Nous connaissions déjà les intentions danoises de construction d’îlots artificiels parsemés d’éoliennes. Mais ceux-ci ne devraient pas être opérationnels avant 2030, voire 2033. Les projets dévoilés récemment par le gouvernement belge dans le cadre de son plan de relance pourrait bien faire du « plat pays », le premier état à mettre en service une île énergétique.

« L’énergie est au cœur de notre relance et nous avons choisi d’investir dans l’infrastructure pour réussir la transition énergétique » explique Tinne Van der Straeten, la ministre belge de l’énergie. « Nous allons par exemple construire une île énergétique en mer du Nord pour connecter les nouveaux parcs éoliens prévus à l’ouest de nos eaux territoriales. Elle pourrait être opérationnelle avant août 2026.  Ce sera la première en Europe » ajoute-t-elle.

Ce nouveau projet ne doit pas être confondu avec l’atoll artificiel que l’entreprise de dragage DEME rêvait d’installer aux large d’Ostende pour stocker l’électricité excédentaire fournie par les parcs offshore belges. Il s’agissait d’une sorte de « STEP[1] marine ».

Au centre de l’île, un immense réservoir devait être creusé. En cas de surplus d’énergie, des pompes l’auraient vidé en versant l’eau dans la mer. En ouvrant les vannes quand la demande excède la production, l’eau de mer, en s’engouffrant dans l’atoll, aurait actionné des turbines productrices d’électricité. Malheureusement pour DEME, le gouvernement flamand a torpillé ce projet en refusant de le subsidier.

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Un hub énergétique

La nouvelle île énergétique multifonctionnelle devrait être construite dans la partie belge de la mer du Nord accolée aux eaux territoriales françaises. Située à environ 40 km de la côte, elle ne sera pas visible depuis les plages. Il est prévu d’y installer 2,1 gigawatts (GW) d’éolien marin sur 280 km2, une capacité équivalente à celle des parcs offshore belges déjà en service côté hollandais.  De quoi produire, lorsque le vent souffle bien fort, autant que deux réacteurs nucléaires fonctionnant à pleine puissance.

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« Ce sera un hub énergétique, une plaque tournante » nous apprend Tinne van der Straeten. « Elle permettra de raccorder nos parcs marins au continent, mais aussi d’importer ou d’exporter de l’énergie par des interconnexions avec les pays voisins ».
Une liaison sous-marine à haute tension avec le Danemark est déjà à l’étude. Nous savons en effet qu’a Copenhague, le gouvernement projette la construction d’ici 2030 de 2 îles énergétiques peuplées d’éoliennes, l’une dans la Mer du Nord, l’autre dans la Baltique. De quoi alimenter les besoins en électricité de 10 millions de ménages. « Quand les danois auront trop d’électricité, nous pourrons en importer via notre île, et vice-versa » précise la ministre.

Selon Elia, le gestionnaire du réseau belge de transport d’électricité, « de telles interconnexions avec des Etats qui ne sont pas nos voisins immédiats permettraient de profiter d’une électricité renouvelable au meilleur prix, mais aussi de pallier, en partie du moins, à la variabilité de la production éolienne, en répartissant les sources d’approvisionnement sur des zones bénéficiant de conditions météorologiques différentes ».

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Une île multifonctionnelle

L’îlot belge s’étendra sur cinq hectares, mais ne rêvez pas de plages paradisiaques, de cocotiers ou de villages touristiques. Ce sera avant tout un espace fonctionnel. Trois hectares seront réservés aux interconnexions. Les deux autres pourront accueillir du stockage par batterie, par exemple, ainsi que de la production d’hydrogène vert. Des installations logistiques pour les équipes d’exploitation et de maintenance des parcs offshore, de même que le placement d’antennes 5G sont également évoquées. Ces options ne sont toutefois pas définitives et doivent encore être validées car les constructions en mer sont plus coûteuses que sur le continent.

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Financement européen

Le gouvernement fédéral estime que le projet devrait coûter 420 millions d’euros. 100 millions seront prélevés dans l’enveloppe des 5,9 milliards accordée par l’Europe à la Belgique pour financer son plan de relance post-covid.  

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[1] STEP : Station de Transfert d’Energie par Pompage