Alors qu’un important épisode venteux traversait la France le 29 décembre 2022, de nombreuses éoliennes ont dû réduire leur puissance. Un mécanisme surprenant au premier abord, mais tout à fait logique dans un contexte de faible consommation électrique.

La consommation nationale d’électricité est traditionnellement basse durant les fêtes de fin d’année. Cette année, elle a toutefois été particulièrement faible, en raison de conditions météorologiques très favorables. L’épisode d’extrême « douceur » installé sur l’hexagone depuis quelques semaines permet d’afficher une consommation électrique comparable à celle d’un début de printemps.

Ainsi, le pic de consommation du 29 décembre s’est élevé à 57 384 MW, soit presque autant que le pic constaté le 14 avril 2022 (55 855 MW). Mais alors que la demande en électricité est faible, le vent souffle avec intensité. Le parc éolien national tourne à haut régime depuis le 28 décembre : son facteur de charge oscille entre 50 et 80 %, contre 26 % en moyenne.

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Comment écouler les excédents ?

Pour gérer cette production excédentaire, la France exporte de l’électricité vers ses voisins, pompe de l’eau dans les STEP, réduit au maximum le fonctionnement de ses centrales au gaz et charbon et abaisse la puissance de ses réacteurs nucléaires. Certaines nuits, ces mesures ne suffisent pas. La production reste élevée, mais la consommation s’effondre. Elle entraîne les prix dans sa chute. L’électricité peut ainsi afficher des prix négatifs sur le marché « SPOT » (marché de gros).

C’est ce qui est arrivé dans la nuit du 29 décembre en France, comme dans plusieurs pays européens où la production éolienne était élevée. Dans l’hexagone, le prix de l’électricité est devenu négatif entre 2 h et 5 h du matin (-0,05 à -1,44 €/MWh). Produire du courant n’ayant plus aucun intérêt financier à cet instant, de nombreux parcs éoliens ont fortement réduit leur puissance.

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Appelée « curtailment » (réduction en anglais), cette technique consiste simplement à réguler à la baisse la puissance délivrée par les éoliennes en fonction de la demande et du prix de l’électricité. Pour cela, les turbines orientent leurs pales pour diminuer la prise au vent, et donc la vitesse de rotation. Certaines peuvent même s’arrêter si nécessaire. L’opération est entièrement réalisée à distance par les opérateurs.

À gauche : détail de la puissance éolienne en France le matin du 29/12/22, à droite : puissance par filière le même jour. / Données Eco2mix RTE.

Il n’y a pas assez de capacité de stockage

Stabilisée autour de 14,5 GW, la puissance éolienne a ainsi chuté à 11,5 GW le 29 décembre entre 2 h et 6 h, avant de retrouver son niveau normal. La France s’est assise sur une dizaine de gigawattheures d’électricité bas-carbone, faute de solutions de stockage suffisantes.

Un parc de STEP, batteries et véhicules électriques en V2G plus étoffé aurait permis d’absorber cette quantité de courant. Des électrolyseurs auraient également pu profiter des prix très bas pour produire de l’hydrogène vert bon marché. Ces gigawattheures dont nous n’avons pas besoin aujourd’hui pourraient nous manquer au retour d’une météo véritablement hivernale sur l’Europe de l’Ouest.

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