Selon un document préparatoire à la loi de Programmation Pluriannuelle de l’Énergie (PPE), le gouvernement songerait à réguler l’utilisation de la biomasse en hiérarchisant ses usages. Une mesure qui semble indispensable pour que la biomasse reste une véritable énergie renouvelable.

L’actualité se multiplie à l’approche de la publication du projet de loi de Programmation Pluriannuelle de l’Énergie. Si les principaux acteurs du marché de l’énergie comme RTE ou Engie apportent leur vision, c’est, ici, un document de travail publié par Antoine Pellion, Secrétaire d’État à la planification écologique, qui a fait réagir. On peut, en effet, y lire que la filière de la biomasse devrait se trouver sous tension dès 2030, du fait notamment d’un déséquilibre entre consommation et production, mais aussi d’une forte dépendance aux importations. Face à cette situation, le gouvernement propose une hiérarchisation des usages de la biomasse, et le développement d’alternatives dès que cela est possible avec, par exemple, la géothermie de surface, le solaire thermique ou encore l’hydrogène, selon les usages.

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Un « merit order » qui se décline en trois catégories

La hiérarchie proposée par le gouvernement définit des usages prioritaires, des usages à interroger ainsi que des usages à réduire. L’objectif de cette classification est de pouvoir identifier avec précision les filières pour lesquelles l’utilisation de la biomasse est incontournable, et les filières pour lesquelles elle pourrait être évitée.

Dans les usages prioritaires, on retrouve tout d’abord l’alimentation humaine et animale qui ne doivent pas être entravés par la production d’énergie. Il en est de même pour le développement des forêts et des produits fabriqués en bois qui ont un rôle de puits carbone indispensable. Le document indique également que la quantité de biomasse nécessaire à la fertilisation des sols devra être déterminée et préservée.

Ensuite, la priorité est donnée à toutes les industries qui nécessitent de très hautes températures. Pour celles-ci, il n’y a en effet pas encore d’alternative décarbonée viable. La biomasse pourra également être utilisée pour les réseaux de chaleur, en parallèle à la géothermie. Pour finir, grâce à la création de circuits très courts, la biomasse pourrait répondre aux besoins énergétiques des agriculteurs.

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Dans les usages à interroger, le gouvernement a identifié des cas spécifiques pour lesquels la biomasse pourrait être une alternative envisageable. On retrouve par exemple la production d’électricité pour les ZNI (Zones Non Interconnectées) comme la Corse, les DOM et les COM. Dans le domaine du transport routier, l’utilisation de biocarburant est questionnée. Selon le gouvernement, il serait en effet préférable de privilégier l’électrification du parc ainsi que le développement de l’hydrogène. Les biocarburants issus de la biomasse pourraient être une solution pour le trafic aérien et maritime. Néanmoins, une réduction du trafic doit être envisagée pour limiter les besoins en énergie.

Du côté de l’industrie, les besoins en basse température pourraient être assurés par d’autres alternatives décarbonées comme les PAC ou le solaire thermique. Enfin, la production de chauffage et d’eau chaude sanitaire pour les particuliers pourra continuer à se faire grâce à la biomasse (chaudière à pellets, poêle à bois, etc). Néanmoins, il paraît désormais impératif que ces appareils soient performants (après 2005). Ces équipements pourront également remplacer les chaudières au gaz ou au fioul en zone rurale.

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Enfin, la production d’électricité, en métropole, issue de biomasse devra être réduite. Les pics de production devront être obtenus par d’autres énergies comme l’hydrogène. Dans le résidentiel et le tertiaire, tous les appareils de cuisson au gaz devront être remplacés par des alternatives électriques.

La biomasse, résultat d’un équilibre fragile

Si de telles précautions sont employées avec l’usage de la biomasse, c’est qu’elle fait partie intégrante d’un cycle qui repose sur le vivant. En effet, lors de la combustion de biomasse, qu’elle soit solide (comme le bois) ou gazeuse (gaz issus de la fermentation de matières vivantes), le CO2 qui est rejeté dans l’atmosphère correspond à celui qui avait été capturé par l’organisme au cours de sa vie, qu’il s’agisse d’un arbre ou d’une culture comme le blé, le colza, etc.

Ainsi, la consommation d’une trop grande quantité de matière organique peut entraîner un dérèglement du cycle, provoquer des émissions de CO2 et avoir un impact négatif sur l’environnement. Aux Etats-Unis et au Canada, par exemple, la production colossale de granulés de bois pèse lourd sur l’environnement entraînant déforestation massive, pollution et émissions de CO2. Du côté de la Guyane française, la production d’énergie à partir de la biomasse pourrait porter atteinte à la forêt amazonienne. Dans ce contexte, il est indispensable d’encadrer la filière de la biomasse pour privilégier un usage raisonné ainsi que des circuits courts.

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