Plutôt que du gaz ou de l’électricité, une PME Suisse s’apprête à utiliser directement les rayons du soleil pour recycler de l’acier. Elle s’est équipée d’un puissant four solaire à concentration, qui lui permettra de fondre le métal à un coût environnemental et énergétique quasi nul.

Pour la première fois, de l’acier sera recyclé de façon industrielle uniquement à partir de la chaleur du soleil. À la Chaux-de-Fonds en Suisse, la société Panatere installe actuellement un four solaire qui lui permettra, à terme, de fondre jusqu’à 400 tonnes d’acier recyclé chaque année. La PME spécialisée dans la microtechnique fournit des pièces principalement destinées à l’industrie horlogère.

Une production qui génère d’importantes quantités de déchets d’acier et de titane, sous forme de copeaux, chutes et pièces défectueuses. Jusque-là perdue, cette matière sera désormais recyclée dans le four solaire. Pour rentabiliser l’installation, l’entreprise collectera également les rebus métalliques auprès d’industriels locaux. Les lingots seront réutilisés par Panaterre ou vendus à d’autres entreprises.

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Le futur « Centre de traitement solaire des métaux » / Image : Panaterre.

Une fournaise de 2 000 °C

Selon la PME, le four atteindra une température de 2 000 °C, largement suffisante puisque le point de fusion de l’acier, de l’inox et du titane se situe entre 1 400 et 1 700 °C. Pour obtenir une telle fournaise, le dispositif devra concentrer la puissance du rayonnement solaire en un seul point grâce à des miroirs.

C’est le principe du « solaire à concentration », qui est aussi exploité dans des centrales électriques thermodynamiques et fours à visée scientifique. L’installation industrielle de Panaterre est donc une première mondiale. Jamais de l’acier n’avait été fondu commercialement grâce à la seule énergie du soleil.

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Développé en partenariat avec l’École polytechnique fédérale de Lausanne, son four solaire s’étendra sur 15 m de large pour 6 m de haut. Il consiste en deux surfaces recouvertes de miroirs disposés différemment. La première, totalement plate, dirige les rayons vers la seconde, concave. Cette dernière génère un rayon lumineux extrêmement concentré, orienté vers la cellule où se trouvent les métaux à fondre.

Le four solaire d’Odeillo en France, dont le principe de fonctionnement est identique à celui de Panaterre. Images : RE-HL.

Jusqu’à 400 tonnes d’acier et de titane recyclés chaque année

Malgré un ensoleillement estimé à 1 500 heures annuelles (deux fois moins que dans le sud-est de la France), Panaterre prévoit de fondre 50 tonnes d’acier et de titane dès 2023. Elle espère porter ce volume à 400 tonnes/an d’ici 2026, grâce à la création d’un « Centre de traitement solaire des métaux » qui exploitera 4 fours solaires en un lieu unique.

Comparé à de l’acier neuf, l’acier recyclé grâce au soleil permettrait de diviser par 165 le bilan carbone de l’activité, promet l’entreprise. Les coûts et la cadence de production ne seront pas dépendants des prix du gaz et de l’électricité, mais uniquement de la météo, ce qui n’est finalement pas si contraignant dans le contexte actuel.

L’investissement s’élève à plus de 25 millions d’euros et créera une dizaine d’emplois, explique la PME à l’Usine Nouvelle. Le premier four solaire doit entrer en service avant la fin de l’année.

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