Les éoliennes installées en mer disposent de fondations immergées exposées à la corrosion. Plusieurs technologies permettent d’éviter ce phénomène, la plus connue étant la protection cathodique. Cette dernière est critiquée, à cause de son  utilisation d’anodes sacrificielles, lesquelles rejettent des métaux dans le milieu marin. Des alternatives existent toutefois et sont de plus en plus privilégiées par les opérateurs.

Coques de navires, quais, canalisations, plateformes pétrolières, ballons d’eau chaude et… certaines éoliennes offshore : de nombreux éléments métalliques en contact permanent avec l’eau sont protégés par anode sacrificielle. Cette technologie est régulièrement pointée du doigt par les opposants aux éoliennes en mer concernant son impact environnemental supposé. Mais de quoi s’agit-il au juste ?

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Qu’est-ce que la protection par anode sacrificielle ?

Une anode sacrificielle est un lingot essentiellement composé d’aluminium mais également d’indium, de zinc ou d’autres métaux selon l’application qui lui est destinée. La pièce est simplement fixée sur les parties à protéger de la corrosion. Proportionnellement à ses dimensions, une coque de navire ou un quai peut ainsi compter plusieurs dizaines d’anodes. Par le jeu des différences de potentiel électrochimiques, l’anode se « sacrifie » en se corrodant à la place de l’élément à préserver.

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Hélas, le processus provoque la dissolution dans l’eau des métaux qui composent l’anode. Selon Jacquet Dechaume, un fabriquant d’anodes sacrificielles, la protection d’un grand port tel que celui de Calais implique le rejet annuel de 23,8 tonnes d’aluminium, 1,2 tonnes de zinc et 100 kg d’indium dans le milieu marin. Cela représente l’équivalent de 1,8 millions de canettes de soda.

Une anode sacrificielle corrodée sur la coque d’un bateau / Image : Adrian Midgley – Flickr CC

Quels parcs éoliens offshores utilisent des anodes sacrificielles  ?

Certains parcs éoliens en mer utilisent ou utiliseront la solution de l’anode sacrificielle pour préserver les fondations des turbines. Ce sera notamment le cas des futurs parcs de Fécamp et Saint-Brieuc. Pour ce dernier, les rejets annuels de zinc et d’aluminium sont estimés à environ 64 tonnes par Ailes Marines, son opérateur. Chaque éolienne consommera donc autour de 1 000 kg d’anodes chaque année.

L’impact environnemental de ces rejets n’est pas parfaitement connu. Une étude publiée en 2011 par l’IFREMER, ACCOAST, BAC Corrosion et l’Université de Caen Basse-Normandie affirme toutefois que « la protection cathodique des ouvrages métalliques maritimes par anodes sacrificielles en aluminium/indium ne semble pas engendrer une surconcentration d’éléments métalliques dans le milieu environnant et dans les organismes vivants. ».

« La majeure partie de ces éléments demeure à la surface de l’anode, sous forme d’oxydes. » estime l’étude. Elle nuance cependant en précisant que « d’une part, il est difficile de différencier l’origine des éléments mesurés in situ et, d’autre part, les éléments présentant le plus de risques écotoxicologiques sont diffusés à de faibles concentrations vers l’environnement. »

Les types de protections utilisées sur les parcs éoliens offshore français. / Infographie : RE

L’anode à courant imposé : une alternative plus écologique

Pour éviter toute polémique, quelques projets de parcs éoliens marins comme ceux de Dieppe – Le Tréport et d’Yeu – Noirmoutier ont abandonné la protection par anode sacrificielle au profit de la technique de l’anode à « courant imposé ». Elle consiste à protéger les structures de la corrosion en les polarisant au moyen d’une tension électrique continue. Sur le futur parc éolien d’Yeu-Noirmoutier, cette tension ne dépassera pas 6 Volts, soit l’équivalent de 4 piles AA montées en série.

La protection par anode à courant imposé ne rejette pas de métaux dans l’eau. Son impact environnemental est donc nettement plus intéressant que l’anode sacrificielle. Il nécessite en outre moins de matériaux et requiert moins d’entretien. Le choix du type de protection n’est donc qu’une question financière. Certains promoteurs de parcs éoliens préfèrent ainsi l’anode sacrificielle, moins coûteuse à l’installation que l’anode à courant imposé.

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