Cet été, Révolution Énergétique se plonge dans les sites de production d’électricité bas-carbone les plus puissants du monde. Ces barrages, parcs éoliens, fermes solaires, centrales nucléaires, centrales à biomasse et autres systèmes de stockage peuvent afficher des dimensions considérables. Cette semaine, nous découvrons les 3 centrales nucléaires les plus puissantes du monde.

Bien que très controversée, l’énergie nucléaire est un moyen redoutablement efficace pour produire de gigantesques quantités d’électricité bas-carbone. Pourtant, en 2021, l’atome représentait seulement 10 % de la production électrique mondiale, selon l’Agence internationale de l’énergie (IEA). L’organisation estime que cette filière a permis d’éviter le rejet de 55 milliards de tonnes de CO2 entre 1970 et aujourd’hui, soit près de 2 fois les émissions annuelles mondiales de ce gaz à effet de serre.

Malgré cet avantage considérable, le nucléaire pâtit entre autres de l’anxiété générale provoquée par les accidents de Tchernobyl et Fukushima, mais aussi par l’absence de pédagogie auprès du public, laissant place à de nombreux préjugés sur le fonctionnement de la technologie.

Elle souffre également de son coût élevé, de l’instabilité politique et de son temps de déploiement particulièrement lent. L’ambition perdue pour le nucléaire civil fera donc chuter la capacité mondiale installée de 280 GW en 2018 à seulement 90 GW en 2040, selon l’IEA.

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1 – Centrale nucléaire de Kashiwazaki-Kariwa, Japon

Puissance (GW) Prod. annuelle (TWh/an) Durée des travaux
7,965 0 (depuis 2012) 1980 – 1997

Une partie de la centrale nucléaire de Kashiwazaki-Kariwa / Image : IAEA – TEPCO.

La centrale nucléaire la plus puissante du monde est à l’arrêt complet depuis plus de 10 ans. Les 7 réacteurs qui totalisent près de 8 GW de puissance installée, ne produisent plus le moindre kilowattheure depuis 2012.

La centrale de Kashiwazaki-Kariwa a en effet été fermée peu de temps après l’accident de Fukushima. Si elle n’a pas été endommagée par le séisme suivi du tsunami en 2011, le gouvernement a ordonné sa fermeture afin de réaliser d’importants travaux de mise en sécurité.

Une digue anti-vagues haute de 15 mètres, des enceintes anti-submersion autour des bâtiments réacteurs, de nouveaux systèmes d’injection d’eau pour le refroidissement de secours et un renforcement de l’alimentation électrique d’urgence ont notamment été réalisés.

Désormais mieux paré contre les tsunamis, le site pourrait redémarrer un premier réacteur en octobre 2022 au plus tôt. Un second serait relancé en avril 2024 avant la remise en service complète de la centrale prévue pour 2028, selon un plan proposé par TEPCO, l’opérateur, au gouvernement japonais.

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2 – Centrale nucléaire de Kori, Corée du Sud

Puissance (GW) Prod. annuelle (TWh/an) Durée des travaux
7,489 49,5 (en 2021) 1972 – En cours

Deux réacteurs de la centrale nucléaire de Kori / Image : IAEA – Korea Shin-Kori NPP.

En 45 ans, la centrale nucléaire de Kori n’a jamais cessé de s’étendre. Si elle ne comptait qu’un seul réacteur en service à son ouverture en 1978, elle en exploite aujourd’hui 7 et en opérera 9 d’ici quelques années. Le premier réacteur, d’une modeste puissance électrique de 576 MW, a été définitivement arrêté par sécurité en 2017.

Aujourd’hui, le site produit grâce à 3 réacteurs relativement anciens, mis en service entre 1983 et 1985 et 4 réacteurs récents, ouverts entre 2011 et 2019. Les travaux pour deux réacteurs supplémentaires ont été lancés en 2017 et 2018 et devraient être achevés en 2023 et 2024.

Étendu sur près de 4 km de large au bord de la mer Jaune, le vaste complexe intègre notamment la « Kepco International Nuclear Graduate School », une grande université du nucléaire située à proximité immédiate des installations.

Lorsqu’ils seront en service, et si les plus vieux réacteurs ne sont pas arrêtés entretemps conformément à leur durée de vie initiale de 40 ans, la centrale nucléaire de Kori deviendra ainsi la plus puissante centrale nucléaire du monde, avec une puissance installée de 10,289 GW. C’est près de 2 fois celle de Gravelines (5,460 GW), qui est la plus grande centrale nucléaire de France.

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3 – Centrale nucléaire de Hongyanhe, Chine

Puissance (GW) Prod. annuelle (TWh/an) Durée des travaux
6,366 38,17 (en 2021) 2007 – 2022

Deux réacteurs de la centrale nucléaire de Hongyanhe / Image : CGTN.

Depuis la mise en service de son dernier réacteur en avril 2022, la centrale nucléaire de Hongyanhe en Chine est la troisième plus puissante du monde. Elle détrône de 8 tous petits mégawatts la centrale de Bruce au Canada (6,358 GW). Située en bordure de la mer Jaune, le site a lancé 6 réacteurs d’une puissance électrique nette de 1 061 MW, entre 2013 et 2022.

Il s’agit de réacteurs de type CPR-1000, développés par la Chine à partir du modèle français de 900 MW conçu par Framatome. Le site a produit 38,17 TWh en 2021, selon le site de la Word Nuclear Association, sachant que le 5e réacteur a été mis en service en juin 2021 et le 6e était toujours en chantier.

La centrale nucléaire de Bruce au Canada, presque ex-aequo

L’écart de puissance entre la centrale de Hongyanhe en Chine et celle de Bruce au Canada étant très faible, nous pouvons également évoquer cette dernière. Située sur les rives du lac Huron en Ontario, la centrale nucléaire de Bruce dispose de 2 séries de 4 réacteurs d’une puissance unitaire de 774 à 817 MW. Le site se démarque par l’utilisation de la technologie « CANDU » (CANada Deutérium Uranium) développée par le pays.

Contrairement à la plupart des réacteurs nucléaires déployés dans le monde, qui utilisent de l’uranium enrichi comme combustible et fonctionnent à l’eau pressurisée, les 8 réacteurs CANDU de la centrale de Bruce carburent à l’uranium naturel et sont refroidis à l’eau lourde pressurisée (du deutérium).

Cette technologie permet de réduire les coûts financiers, énergétiques et environnementaux liés à l’enrichissement de l’uranium. Elle autorise également l’emploi de combustibles recyclés tels que le MOX et même certains déchets nucléaires ultimes jusque-là voués à être stockés éternellement. Les réacteurs CANDU produisent toutefois de grandes quantités de tritium, un contaminant radioactif qui s’échappe régulièrement dans l’air et l’eau et dont l’impact sanitaire et environnemental est très discuté.

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