Si certaines éoliennes sont à entraînement direct, d’autres fonctionnent grâce à une boite de vitesse. Cet élément imposant est censé durer aussi longtemps que la turbine. Dans de rares cas, il peut s’user prématurément et nécessiter son remplacement complet. C’est ce qui est arrivé à une éolienne de la Compagnie Nationale du Rhône (CNR) située à Fos-sur-Mer. Révolution Énergétique s’est immergé dans les coulisses de l’opération. Vous pourrez voir notre reportage vidéo en fin d’article.

Il existe deux principaux types d’éoliennes : elles peuvent être à « entraînement direct » ou à « multiplicateur ». Les premières n’ont pas besoin de boîte de vitesse : le générateur, conçu pour fonctionner à faible allure, est directement entraîné par les pales. Ce modèle de turbine est principalement commercialisé par la marque allemande Enercon. Dans les secondes, la boite de vitesse permet de multiplier par 40 à 70 la vitesse de rotation des pales afin d’entraîner le générateur.

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Une pièce aussi lourde qu’un semi-remorque

Cette pièce de 19 tonnes, soit autant qu’un semi-remorque, occupe presque tout l’espace de la nacelle. Elle contient des trains épicycloïdaux : des engrenages emboîtés les uns aux autres avec une précision d’horloger. Sa durée de vie est censée être identique à celle de l’éolienne, soit une vingtaine d’années. Si certaines avaries peuvent être réparées sur place, d’autres sont si importantes qu’elles nécessitent de retirer complètement la boite de vitesse.

La boîte de vitesse défectueuse / Image : RE-HL

A Fos-sur-Mer dans les Bouches-du-Rhône, une éolienne de la Compagnie Nationale du Rhône (CNR) a dû subir une telle opération. La turbine Nordex N80 d’une puissance de 2,2 MW a cessé de fonctionner suite à la rupture d’un arbre de sa boite de vitesse. Une avarie relativement prématurée : l’élément était âgé de 16 ans alors qu’il était conçu pour durer 20 ans. Il sera expertisé pour connaître précisément l’origine de la défaillance.

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Une jambe de force pour éviter le basculement des pales

Le chantier a débuté trois semaines après l’incident. Il consiste en premier lieu à dresser une imposante grue mobile. L’engin de 450 tonnes dispose d’une flèche s’élevant à plus de 80 m de hauteur au-dessus de la nacelle. Il assiste en permanence les huit opérateurs présents dans la nacelle qui s’affairent à désincarcérer la boite de vitesse.

Bien avant son levage, l’élément est en effet arrimé à la grue pour permettre son détachement de la chaîne cinématique. Car tous les éléments sont dépendants les uns des autres dans ce type d’éolienne. Ainsi, pour éviter que les 50 tonnes des pales, du rotor et de l’arbre lent basculent en avant lors du retrait de la boite de vitesse, il est nécessaire d’installer une « jambe de force ». Ce robuste pont métallique soutient l’ensemble le temps de l’opération.

L’éolienne Nordex N80 de 2,2 MW en chantier / Image : RE-HL

Une fois les fixations déboulonnées, les circuits hydrauliques démontés et les arbres de transmission détachés, la boite de vitesse défectueuse peut être retirée. Pour cela, le grutier est uniquement guidé à la voix, sans aucune vue sur les opérations. Des manœuvres incroyablement précises qui se distinguent à travers les instructions solennelles du chef de chantier dans le talkie-walkie.

Des pièces rénovées puis remises en circulation

En quelques minutes, la machine de 19 tonnes parvient au sol. Elle sera réexpédiée à son fabricant, qui procédera à sa rénovation. Dans l’éolien comme dans d’autres secteurs industriels, tous les éléments qui le peuvent sont rénovés et placés dans une banque de pièces détachées. Cette boite de vitesse endommagée sera donc réintégrée dans une éolienne après réparation complète.

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La nouvelle boite, placée dans la nacelle peu de temps après la dépose, est elle-même issue d’une rénovation. L’éolienne sera remise en service quelques jours plus tard, après une série de tests.

Le coût total d’une telle opération s’élève à environ 300 000 €, dont 200 000 € pour la boite de vitesse, explique Stéphane Subrin, ingénieur exploitation de la CNR. Il n’est pas supporté par le propriétaire de l’éolienne mais par le turbinier (le fabricant), dans le cadre d’un contrat d’assurance tout risque. Ce dernier compense également le manque à gagner causé par l’immobilisation prolongée de la turbine.

Notre reportage vidéo de l’opération

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