L’installation qui a pris place sur le toit des ateliers municipaux de Bussy-la-Côte, commune meusienne associée de Val-d’Ornain, apparaît modeste. Mais son histoire est un cas d’école intéressant à développer.

37 900 kWh de production annuelle

Les 94 panneaux photovoltaïques Energetica e.Classic M HC 380 qui recouvrent 170 des 200 m2 de toiture exposée au sud (orientation sud -15°, inclinaison de 20°) affichent une puissance installée de 35,720 kWc. De quoi produire annuellement de l’ordre de 37.900 kWh, soit les besoins de 13 foyers, hors chauffage. C’est Enercoop Nord-Est qui a mené à bien ce projet.

« Notre structure qui couvre les anciennes régions Lorraine et Champagne-Ardenne est juridiquement et économiquement indépendante d’Enercoop. Elle est à voir comme un apporteur d’affaires en fourniture d’électricité pour la coopérative nationale. Notre bureau d’études en projets thermiques et énergies renouvelables s’aventure un peu plus loin, dans les départements limitrophes. Par exemple dans l’Yonne ou l’Alsace », présente Arnaud Schreiner, ingénieur thermicien chargé de projets photovoltaïques auprès d’Enercoop Nord-Est.

Une histoire particulière

« Lorsque nous avons été contacté, la commune de Val-d’Ornain poursuivait un projet de construction de salle polyvalente. L’équipe municipale souhaitait en profiter pour installer sur le toit du nouveau bâtiment une centrale solaire en éco-construction », se souvient Arnaud Schreiner.

« Un autre opérateur devait suivre ce programme. Comme il ne donnait plus de nouvelles, un des conseillers municipaux a décidé de suivre le conseil donné par sa fille de nous contacter. Elle est sociétaire et consommatrice chez Enercoop. Finalement, alors que nous avions été sollicité fin 2019, l’opérateur initial est revenu sur le projet », poursuit-il.

L’affaire aurait pu en rester là, mais la municipalité désirait tout de même travailler avec Enercoop. Le bâtiment qui sert aux ateliers techniques municipaux présente un pan de toiture bien orienté au sud.

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Ateliers techniques municipaux

« Nous avons rapidement reçu le feu vert de la municipalité, permettant de lancer mi-2020 l’étude de faisabilité technique et économique. L’orientation plein sud rendait le projet très intéressant, mais nous redoutions un raccordement compliqué au réseau. Enedis nous a finalement rassurés », détaille Arnaud Schreiner.

« Nous sommes partis sur une puissance installée inférieure à 36 kWc afin de bénéficier d’un meilleur tarif de rachat de l’électricité », souligne-t-il. Pour la tranche 9 à moins de 36 kWc, au 4e trimestre 2020, la grille qui a permis de bloquer le prix d’achat pour la commune de Val-d’Ornain indiquait 11,35 centimes d’euro le kWh, contre 9,87 centimes entre 36 et moins de 100 kWc.

Soit 1,48 centime d’écart. « Une telle différence peut apparaître minime, mais elle est au final très importante pour l’équilibre financier du projet », commente notre interlocuteur. Pour comparaison, en 1 an, le tarif d’achat pour les installations de 9 à moins de 36 kWc est descendu de 11,35 à 10,64 centimes.

Une enveloppe de 43 700 euros HT

« La manifestation spontanée d’intérêt a été déposée auprès de la commune à l’été 2020. Nous sommes partis sur un bail de 30 ans, avec un tarif de location symbolique de 1 euro par an le m2 installé », explique Arnaud Schreiner.

C’est-à-dire que la commune ne perçoit que 170 euros par an ? « Oui, tout à fait. Mais nous avons pris tous les coûts à notre charge, soit 43 700 euros hors taxes. En outre, pour cette commune engagée dans la transition énergétique, l’important est de permettre la production d’électricité propre à partir du toit des ateliers techniques municipaux », nous répond-il.

Un retour sur investissement en 10 ans

Le projet a bénéficié à hauteur de 9 404 euros de la subvention Climaxion, un programme de l’Ademe et de la région Grand Est en faveur de la transition énergétique et de l’économie circulaire.

On obtient un excédent brut d’exploitation (EBE) annuel de 3 800 euros en déduisant 500 euros de frais d’exploitation aux 4 300 euros de chiffre d’affaire.

Avec un taux de rentabilité interne (TRI) de 4,4 %, le retour sur investissement devrait intervenir au bout de 10 ans, pour un engagement qui va donc courir sur 30 ans.

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Réunion publique

« Avant de débuter les travaux, nous avons procédé à l’affichage légal qui permettait à d’autres opérateurs de se positionner sur le projet. Du fait de la taille modeste de la centrale photovoltaïque, aucun ne s’est manifesté. Nous nous limitons en général à des installations inférieures à 1 500 m2 », rapporte Arnaud Schreiner.

Dans le document projeté mi-octobre dernier lors d’une présentation publique dans la commune, le calendrier était clairement exposé. « D’ordinaire, nous programmons 1 ou 2 réunions publiques par projet. En raison de la Covid-19, nous n’avons pu en tenir qu’une, et en fin de travaux », précise-t-il.

Calendrier

L’établissement secondaire qui permet de développer le projet a été créé le 10 septembre 2020. Quinze jours plus tard, la déclaration de travaux a été déposée. Le certificat de non-opposition a été signifié un mois plus tard, soit le 25 octobre 2020. Le mois suivant a été signée la convention d’occupation temporaire en espace public.

En février 2021, la demande de raccordement a été effectuée. De mai à juin le matériel nécessaire à la construction de la centrale photovoltaïque a été réceptionné. Commencés en août, les travaux ont été achevés au début du mois d’octobre. La mise en service a été demandée pour le 5 novembre.

Associer les habitants au projet

Comment les habitants de Val-d’Ornain peuvent-ils soutenir le projet ? « Il leur faut tout d’abord devenir sociétaire d’Enercoop. Ils peuvent ensuite acquérir des parts à 100 euros l’unité, avec un fléchage vers la centrale photovoltaïque de leur commune. Ils ont aussi la possibilité d’ouvrir un compte courant d’associés qui sera rémunéré 1,5 % l’an. La souscription d’une part permet de déposer 5 000 euros en compte courant d’associés », réplique Arnaud Schreiner.

« Nous sommes toujours intéressés par ce type de réalisations, en lien avec des collectivités. Avant Val-d’Ornain, nous avons déjà mené à bien des projets citoyens photovoltaïques sur la communauté de communes des Crêtes Préardennaises, à Sedan et à Fagnières. En plus de petites infrastructures pour lesquelles nous travaillons actuellement, nous avons un vaste parc solaire au sol qui sera mis en service fin 2022 sur une ancienne base militaire. Nous avons aussi ouvert un parc éolien composé de 3 machines de 800 kW », liste-t-il.

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En Meuse et en Haute-Marne

« Nous avons présenté notre coopérative locale en 2017 en Meuse, et l’année suivante en Haute-Marne. C’est un territoire très touché par le site de Bure, avec des prises de position du Cedra, le collectif contre l’enfouissement des déchets radioactifs, et de Claude Kaiser, maire de Menil-la-Horgne. Ce dernier a établi un scénario très rapide pour la sortie du nucléaire », soulève Arnaud Schreiner.

« A chacune des fins de réunion, nous avions dit que nous aimerions poursuivre des projets citoyens dans ces 2 départements. Pour la Meuse, c’est fait avec la centrale photovoltaïque de Val-d’Ornain. En Haute-Marne, nous sommes sur un projet citoyen à Bettancourt-la-Ferrée, près de Saint-Dizier », conclut-il.

Révolution Energétique et moi-même remercions vivement Arnaud Schreiner pour sa réponse rapide à notre sollicitation d’entretien et le temps pris pour nous présenter le projet.

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