Le risque de collision avec des oiseaux est souvent avancé par les opposants au déploiement à grande échelle des parcs éoliens. Mais une étude suggère aujourd’hui que les oiseaux marins, notamment, savent parfaitement éviter les éoliennes qui se dressent sur leur route.

Deux ans de surveillance. Plus de 10 000 vidéos. Et pas une seule collision enregistrée entre un oiseau marin et les 11 éoliennes du parc offshore d’Aberdeen (Écosse) — qui était, avec une puissance installée de 93,2 mégawatts (MW), le plus puissant au monde à sa mise en activité en 2018. Pas même le moindre quasi-accident. C’est le résultat d’une étude menée par Vattenfall — l’un des acteurs majeurs de l’éolien en mer dans le monde — en collaboration avec des organisations de protection de la nature. Regardons-y d’un peu plus près.

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En 2019, pour vérifier si les craintes des opposants à l’éolien quant aux risques de collisions sont justifiées, Vattenfall a décidé d’équiper son parc offshore d’Aberdeen de radars et d’un système d’intelligence artificielle (IA) chargés d’activer des caméras et d’identifier les espèces d’oiseaux volant dans les environs. De quoi pointer avec précision la position de chaque oiseau toutes les deux secondes et demie. Tout en intégrant des paramètres météorologiques et de turbulences créées par les pales des éoliennes.

Ce qui ressort de l’analyse des images, c’est que presque tous les oiseaux de mer suivis ont su éviter la zone. Mouettes, fous de Bassan ou encore goélands ont su se tenir à plusieurs dizaines de mètres des pales des éoliennes. Et ceux qui se sont malgré tout retrouvés à moins de 10 mètres ont opté, dans 96 % des cas, pour un vol parallèle au rotor les préservant des risques de collision.

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Les éoliennes offshores, vraiment sans danger pour les oiseaux ?

D’autres études s’étaient déjà posé la question. Elles ont montré qu’à terre, environ 95 % des oiseaux volant à proximité d’éoliennes ne s’approchent pas suffisamment près pour risquer une collision. Les rapaces seraient toutefois les plus vulnérables. Les scientifiques ont aussi pu montrer que certains oiseaux marins souffrent de la présence de parcs éoliens terrestres. Les oiseaux tropicaux d’Hawaï, par exemple.

Mais ils ont aussi pu montrer — comme l’avance Vattenfall — que les fous de Bassan, en revanche, semblent plutôt à l’aise lorsqu’il s’agit d’éviter les parcs éoliens dans leur ensemble, d’une part et plus encore, les éoliennes individuelles. Ils notent toutefois que dans la pratique, il reste compliqué de mesurer la quantité exacte d’oiseaux touchés par des éoliennes offshores — d’où le dispositif technologique déployé par Vattenfall. À terre, les chercheurs peuvent dénombrer les cadavres au sol. En mer, ils disparaissent rapidement…

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Ce que Vattenfall espère surtout maintenant, c’est que les résultats de son étude aident à accélérer les processus de consentement pour les parcs éoliens offshore. Les chercheurs, eux, rappellent que le développement rapide de l’éolien offshore présente d’autres risques pour la faune que celui de collision. Des risques comme celui du déplacement des zones de reproduction, qui doivent être considérés.

« Nous voulons tous de l’énergie éolienne, mais nous voulons également nous assurer qu’elle peut être produite de manière durable », déclarait ainsi il y a quelques mois Donald Croll, professeur à l’Université de Californie (États-Unis). Ajoutant qu’« il n’est pas nécessaire de choisir entre lutter contre le changement climatique ou protéger la faune ». Les deux pourraient se faire en parallèle. Par exemple, comme le propose son équipe, si une part du financement alloué au développement de l’éolien offshore était consacrée à mettre en œuvre de véritables stratégies de conservation. Des stratégies — bien connues des chercheurs — telles que celles qui consistent à éliminer des espèces envahissantes des sites de nidification, notamment, et qui pourraient « plus que compenser les impacts des éoliennes ».