L’énergie solaire est illimitée. Mais exploiter son potentiel considérable à très grande échelle est peut-être plus compliqué qu’il ne parait. Des chercheurs estiment, en effet, que selon leur taille, les fermes solaires des uns pourraient finir par priver les autres de la ressource.

Les nuages, la pluie, la neige, le brouillard. Toutes ces conditions météorologiques peuvent affecter la production des panneaux solaires photovoltaïques. Les rendements peuvent parfois chuter de manière dramatique. Certains évoquent le chiffre de 75 %. Et, c’est peut-être encore moins connu, mais c’est le cas aussi lorsque les températures sont élevées.

Ainsi, une étude parue dans Communications, Earth & Environment prévient déjà que le changement climatique anthropique aura un effet sur la production solaire photovoltaïque. En affectant la couverture nuageuse, notamment, il devrait diminuer la quantité de rayonnement solaire que recevra à l’avenir l’Europe du Nord, par exemple. Le reste du continent devrait, au contraire, être plus favorisé. C’est une équipe internationale de chercheurs qui attire aujourd’hui l’attention sur le fait que des parcs solaires qui deviendraient suffisamment grands pourraient, eux aussi, affecter les conditions météorologiques des régions environnantes et, de fait, leur production photovoltaïque.

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Des fermes solaires qui perturberaient la météo

Comment ? Pour comprendre, il faut savoir qu’un panneau solaire photovoltaïque est de couleur sombre. Il absorbe donc beaucoup de chaleur. Bien plus, par exemple, que le sable du désert qui, lui, a tendance à renvoyer la chaleur vers l’espace. C’est l’exemple du sable du désert qui est cité parce que les scientifiques ont utilisé un modèle informatique pour simuler l’impact d’hypothétiques fermes solaires gigantesques qui couvriraient 20 % du Sahara. Et les modèles montrent que lesdites fermes constitueraient des sources de chaleur suffisantes à réorganiser les modèles climatiques mondiaux.

Résultat : des précipitations qui s’éloigneraient des tropiques et un désert qui deviendrait plus vert. La couverture nuageuse serait également affectée. Le Moyen-Orient, le sud de l’Europe, l’Inde, l’est de la Chine, l’Australie et le sud-ouest des États-Unis deviendraient plus gris et moins capables de produire de l’électricité solaire. L’Amérique centrale et du Sud, les Caraïbes, le centre et l’est des États-Unis, la Scandinavie et l’Afrique du Sud profiteraient en revanche de la situation pour en produire plus.

Des résultats similaires ont été rendus par les modèles lorsque les chercheurs ont simulé des fermes solaires dans d’autres régions du monde. De gigantesques fermes solaires installées en Australie rendraient ainsi les étés du Royaume-Uni, par exemple, bien plus nuageux que ce qu’ils sont aujourd’hui.

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Favoriser la collaboration internationale dans le photovoltaïque

Bien sûr, les changements annoncés demeurent de l’ordre de quelques pour cent au maximum. Y compris dans des scénarios extrêmes d’un Sahara couvert à 20 % par des panneaux solaires photovoltaïques. Si la zone est réduite à un chiffre plus réaliste, les effets redeviennent, pour la plupart, assez négligeables, reconnaissent les chercheurs.

Mais l’expérience de pensée reste intéressante, assurent-ils aussi. Car toutes les régions veulent aujourd’hui investir dans l’énergie solaire. Or ces travaux montrent que le photovoltaïque aussi pourrait servir quelques manœuvres géopolitiques si des projets de taille dans un pays venaient menacer le potentiel de production hors de ses propres frontières. D’où, encore et toujours, l’importance de favoriser la collaboration et le partage de connaissances entre les nations ainsi que la planification spatiale des futures fermes photovoltaïques pour garantir que les bénéfices de l’énergie solaire restent partagés équitablement dans le monde entier.