À l’abandon, le vieux barrage du lac Noir en Alsace attend depuis près de 20 ans sa renaissance. Alors qu’il permettrait de stocker de l’électricité renouvelable, aucun énergéticien ne souhaite le rénover ni l’exploiter. Une situation surprenante à l’ère de la transition écologique.

Le barrage hydroélectrique du lac Noir n’est pas une centrale comme les autres. Lancée en 1933, il s’agit de la toute première STEP (Station de transfert d’énergie par pompage-turbinage) de France. Une technologie un peu oubliée, qui retrouve aujourd’hui de l’intérêt grâce aux énergies renouvelables. Elle permet en effet de stocker l’électricité lorsqu’elle est excédentaire et de la restituer lors des pics de consommation, en vidant ou remplissant des lacs d’altitudes différentes. Simple, propre et peu coûteux, ce système est indispensable pour intégrer au mieux la production intermittente des fermes éoliennes et solaires.

Le bâtiment de pompage-turbinage de la centrale du lac Noir, dynamité en 2014. Les turbines généraient une puissance maximale de 80 MW grâce à une hauteur de chute d’environ 100 m.

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Pas assez rentable

Malgré ces avantages, la STEP du lac Noir reste un fantôme qui n’a plus généré le moindre électron depuis 2002. La centrale est mise à l’arrêt suite à une avarie technique et ne reprendra jamais du service. EDF, son dernier exploitant, s’était engagé à la reconstruire après en avoir récupéré la concession en 2009. Le producteur national a dynamité les installations en 2014 et finalement renoncé aux travaux.

Pourquoi un tel désintérêt ? Si la STEP du lac Noir est techniquement et écologiquement pertinente, son potentiel économique est limité. L’électricité est aujourd’hui négociée à un prix si bas que les 55 MW de la future centrale ne permettraient pas d’atteindre la rentabilité, explique EDF. D’autant que le site, presque entièrement détruit, nécessite un investissement de 80 millions d’euros pour fonctionner à nouveau.

Le lac Noir, bassin inférieur de la STEP. Sa hauteur d’eau variait d’environ 18 m chaque jour en recevant les eaux du lac Blanc, le bassin supérieur.

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Une nouvelle concession ?

La renaissance du barrage pourrait venir d’une nouvelle concession. Une procédure complexe, soumise au droit européen, qui reporterait d’au moins une décennie l’éventuelle remise en service. Un délai trop long pour l’association « Lac Noir », qui milite en faveur d’une rénovation rapide de la centrale par EDF. Elle souhaite le maintien de la concession actuelle via le soutien des autorités locales et nationales. Subventionnée, la centrale pourrait alors redémarrer dans un délai plus cohérent avec les objectifs de la transition énergétique.

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