77 km2 de panneaux photovoltaïques et de capteurs à concentration flanqués d’une tour thermo-solaire de 262 mètres entourée de 70.000 miroirs orientables : lorsqu’elle sera achevée vers 2030, la centrale solaire Cheikh Mohammed ben Rashid Al Maktoum sera sans aucun doute la plus grande du monde. Aussi étendue qu’une ville comme Strasbourg, elle affichera une puissance de 5 gigawatts (GW), l’équivalent de 5 réacteurs nucléaires.

Situé en plein désert à 50 km de la ville de Dubaï, le projet a été lancé en 2012 par la Dubaï Electricity and Water Authority (DEWA). La capacité actuelle de ce « giga » parc est d’un peu plus de 1 GW, mais DEWA espère la multiplier par cinq d’ici 10 ans en y investissant plus de 13 milliards de dollars. L’électricité y est produite par un mix composé de panneaux photovoltaïques et d’installations solaires à concentration (CSP).

La plus grande tour thermo-solaire

S’y ajoutera bientôt une tour thermo-solaire de 262 mètres (la plus grande du monde) qui concentrera les rayons focalisés par 70.000 miroirs orientables appelés héliostats[1]. Ce fleuron de technologie aura la particularité de produire de l’électricité 24 heures sur 24, de jour comme de nuit. Le récepteur thermo-solaire qui trône au sommet de la tour transmettra en effet l’énergie réfléchie par les miroirs à un fluide caloporteur constitué de sels fondus, lesquels sont portés à une température de plus de 560 °C. Ils passent ensuite dans un échangeur de chaleur qui chauffe l’eau d’un circuit secondaire. Comme dans toutes les centrales électriques thermiques, la vapeur ainsi produite est envoyée vers des turbines qui entraînent les alternateurs.

Mais une partie des sels fondus sont stockés dans de grands réservoirs, bien isolés, situés au pied de la tour. Ils conservent une température élevée pendant une quinzaine d’heures, ce qui permet à l’installation de fonctionner en continu, même lorsque le Soleil s’est couché.

La tour thermo-solaire concentre les rayons focalisés par 70.000 miroirs orientables

Des chiffres qui donnent le tournis

Cette centrale thermo-solaire entrera en production d’ici quelques mois. Elle délivrera une puissance électrique « pilotable » de 100 MW et aura coûté la bagatelle de 400 millions d’euros. Il s’agira de la mise en service de la 4e phase du parc solaire Mohammed ben Rashid Al Maktoum (MBR pour les intimes), du nom de l’émir de Dubaï, lequel est aussi vice-président et premier ministre des Emirats Arabes Unis (EAU). Lorsqu’il sera complètement achevé, vers 2030, ce parc, avec ses 11 millions de panneaux photovoltaïques, affichera une puissance de 5 GW et s’étendra sur 77 km2, une superficie équivalente à celle d’une grande ville comme Strasbourg. Des chiffres qui donnent le tournis !

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Une technologie belge

Le récepteur thermo-solaire qui, au sommet de la tour, constitue le cœur de la centrale CSP pèse 1.500 tonnes à lui seul. Il a été conçu et fabriqué par le groupe belge John Cockerill, leader mondial de cette technologie. « Il s’agit d’un contrat d’une cinquantaine de millions d’euros » a confié l’administrateur-délégué de John Cockerill, Jean-Luc Maurange, à nos confrères de L’Echo.
L’entreprise, basée à Seraing dans la banlieue liégeoise, n’en est pas à son coup d’essai : elle a déjà équipé les centrales CSP Khi Solar One (Afrique du Sud), Haixi (Chine) et Cerro Dominador (Chili, dans le désert d’Atacama). Un cinquième récepteur est en cours de réalisation en Afrique du Sud également et John Cockerill prépare d’autres projets en Arabie Saoudite, en Inde, en Australie et au Maroc, dans toutes les régions inondées de soleil.

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Vers un boom des renouvelables dans le désert

Les Emirats arabes unis, dont fait partie Dubaï, disposent actuellement de près de 6% des réserves mondiales de pétrole. Membre de l’OPEP, le pays est le 7e plus grand producteur de pétrole brut et de gaz au niveau mondial. En 2018 il dépendait encore à 99 % des énergies fossiles pour son approvisionnement énergétique. Mais les autorités misent désormais sur les énergies renouvelables pour réorienter leur stratégie de développement. La mise en service des premières phases du parc solaire Mohammed ben Rashid Al Maktoum permet déjà de couvrir 3% de l’électricité consommée à Dubaï.
D’ici 2050, les Emirats ambitionnent de couvrir 50% de leur demande en énergie par les renouvelables et de réduire de 70 % leurs émissions de gaz à effet de serre.

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[1] Un héliostat est un dispositif permettant de suivre la course du Soleil, généralement pour orienter toute la journée les rayons solaires vers un point ou une petite surface fixe, à l’aide de miroirs.