Les pays du nord de l’Europe sont souvent cités comme modèles de la transition énergétique. À raison, puisque la part des énergies renouvelables y est plus élevé qu’ailleurs. La Finlande se distingue particulièrement grâce au déploiement massif de pompes à chaleur en forte, malgré un climat rigoureux.

Les ventes de pompes à chaleur ont explosé en Finlande, durant les 3 derniers trimestres de 2022. Selon les statistiques de l’association finlandaise des pompes à chaleur (SULPU), les ventes de modèles air/air ont augmenté de 100 %, soit 160 000 unités. Les ventes des pompes à chaleur air/eau ont augmenté de 30 %, soit 19 000 unités. Les ventes de pompes géothermiques (eau ou sol/eau) ont crû de 20 %, soit 12 000 unités. Les ventes de pompes à chaleur « sur air extrait », très présentes en Finlande, sont en faible baisse. Le total des ventes de pompes à caleur s’élève à 196 000 unités.

La Finlande a une population de 5,56 millions d’habitants, avec un parc de résidences principales d’environ 2,8 millions, ce qui donne un chiffre record de 70 PAC pour 1 000 logements. Le parc total des pompes à chaleur est de 1,4 million de machines et représente 20 % des besoins de chauffage dans ce pays.

Pourquoi un tel engouement malgré un climat polaire ?

Le mix énergétique global de la Finlande est basé sur la biomasse (35 %), le pétrole (22 %), le nucléaire (20 %), le charbon/tourbe (10 %), le reste étant complété par le gaz (7 %), l’hydraulique (4 %) ainsi que l’éolien et le solaire (2 %), selon les données 2021 de l’Agence internationale de l’énergie (IEA). Le mix électrique de la Finlande, quant à lui, exploite majoritairement du nucléaire et des sources renouvelables. Moins de 15 % de l’électricité est générée à partir d’énergies fossiles.

Comme partout en Europe, la hausse du prix de l’énergie et le souhait de passer à un mode de chauffage indépendant des énergies fossiles a favorisé l’émergence des pompes à chaleur. Traditionnellement, le chauffage des maisons en Finlande est souvent électrique, couplé avec de la biomasse (cheminée, insert, poêle à bois) et les besoins en éclairage sont conséquents. Dans les conditions météo du sud de la Finlande où se trouve la majorité de la population, les pompes à chaleur représentent la solution la plus pratique et la plus rentable.

La pompe à chaleur air/air permet de réduire de 40 à 60 % les besoins en énergie de chauffage de la maison, par rapport à du chauffage électrique direct. Les grands espaces bien isolés et une bonne répartition de la chaleur permettent de réaliser les économies. Le climat froid augmente les besoins en énergie. Ainsi, une économie de 50 % sur la facture totale d’électricité devient importante. En utilisant également le bois, la pompe à chaleur permet d’uniformiser la chaleur ambiante dans la maison, en limitant les courants d’air.

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De plus, les Finlandais apprécient les fonctions de filtration de l’air des appareils actuels, qui augmentent le confort de vie des personnes allergiques. Les pompes à chaleur air/air fonctionnant jusqu’à -20 °C y sont considérées comme de véritables appareils de chauffage, car les besoins en climatisation sont infimes. Des subventions sont accordées, contrairement en France, ou seules les pompes à chaleur air/eau et eau ou sol/eau sont aidées (les PAC air/air étant considérées comme des appareils de climatisation dans notre pays, alors qu’elles sont réversibles).

Des subventions sont aussi disponibles pour remplacer les chaudières au fioul et pour améliorer l’isolation thermique. Elles stimulent les ventes des pompes à chaleur air/eau et géothermiques sur le marché de la rénovation des systèmes de chauffage central au fioul. La Finlande compte environ 250 000 maisons chauffés au fioul, et au rythme actuel, l’usage du fioul sera cantonné à une utilisation uniquement par grand froid, à l’horizon 2030.

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Le paradoxe Finlandais

La consommation d’énergie primaire par habitant est très élevée, supérieure à 50 % des autres pays de l’OCDE. Ceci est dû à l’industrie lourde, qui représente 43 % de la consommation finale d’énergie. Avec 71,6 % du territoire couvert par des forêts, soit 230 000 km², la ressource biomasse y est très importante. L’industrie forestière est le 2ᵉ secteur au niveau des exportations après l’électronique. Aujourd’hui, les copeaux de bois et les sous-produits de l’industrie forestière sont valorisés dans la production combinée de chaleur et d’électricité et bénéficie d’un régime fiscal favorable. De plus, le pays utilise ces résidus pour produire des biocarburants de 2ᵉ génération, dont l’industrie finlandaise est le leader mondial.

La Finlande se distingue par un usage important d’électricité dans sa consommation finale d’énergie. La récente mise en service du réacteur EPR à la centrale Olkiluodo, va couvrir 19 % des besoins. La production d’électricité décarbonée bon marché ne cesse d’augmenter, offrant un boulevard aux pompes à chaleur. Malgré le conflit russo-ukrainien, et avec les essais de l’EPR pendant l’année 2022, les Finlandais ont gardé une confiance sans faille dans leur capacité de production électrique, tout en conservant une politique d’électrification massive.

Au printemps, la production d’hydroélectricité a été si élevée qu’elle a contraint le nucléaire à réduire la cadence et à injecter ponctuellement de l’électricité gratuite sur le réseau. La Finlande se rapproche de l’autosuffisance électrique et aura, d’ici quelques décennies, la possibilité d’exporter massivement ses excédents tout en poursuivant la décarbonation des modes de chauffage.

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