Des chercheurs des universités d’Aarhus au Danemark et de Durham en Angleterre ont démontré à l’aide de simulations numériques basées sur les lois de la dynamique des fluides que des éoliennes à quatre rotors installés sur un même mât présentent un certain nombre d’avantages. Le fabricant danois Vestas avait déjà construit et testé une éolienne de ce type en 2016. Cette technologie pourrait-elle s’imposer ?

Les éoliennes modernes sont équipées de pales toujours plus longues installées au sommet de mâts toujours plus haut. Cela se comprend lorsqu’on sait que l’énergie produite est proportionnelle à la surface balayée par le rotor et que le vent est plus fort à mesure que l’on prend de la hauteur par rapport au plancher des vaches. Fabriquées à Cherbourg, les pales de l’Haliade-X – une éolienne offshore de 12 MW – ont une longueur de 107 m ! Et le fabricant Siemens Gamesa projette le développement d’une turbine encore plus géante.

Mais il y a une limite à ce gigantisme. Le transport et le montage de ces longues pales fabriquées d’un seul tenant est notamment de plus en plus problématique. Dès lors les scientifiques cherchent maintenant une autre voie pour améliorer les performances et la rentabilité de ces machines.

Les éoliennes à 4 rotors seraient les plus efficaces

Lorsque le vent traverse le rotor d’une éolienne, il cède une partie de son énergie. A l’arrière de la turbine, le vent est donc moins fort et il se forme des turbulences. Les autres éoliennes du parc qui se trouvent dans le sillage des premières par rapport à la direction du vent produisent donc moins d’électricité et elles sont plus exposées au risque de panne à cause des contraintes matérielles et des vibrations provoquées par ces turbulences. C’est ce qu’on appelle l’effet de sillage.

Des chercheurs des universités d’Aarhus au Danemark et de Durham en Angleterre ont exploré la voie des éoliennes multi-rotors. « Notre étude menée à l’aide de simulations numériques basées sur les lois de la dynamique des fluides a montré qu’à l’aval des éoliennes équipées de plusieurs rotors, il y a moins de turbulences et que le vent laminaire se rétablit plus vite. Cela signifie que les éoliennes placées dans le sillage des premières produiront plus d’énergie et que les coûts de maintenance seront réduits » explique Mahdi Abkar, professeur à la faculté polytechnique de l’Université d’Aarhus et expert en physique des écoulements et en turbulence.
«Nous avons exploré plusieurs géométries et dynamiques de turbines multi-rotors et nous avons constaté que la construction optimale est une éolienne avec quatre rotors aussi éloignés que possible les uns des autres» poursuit Mahdi Abkar.

Selon les calculs des scientifiques, une éolienne équipée de 4 rotors coûterait, à puissance égale, 15% moins cher que les machines classiques à trois pales installées aujourd’hui. Principale raison : elles seraient plus légères car leur construction requiert moins de matière, et leur transport ainsi que le montage des pales serait moins coûteux. En outre, elles produiraient 2% d’énergie en plus.

Un prototype construit et testé par Vestas en 2016

L’idée d’une éolienne multi-rotor n’est pas nouvelle : le fabricant danois Vestas, leader mondial du marché éolien l’avait étudiée dès les années 1990. En 2016 Vestas avait même développé, construit et testé pendant deux ans un prototype de 900 kW installé sur le site de l’Université technique du Danemark près de Roskilde. L’essai a été concluant puisque le rendement s’est avéré supérieur à celui d’une machine classique de puissance similaire. Pourtant Vestas n’a jamais commercialisé cette technologie, sans en expliquer la raison.

En 2016 le fabricant Vestas a construit et testé un prototype à 4 rotors


Le fabricant néerlandais Lagerwey Wind, racheté en 2017 par l’allemand Enercon avait aussi testé des éoliennes à cinq et même sept rotors mais il a ensuite abandonné cette piste.

Signalons enfin que l’énergéticien allemand EnBW et le développeur éolien Aerodyn testent actuellement un prototype d’éolienne flottante à 2 rotors, baptisé Nezzy². Il s’agit d’un modèle réduit d’une hauteur de 18 mètres.