Varsovie a annoncé fin août avoir saisi la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) pour remettre en cause plusieurs mesures adoptées par l’UE sur la transition énergétique. Très dépendant des énergies fossiles, la Pologne souhaiterait un assouplissement, quitte à poursuivre ses émissions faramineuses de CO2.

Si la Pologne a fait d’énormes efforts en matière de transition énergétique entre 2010 et 2020 en triplant sa production d’énergies renouvelables, il lui reste encore du chemin à parcourir pour atteindre les objectifs fixés par la Commission européenne en la matière. En cause, la place du charbon qui occupe toujours une place prépondérante dans son mix énergétique : 40,6 % de la consommation d’énergie primaire du pays qui provient de cette filière (en 2020).

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C’est sans doute une des raisons qui explique que le pays se montre très pointilleux sur les engagements pris en matière climatique au niveau de l’UE. Dans ce contexte, Varsovie vient d’annoncer avoir saisi la CJUE afin de contester certaines mesures prises dans le paquet « Fit For 55 ». Il s’agit d’un bouquet de 12 propositions faites par la Commission européenne en juillet 2021 dans le but de réduire de 55 % les émissions de GES des États membres d’ici 2030. Parmi ces mesures, on retrouve :

  • L’interdiction de mise sur le marché des voitures thermiques neuves en 2035.
  • Le développement de points de distribution de carburants alternatifs avec notamment une augmentation des stations de recharge pour les véhicules électriques.
  • Une refonte du marché du carbone.
  • Des mesures en matière de carburants durables pour les secteurs maritime et de l’aviation.
  • Un doublement de la part des énergies renouvelables au sein des États membres.

Changement climatique vs sécurité énergétique ?

Pour la Pologne, plusieurs de ces mesures sont contestables, d’abord parce qu’elles auraient dû être prises à l’unanimité et non à la majorité des voix des États membres. La Pologne craint en réalité les répercussions de ces nouvelles réglementations sur son économie. Elle conteste particulièrement l’interdiction des véhicules thermiques, qui entraînera des conséquences sur le secteur automobile polonais. En outre, les efforts demandés aux États membres pour réduire leurs émissions représentent un réel challenge pour la Pologne, fortement dépendante du charbon. Selon les dirigeants polonais, les mesures européennes constituent un obstacle à sa sécurité énergétique.

De plus, pour Varsovie, les études d’impact qui ont conduit à l’adoption de ces mesures auraient été incomplètes et obsolètes puisqu’elles ont été réalisées avant le conflit en Ukraine et la crise énergétique qui a suivi. Dans un tweet, la ministre polonaise du climat Anna Moskwa s’est montrée particulièrement agacée : « L’Union européenne veut-elle décider de manière autoritaire quel type de véhicule les Polonais conduiront et si les prix de l’énergie augmenteront en Pologne ? Le gouvernement polonais n’acceptera pas le diktat de Bruxelles ».

Si Varsovie espère entraîner d’autres pays dans son action contre la Commission européenne, le bras de fer entre ces deux entités n’est pas nouveau. En effet, la Commission européenne s’est déjà dressée plusieurs fois ces dernières années contre les dérives autoritaires de la Pologne, contraires aux valeurs de l’UE.