accordé pour tripler cette puissance et la porter à 5,8 GW. Un objectif ambitieux qui nécessitera de renforcer les réseaux à haute tension, tant en Flandre qu’en Wallonie.

Les 9 parcs offshore belges, en service depuis 2020, sont accolés à la limite des eaux territoriales néerlandaises (voir carte ci-dessous). D’une capacité de 2,2 GW ils peuvent fournir une quantité d’électricité correspondant à la consommation d’environ 2,2 millions de ménages.
Depuis tout un temps, le gouvernement a prévu l’ouverture d’une deuxième zone, dénommée « Princesse Elisabeth », accolée cette fois aux eaux territoriales françaises. D’une capacité totale initialement estimée à 2 GW, les concessions seront attribuées par appel d’offres et les nouveaux parcs construits dans la seconde moitié de la décennie.

Capacité accrue grâce aux progrès technologiques

La ministre de l’Énergie, Tinne Van der Straeten, et son collègue en charge du portefeuille de la mer du Nord, Vincent Van Quickenborne, ont reçu, ce vendredi, l’approbation du Conseil des ministres pour placer la barre plus haut. « Grâce à l’îlot énergétique que nous allons construire et à des éoliennes de plus grande puissance pouvant atteindre 17 MW, nous allons presque tripler notre capacité pour atteindre 5,8 GW, ce qui représente 25% à 30% de la consommation totale d’électricité de notre pays » a déclaré la ministre écologiste.

Pour fonder sa décision, l’exécutif s’appuie sur des études relatives à l’exploitation de la nouvelle zone. Sa superficie ne sera pas étendue mais sa capacité de production sera accrue grâce aux progrès technologiques dans la construction des turbines et la mise sur le marché de machines plus puissantes. Ainsi l’Haliade-X de General Electric a récemment été « boostée » à 14 MW. Le danois Vestas, numéro 1 mondial du secteur, a dévoilé au début de cette année, un projet de 15 MW dont la production en série devrait débuter en 2024. Quant au constructeur chinois MingYang, il a annoncé durant l’été dernier, le développement d’une turbine offshore de 16 MW. La fabrication d’un premier prototype devrait commencer en 2022 pour une mise en service en 2023. La production commerciale de ce modèle est également prévue au premier semestre de 2024.

Les organisations de protection de la nature et de l’environnement (Greenpeace, Inter-Environnement Wallonie et WWF-Belgique, notamment) ont réagi positivement à la décision gouvernementale. « C’est un signal positif à l’aube du Sommet international sur le climat (COP26), qui débutera dans deux semaines à Glasgow », ont-elles déclaré. Cependant, ces ONG soulignent que des mesures sont nécessaires pour limiter l’impact sur le milieu marin, car une grande partie de la zone est située dans un espace protégé Natura 2000.

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Une île énergétique

La construction d’une île énergétique dans la zone Princesse Elisabeth, où l’électricité des différents parcs sera rassemblée pour être ensuite acheminée à terre, est un élément essentiel de ce projet. L’îlot artificiel en béton permettra d’éviter une connexion indépendante, et coûteuse, pour chaque concession, et offre également la possibilité de se connecter avec les pays voisins. Lorsque les parcs éoliens ne fonctionnent pas, les mêmes câbles peuvent par exemple être utilisés pour échanger de l’énergie avec le Royaume-Uni ou le Danemark.

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10 000 nouveaux emplois

Selon la Belgian Offshore Platform (BOP), la fédération des acteurs belges de l’éolien en mer, les études montrent que le développement de l’éolien offshore en Belgique pourrait créer jusqu’à 10.000 nouveaux emplois et contribuer à concurrence de 1,5 milliard d’euros au produit intérieur brut du pays. En outre, avec près de 6 GW d’éolien en mer, ces nouveaux parcs permettront d’éviter par rapport à l’objectif précédent, l’émission annuelle de 6,1 millions de tonnes supplémentaires de CO2. Cela correspond à l’empreinte carbone de 380.000 habitants.

Renforcement du réseau

Le projet nécessitera un renforcement du réseau électrique pour acheminer l’électricité produite en mers à travers tout le pays. Deux nouvelles lignes électriques aériennes à haute tension (380 kV) sont prévues, l’une en Wallonie (la Boucle du Hainaut), l’autre en Flandre (le raccordement Vesalius).

Elia, le gestionnaire du réseau à haute tension, espère pouvoir commencer les travaux fin 2023, lesquels devraient durer 3 ans. Mais cet investissement d’un demi-milliard d’euros se heurte à l’opposition virulente d’une partie des populations locales. Les permis n’ont pas encore été délivrés et pourraient en outre faire l’objet de recours. Le gouvernement fédéral est impuissant car ce sont les Régions (Wallonie et Flandre) qui sont compétentes en la matière. Elia redoute que les retards dans les procédures d’octroi des permis ne compromettent le calendrier et repousse la mise en service des nouveaux parcs offshore.

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