L’effondrement du prix des batteries, depuis plus d’un an, est une bonne nouvelle pour tout le monde… ou presque. Cette situation pourrait, en effet, mettre à mal l’économie circulaire qui se développait largement autour des batteries de seconde vie. 

Pour répondre à la problématique grandissante du stockage de l’électricité, de nombreuses entreprises ont fait le choix, ces dernières années, de s’intéresser au reconditionnement des batteries, et en particulier de celles issues du secteur automobile. Redonner une seconde vie à ces batteries a permis de faire baisser le coût des solutions de stockage stationnaires, tout en favorisant le développement d’une économie circulaire et durable. Néanmoins, depuis début 2023, le prix des batteries neuves ne fait que chuter, ce qui pourrait bouleverser tout cet écosystème créé autour du réemploi des batteries.

L’économie circulaire et le réemploi favorisés par le prix élevé des batteries neuves

En Europe, on retrouve pas moins de 79 grandes entreprises associées à des initiatives de reconditionnement et de réemploi de batteries. On pense, pour les plus connus, au groupe Renault en France, mais également BMW, Honda, Audi et autres Mercedes. Dans la plupart des cas, cette économie circulaire consiste à récupérer des batteries issues de l’automobile, pour lesquelles les contraintes de performances sont très élevées, pour les réemployer dans des secteurs où les exigences de densité énergétique et de performance sont moindres.

À Quimper, par exemple, l’entreprise Entech pilote actuellement un projet destiné à créer une chaîne de valorisation et de réutilisation de ces batteries de voiture électrique. En partenariat avec Stellantis, le projet ABR (Automative Batteries Reuse) travaille sur la réutilisation de batteries de Citroën C3 ou de Peugeot 208. Elles pourraient ensuite, par exemple, équiper des installations photovoltaïques. Du côté du Royaume-Uni, le groupe JLR (Jaguar Land Rover) et la startup Allye Energy collaborent pour mettre en œuvre un système de stockage d’énergie pouvant être déplacé. Sur cette batterie stationnaire (BESS), les 270 kWh de capacité seront obtenus grâce à des batteries usagées de Range Rover.

À plus grande échelle, l’entreprise allemande Fenecon vient d’inaugurer une usine spécialisée dans le retraitement de batteries destinées à une seconde vie. Le site, qui a nécessité un investissement de 25 millions d’euros, devrait permettre la production de 500 grandes unités de stockage par an, ainsi que 30 000 unités de stockage domestiques, par an également.

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Cette chute des prix va-t-elle entraîner la désorganisation de toute une filière ?

Si toutes ces initiatives sont louables d’un point de vue environnemental, elles ne sont aussi nombreuses que parce qu’elles sont intéressantes économiquement. Or, la récente baisse du prix des batteries LFP pourrait changer la donne et menacer l’équilibre de cette filière en plein développement.

C’est notamment ce qu’il se passe pour la startup finlandaise Cactos. Celle-ci avait présenté, en 2022, un projet de reconversion d’anciennes batteries Tesla en BESS. Avec ce concept, l’entreprise est même parvenue à lever près de 26 millions d’euros en 2023. Pourtant, Oskari Jaakkola, le CEO de l’entreprise a récemment indiqué, sur le site internet Energy Storage, que les batteries neuves étaient désormais plus intéressantes d’un point de vue financier. De ce fait, l’entreprise a changé son fusil d’épaule, et équipe 80 à 90 % de sa production de batteries neuves. En outre, Oskari Jaakkola a même déclaré que les 10 à 20 % de BESS fabriquées à partir de batteries de seconde vie étaient maintenues pour répondre à des besoins précis de certaines entreprises en matière de politique environnementale.

De ce fait, l’optimisation des techniques de reconditionnement des batteries, et la baisse des coûts qui y sont associés, vont devenir des enjeux fondamentaux pour espérer préserver l’équilibre du secteur des batteries de seconde vie.